Le cardinal lituanien Sigitas Tamkevicius, survivant du goulag, archevêque émérite de Kaunas, a solennellement « pris possession » de son « titre cardinalice » de Sant’Angela Merici, à la veille de la mémoire liturgique de la fondatrice des Ursulines sainte Angèle Merici (1474-1540), le 26 janvier 2020, indique L’Osservatore Romano en italien des 27-28 janvier.
Rappelons que l’église romaine a en effet été attribuée au cardinal Tamkevicius par le pape François qui l’a « créé » cardinal lors du consistoire du 5 octobre 2019. C’est en souvenir du fait que les curés de Rome étaient les premiers conseillers des papes que les nouveaux cardinaux sont symboliquement rattachés à une église de Rome. Le « titre » – du latin « titulum » – rappelle les antiques églises lieux du culte des premiers martyrs.
Dans l’église romaine du quartier de Nomentano, le cardinal jésuite a été accueilli par le curé, don Danilo Spagnoletti, qui lui a tendu le crucifix pour qu’il l’embrasse et le vénère. Une fois dans le chœur, le cardinal a remis la bulle d’assignation à Mgr Lucio Bonora, clerc de la Chambre apostolique, qui en a fait la lecture.
Le cardinal a ensuite présidé la messe, guidée par le cérémoniaire pontifical Mgr Marco Agostini. Parmi les concélébrants, étaient, entre autres : Mgr Algirdas Jurevicius, administrateur du diocèse de Kaunas, Mgr Rolandas Makrickas, de la secrétairerie d’État, les recteurs du Collège pontifical lituanien à Rome et du séminaire diocésain de Kaunas et un grand nombre de prêtres du pays balte. L’ambassadeur de Lituanie près le Saint-Siège, Zapolskas Petras, était aussi présent.
Le cardinal lituanien, jésuite, est, rappelons-le, un survivant du goulag de Sibérie. Il a accompagné le pape François lors de sa visite du « Musée des Occupations » à Vilnius, c’est-à-dire le musée des horreurs nazies et soviétiques et du martyre de la Lituanie sous le joug de l’occupant: ce musée était une prison et un lieu de torture. Le cardinal Tamkevicius y a été détenu.
Ce « Musée des occupations et des combats de la liberté » a été installé dans l’immeuble qui a été le quartier général de la Gestapo lors de l’occupation nazie à partir de 1941 et, à partir de 1944 jusqu’en 1991, de quartier général du KGB, servant de prison, de lieu de torture et d’exécution, près de la place Lukiskės. Quand on y visite les cellules, on y découvre des photos de la résistance héroïque des Lituaniens aux totalitarismes du XXe s., notamment à l’occupation soviétique : les Lituaniens ont résisté avec des armes pendant dix ans, puis clandestinement. Des cellules de torture par l’eau anciennement murées ont été redécouvertes.
Mgr Tamkevicius, alors jeune prêtre, y a été détenu et interrogé par le KGB, avant d’être condamné à 10 ans de travaux forcés et d’exil en Sibérie: il a survécu, célébrant la messe grâce à des miettes de pain et du jus extrait de raisins secs, et il n’est revenu qu’en 1988. Mais il a confié à Anita Bourdin que l’époque du goulag a été un très beau moment de sa vie de prêtre en raison de la « présence du Seigneur ».
Avec une traduction d’Hélène Ginabat, et Anita Bourdin