Séminaristes de Lombardie © Vatican Media

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La célébration de l'eucharistie et le silence (4/8)

Dialogue avec les séminaristes de Lombardie

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« La célébration eucharistique est importante : il est important de bien la faire, qu’elle soit un culte d’adoration, de joie, de communion entre nous, de communion avec le Christ », souligne le pape François.
Le dialogue du pape avec les séminaristes de Lombardie a eu lieu le samedi 13 octobre 2018, dans la salle Clémentine du Palais apostolique, au Vatican.
Le pape a répondu à un séminariste, Piergiorgio, à propos de l’eucharistie en mettant en garde: « Nous sommes en crise : nous n’avons pas résolu le problème de la célébration eucharistique. Je parle en général. Il y a de très bons exemples, mais en général nous devons reprendre. Et c’est un problème mondial. Certains pensent que nous ne devons pas bien faire les rubriques : ça ne va pas. On doit faire la fête et faire du bruit : ça ne va pas. Il faut de bonnes rubriques, nous avons besoin d’une fête, nous avons besoin de musique, nous avons besoin de prière, nous avons besoin de silence. »
Voici notre traduction, de l’italien, de la question du séminariste et de la réponse du pape, en italien.
AB
Piergiorgio
Saint-Père, bonjour, je suis Piergiorgio du diocèse de Crema. Je suis acolyte et samedi prochain, je serai ordonné diacre. Certains d’entre nous, séminaristes, recevront dans les prochains mois le ministère de l’acolyte qui fera d’eux des ministres extraordinaires de la Communion eucharistique. L’approfondissement du très saint mystère de l’Eucharistie accompagne donc et accompagnera tout notre cheminement. A cet égard, et aussi à l’occasion du Synode des jeunes, nous voudrions vous poser une question qui vient de nos expériences pastorales. En voyant tant de jeunes qui ne reconnaissent pas l’Eucharistie comme quelque chose d’important, comment pouvons-nous, nous, leur faire percevoir sa centralité culminante qui peut jaillir dans la vie de chaque homme et de chaque femme ? En ce sens, voudriez-vous partager avec nous un souvenir de jeunesse que vous avez concernant la relation avec Jésus dans l’Eucharistie ?
Papa François
Hier, à l’autel de la chaire [dans la basilique Saint-Pierre], à six heures moins le quart de l’après-midi, il y avait presque mille jeunes, et j’ai donné une méditation, puis ils ont fait une heure d’adoration eucharistique. Les jeunes ne refusent pas, mais quand ils arrivent à comprendre, à en ressentir le besoin…. C’est vrai, si tu en prends un et lui dis : « Viens, allons faire l’adoration », il s’endort… Mais c’est beau aussi de s’endormir devant le Seigneur ! Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus le faisait souvent, et moi aussi, c’est vrai ! Mais il faut une catéchèse sur ce qu’est l’Eucharistie, une catéchèse de vie. Je vais vous raconter une anecdote. Dans l’une des paroisses de Buenos Aires, le curé faisait son service de faire dîner les sans-abri. Tout était bien organisé : chaque jour de la semaine, il y avait un groupe différent. Des jeunes de bonne volonté, la plupart catholiques, et même certains qui ne croyaient en rien mais voulaient faire ce service, et ça fonctionnait bien. Il y avait ceux qui cuisinaient,… Au total – je pense – une vingtaine de jeunes par jour : 150 jeunes plus ou moins en comptant ceux qui faisaient la cuisine. A un moment donné, le curé de la paroisse a dit : « Ils font bien leur service. Je dois faire plus » Qu’a-t-il proposé avant de sortir ? D’écouter une parole de l’évangile. Donc, tous à l’église, pas plus de cinq minutes : une parole de l’Évangile. Et eux disaient : « C’est bien ! Mais ce n’est pas très…. ». Et le curé a dit : « Jésus est ici avec nous. Vous allez donner à manger à Jésus dans le besoin, mais Jésus est aussi ici dans le pain, caché, nous pouvons le regarder un peu avant de sortir… Voici, oui – pour ne pas faire long – il a commencé cette lecture de la Bible devant le Seigneur, pas plus qu’un quart d’heure. Et ces jeunes ont appris ce qu’est l’Eucharistie, mais peu à peu : la catéchèse sur l’Eucharistie doit se faire petit à petit, car c’est le grand mystère de la présence du Seigneur avec nous. Tu ne peux pas aller avec un livre et dire : « L’Eucharistie c’est ceci, c’est le sacrifice de l’Ancienne Loi qui alors, etc .. etc ». Le jeune homme ne comprendrait pas. Fais-lui sentir le besoin. Dans ce cas, le prêtre a été malin, il a dit : « Ceux-ci vont à Jésus dans le besoin. Je leur ferai voir le Jésus qui leur donne la force avec la Parole, 15 minutes, pas plus ». D’ailleurs il a commencé à faire l’adoration, et beaucoup d’entre eux allaient à l’adoration.
