« Le pape est transparence du Christ souffrant et glorieux », affirme le card. Barragán

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Entretien avec le président du Conseil pontifical pour la pastorale des services de la santé

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CITE DU VATICAN, Jeudi 3 février 2005 (ZENIT.org) – « Le pape est transparence du Christ souffrant et glorieux », a affirmé le président du Conseil pontifical pour la pastorale des services de la santé, dicastère créé par Jean-Paul II pour accompagner l’Eglise dans son témoignage face à la douleur et la maladie.

Zenit a rencontré le cardinal Javier Lozano Barragán, hier mercredi, à midi, quelques instants après la diffusion du communiqué du directeur du Bureau de presse du Saint-Siège sur l’état de santé du pape annonçant « la stabilisation de son état clinique ».

Zenit : L’attention des médias s’est concentrée ces derniers jours sur la personne de Jean-Paul II, surtout depuis son hospitalisation. Comment le pape vit-il cette nouvelle épreuve ?

Card. L. Barragan : Etant donné les bulletins médicaux dont nous disposons, ce qui s’est passé ne nous préoccupe pas particulièrement. Il y a eu certaines complications la nuit dernière (la nuit de lundi à mardi, ndlr) et l’on a pensé qu’il était bon de conduire le pape à l’hôpital Gemelli car celui-ci dispose de tous les moyens nécessaires pour l’assister au mieux. C’est une forte grippe qui a également des conséquences au niveau gastrique et, en raison des problèmes respiratoires qu’elle provoque, on a pensé qu’il pouvait être opportun de l’hospitaliser pour éviter des complications. Pour le moment, j’insiste, il n’y a aucune raison de s’alarmer de manière particulière.

Il est clair que le pape est malade et qu’il a 84 ans. Si nous nous mettons à considérer uniquement l’aspect physique, nous nous rendons compte que la santé se détériore car les cellules se détériorent toujours, en chacun de nous, à mesure que nous vieillissons. Et il ne fait aucun doute qu’il y a une fin. Ceci est évident.

Mais nous, chrétiens, et en premier lieu le pape, allons au-delà d’une mentalité d’ordre mécanique, biologique, purement physique. Face aux problèmes les plus aigus de l’existence, auxquels font face ceux qui en ont le courage, surgit l’interrogation : « Pourquoi la souffrance ? », « Pourquoi la mort ? »

Zenit : Et quelle est la réponse du pape à cette question ?

Card. L. Barragan : La réponse n’est pas une idéologie, quelle qu’elle soit, que ce soient des idéologies qui nient la mort – qui sont ridicules – ou des idéologies qui parlent d’une attitude stoïque – qui sont stupides. Tout le monde sait que le pire qui puisse nous arriver est de mourir. Et qu’il est certain que nous allons mourir. Si bien que la seule solution est quelque chose de merveilleux : c’est un fait historique, qui a bien eu lieu et qui encore parfaitement actuel, c’est le Christ mort et ressuscité.

Le pape utilise une très belle expression dans la Lettre apostolique « Salvifici doloris » (11 février 1984) qu’il reprend ensuite dans la Lettre « Novo millennio ineunte ») (6 janvier 2001) lorsqu’il dit que le Christ sur la Croix a d’un côté le visage, tout son être, souffrant et, d’un autre côté, glorieux. Les deux dimensions vont de pair, car le Christ sur la Croix n’a pas cessé d’être Dieu et était sûr de sa résurrection. Il souffrait et en même temps était joyeux.

Zenit : Vous croyez que le pape vit ces deux aspects en ce moment ?

Card. L. Barragan : Absolument, le pape ne dit pas : « Le Christ a été souffrant et glorieux et je veux l’imiter ». Non, il porte en lui – comme n’importe lequel d’entre nous peut le faire à travers le baptême et les autres sacrements – le Christ souffrant et glorieux. Et par conséquent ce n’est pas que j’imite ce comportement de Jésus, car je n’aurais pas la force pour le faire, ce serait absurde, mais je laisse toute la place au Christ avec sa toute-puissance divine pour qu’il supplée au maximum à mes faiblesses et qu’il me donne le maximum du bonheur. C’est un paradoxe qui se réalise uniquement grâce à la toute-puissance du Christ. C’est ce que l’on appelle la « création nouvelle ». Et là, il ne s’agit pas que Dieu fasse le monde à partir de rien, mais qu’il le fasse au-dedans de moi, à partir d’un rien coupable, c’est-à-dire, avec le péché originel, avec mes péchés, ma méchanceté, même si je suis malade de tous les maux du monde. C’est à ce moment que l’on fait l’expérience au plus profond de soi de la rédemption, de la rédemption, sérieusement.

Cette rédemption signifie joie et bonheur, car dans ma mort il y a le maximum de la vie, la création nouvelle à travers l’amour de l’Esprit Saint. L’Esprit qui planait sur les eaux originelles, dans la confusion initiale, a fait que surgisse le « cosmos », l’ordre. Et de cette confusion, qui signifie la douleur, la maladie, la mort, les ténèbres, l’Esprit, avec sa très heureuse lumière, son amour et sa consolation parfaite, fait surgir la création nouvelle, qui est la résurrection, la joie et le bonheur de celui qui souffre.

Dans ce sens le pape est transparence du Christ souffrant et glorieux.

Zenit : Vous croyez alors que le monde peut voir dans ce pape un autre Christ « alter Christus », comme lorsqu’un prêtre célèbre les sacrements ?

Card. L. Barragan : Oui, mais dans le cas du pape, on le voit de manière très spéciale. Le Christ est le principe et le fondement de l’Eglise, le roc, et le pape, Jean-Paul II, est ce fondement visible. C’est pour cela que son expérience douloureuse et glorieuse ressort de manière aussi forte en lui. Il est là pour confirmer, pour fortifier notre souffrance et notre joie. C’est son rôle.

Et ceux qui l’aident doivent y participer, en particulier depuis ce Conseil pontifical qu’il a lui-même institué avec cet objectif : offrir un témoignage du Christ, mort et ressuscité en particulier auprès de ceux qui souffrent et qui sont malades.

Zenit : En tant que président du Conseil pontifical pour la pastorale des services de la santé, quel conseil donneriez-vous aux chrétiens qui suivent de près les nouvelles sur le pape ?

Card. L. Barragan : Je leur dirais que c’est très bien de s’intéresser à la santé du pape mais qu’ils sachent interpréter ce que signifie la vie du pape pour notre propre vie, à chacun. C’est-à-dire que chacun de nous, chrétiens, nous nous sentions comme le Christ, souffrants et joyeux en même temps. C’est-à-dire que nous comprenions l’énorme erreur de l’ « éthique » de la santé de nos jours qui confond santé et bien-être. La santé est bonheur, harmonie et pas à proprement parler bien-être.

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ZENIT Staff

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