Messe dans le stade de Bangui, avec Mgr Nzapalainga et le card. Turkson, République centrafricaine, novembre 2015

Screenshot CTV - Mass

ONU: la nouvelle mission du p. David Paul Charters

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Un témoin de la visite du pape en Centrafrique

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Le p. David Paul Charters a rejoint la Mission permanente d’observation du Saint-Siège à l’ONU en septembre 2018, au début de la 73ème Session de l’Assemblée générale, où il a couvert la session du Conseil de Sécurité, ainsi que le premierComités (sur le désarmement) et le quatrième (questions de politiques particulières). C’est la deuxième affectation du p. Charters dans le Corps diplomatique du Saint-Siège, après qu’il a servi en République Centrafricaine pendant quatre ans.

La Mission du Saint-Siège à l’ONU à New York publie cette interview en anglais pour présenter le nouveau membre de la mission.
Il évoque notamment la visite du pape François en République centrafricaine, en novembre 2015.

AB

Quel a été votre environnement familial ?

Je suis né en 1974 dans le nord-ouest de l’Angleterre, dans une famille catholique pas particulièrement pratiquante, bien que mon père appartienne à l’Église d’Angleterre. J’ai été baptisé bébé par tradition, mais j’ai fait ma première communion par choix. J’ai choisi d’être catéchisé et d’aller à la messe le samedi contrairement au reste de ma famille. Un dimanche matin, à l’âge de 11 ans, j’ai entendu sonner les cloches et j’ai réalisé que j’aurais dû être à la messe. Il fallait que je me comporte bien pendant la semaine, sinon mes parents ne me laissaient pas aller à la messe le dimanche. Je parlais de ce que j’avais appris au catéchisme et mon frère se moquait de moi. Mais maintenant ils me soutiennent.

Qu’est-ce qui vous a amené au sacerdoce ?

La réponse est brève : ce sont les prêtres que j’ai rencontrés et la liturgie, en particulier la célébration de la messe, qui m’ont amené au sacerdoce. J’ai réalisé que j’avais reçu un grand cadeau et je voulais aider les autres à apprécier le cadeau de la foi, le cadeau de la prière, le cadeau d’une relation avec le Christ.

Comment avez-vous servi en tant que prêtre avant cette affectation ?

J’ai été ordonné à l’âge de 33 ans et j’ai travaillé comme vicaire à Altrincham, en Angleterre (dans mon diocèse natal de Shrewsbury) pendant trois ans, faisant beaucoup de formation à la foi pour adultes, ce que j’ai vraiment beaucoup aimé. Et puis un jour, mon évêque m’a contacté en me demandant de reprendre des études à Rome, en vue de travailler pour le service diplomatique du Saint-Siège. Ce fut vraiment une surprise, je vous assure ! Je savais que cela existait, mais ce n’était simplement pas sur mon radar. Je ne pensais pas que c’était pour des prêtres normaux. Après y avoir étudié pendant trois ans, j’ai reçu ma nomination de Mgr Becciu (qui était alors Substitut pour les Affaires générales de la Secrétairerie d’État) et la première chose qu’il m’a dite était que j’allais dans un pays très difficile et il m’a demandé quel était mon niveau de français. J’étais envoyé en République Centrafricaine.

Je dois avouer que je ne connaissais même pas le nom de la capitale, et pourtant ce lieu allait rapidement devenir le centre de ma vie. La capitale de Bangui était tombée entre les mains de rebelles fin mars 2013, quelques semaines après l’élection du pape François et c’était probablement pour lui l’une de ses premières crises internationales. Quand je suis arrivé là-bas en août 2014, la situation était encore explosive et le conflit était toujours en cours. Il y avait beaucoup de lieux de la ville où nous ne pouvons pas aller et souvent, nous ne pouvions pas sortir.

Le pape est venu en République Centrafricaine en 2015 et par conséquent j’ai passé une bonne partie de ma deuxième année en République Centrafricaine à organiser sa visite. La situation était très tendue ; personne ne voyait vraiment d’issue. Le pape est venu et sa visite a d’une certaine façon « percé l’abcès » et cela a été un grand exemple de ce qu’est la diplomatie papale – sa présence, ses actions et ses gestes.

Pouvez-vous partager quelques temps marquants de la visite du pape en République Centrafricaine ?

Trois choses m’ont frappé dans cette visite. Nous sommes allés l’accueillir à l’aéroport et les gens enlevaient leurs vêtements pour les mettre sur le sol devant sa voiture. Ils couraient avec des palmes. C’était comme le dimanche des Rameaux. Partout où allait la voiture du pape, les gens étaient là. Il n’y avait pas un espace vide.

Le second point est quelque chose que j’ai remarqué lorsque je lui ai servi à boire au déjeuner. Sa soutane blanche était couverte des marques des mains des enfants. Il s’était tout à fait littéralement laissé toucher. C’était un signe clair que le pape était venu pour faire un avec leurs souffrances. Il a même passé une nuit dans la capitale, ce qui est très significatif parce que jusque là, aucun chef d’État ni aucun personnage international n’avait passé plus de quelques heures à visiter Bangui.

Le troisième point fut la visite du pape à la mosquée. Il y avait des tensions entre chrétiens et musulmans depuis le début de la guerre et par conséquent, à la lumière de la situation de sécurité, il avait été suggéré qu’une délégation de musulmans visite la nonciature pour y saluer le pape. Le pape François avait d’autres idées ! Sa visite en République Centrafricaine aurait été incomplète s’il n’était pas allé dans le 3ème district de Bangui et il est donc allé à la mosquée comme prévu. Ensuite, avec l’Imam, ils ont fait le tour des rues de cette banlieue dans la papamobile et les gens des deux religions suivaient derrière en chantant et en applaudissant avant que le pape ne se rende au Stade où la messe de clôture devait être célébrée. Jusqu’à ce jour, les gens avaient peur d’aller dans certaines banlieues et maintenant les barrières avaient été brisées. Il y avait un diplomate qui a dit que cette journée faisait penser à la chute du Mur de Berlin. Il y a vraiment eu une atmosphère de paix dans les quelques mois qui ont suivi.

Les choses continuent d’avancer et il y a eu des revers. Mais je dirais que la visite du pape a été un signe massif et un catalyseur de changement. Deux semaines plus tard, ils ont pu voter une constitution qui a été ensuite suivie par des élections justes et transparentes.

Que comporte votre travail à la Mission et comment l’appréciez-vous jusqu’à maintenant ?

C’est ma seconde affectation. Cela a été une grande surprise lorsque j’ai découvert que je venais ici. Je me suis senti à la fois enthousiaste et intimidé. Je couvre le Conseil de Sécurité et le premier (Désarmement) et le quatrième (Questions politiques particulières) Comités.

« La donne a changé » – pour employer une expression américaine – venir d’un pays, avec la manière dont il est relié au monde, dans sa transition de la guerre à la paix et à la stabilité, et maintenant regarder le monde entier et regarder d’autres situations qui ont besoin d’aide sur le chemin de la paix. Je suppose que les deux expériences, de manière différente, m’ont montré l’importance du service diplomatique du Saint-Siège et combien il est remarquable que nous ayons notre place à la table de la famille des nations, pour pouvoir donner le message inspiré par notre foi et par notre croyance dans l’humanité. Nous pouvons partager ce que signifie être humain et ce que signifie essayer de créer un environnement où les gens peuvent vivre une vie pleinement humaine. La Mission ici essaie, autant que possible, de traduire les préoccupations pastorales du pape, qu’il s’agisse de migration, de changement climatique ou de paix et de sécurité, en particulier pour les pays qui sont oubliés et dans les périphéries.

J’ai trouvé ici une équipe dynamique et motivante avec un grand soutien, ce qui m’aide à embrasser mon travail et à y trouver un certain accomplissement, même s’il est à des années lumière de l’expérience de ces quatre dernières années et de la manière dont j’envisageais ma vie de prêtre.

Quelle est votre impression de New York ?

Quelqu’un m’a dit, lorsque j’ai été nommé, que c’était comme une douche froide suivie d’une douche chaude ; c’est un saut d’un extrême à l’autre. Pour vous donner un exemple, en République Centrafricaine, il n’y a environ que 200 miles de routes dans un pays de la taille du Texas, et le reste consiste en des pistes en terre avec deux ou trois restaurants dans Bangui. Pas de théâtres, pas de musée en activité. Je suis venu d’un pays dont j’ai dû chercher le nom de la capitale pour la capitale du monde Bien sûr, je ne suis pas ici en touriste mais je chercherai certainement à faire l’expérience de la culture que la ville a à offrir.

Propos recueillis par Anna Fata 

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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