A ce propos, je voudrais aller plus loin sur les célébrations liturgiques. La célébration liturgique est un acte d’adoration, un acte de participation à la passion, à la mort et à la résurrection de Jésus, nous le savons tous. C’est un acte de louange à Dieu, de joie spirituelle. Mais tant de fois ça ressemble à une veillée funèbre ! Et là, nous devons aider les prêtres. Et vous qui serez prêtres, s’il vous plaît, n’ennuyez pas les gens. Il y avait une habitude – je ne sais pas si cela se fait encore ici – : quand le sermon commençait, beaucoup de gens sortaient fumer une cigarette. Le sermon ennuyeux. Le sermon c’est l’homélie : il doit toucher le cœur. Au contraire, s’il est ennuyeux, on ne comprend pas. Vous, les prêtres, lisez ce qui est écrit dans Evangelii gaudium sur l’homélie. C’est long, mais je l’ai voulu comme ça. Toucher. Un prêtre qui nous enseignait l’homilétique, nous disait : « Une idée, une image, un sentiment ». Et ça peut se faire en cinq minutes. Pensez que psychologiquement, les gens ne peuvent pas rester attentifs pendant plus de huit minutes. Une homélie de huit minutes, bien préparée : avec une idée claire, un sentiment clair et une image claire.
L’amour de l’Eucharistie doit se faire avec une catéchèse, mais de cette manière, par la Messe : qu’ils voient comment on célèbre la Messe. Qu’ils comprennent cela. L’adoration est plus facile pour la catéchèse des jeunes que la Sainte Messe, parce que vous pouvez expliquer : ce sera vingt minutes d’adoration, et le prêtre dit un mot toutes les six/sept minutes, ce qui aide. Introduire l’adoration. Mais la célébration eucharistique est importante : il est important de bien la faire, qu’elle soit un culte d’adoration, de joie, de communion entre nous, de communion avec le Christ. En cela nous sommes en crise : nous n’avons pas résolu le problème de la célébration eucharistique. Je parle en général. Il y a de très bons exemples, mais en général nous devons reprendre Et c’est un problème mondial. Certains pensent que nous ne devons pas bien faire les rubriques : ça ne va pas. On doit faire la fête et faire du bruit : ça ne va pas. Il faut de bonnes rubriques, nous avons besoin d’une fête, nous avons besoin de musique, nous avons besoin de prière, nous avons besoin de silence. Mais célébrer l’Eucharistie n’est pas facile, et c’est une tâche qui vous incombe, futurs prêtres. Ensuite, l’Eucharistie – ce n’est pas beau, mais je dois le dire – est souvent célébrée trop « socialement » [comme habitude sociale], pas communautairement. Y a-t-il une messe pour ce père décédé ? Profitez de cet usage social pour évangéliser, pour bien dire les choses, pour célébrer avec beauté. Un évêque ici en Italie disait que certains de ses prêtres, à qui on demandait d’aller dire une messe pour un anniversaire dans les villages, n’y allaient pas si la demande n’arrivait pas en premier. Je n’invente rien. Cet évêque me l’a raconté. C’est exploiter l’Eucharistie. J’insiste là-dessus parce que c’est le centre de notre vie. Mais aujourd’hui, la célébration eucharistique est en crise. Il y a eu des progrès mais nous devons persister. On ne peut pas aller célébrer l’Eucharistie à la hâte, « toucher et s’en aller ». Non, votre cœur doit être présent, dans l’Eucharistie. Et c’est contagieux. Combien de fois les gens disent-ils : « Que ce prêtre célèbre bien ! » et il fait référence à l’onction[spirituelle], la vraie onction. Pensez à cela. Je me souviens, enfant, de l’Eucharistie et de la religieuse qui m’a préparé – c’était une brave femme, elle nous faisait chanter, elle nous enseignait la messe avec un chant qui est peut-être chanté : « Ô Saint autel gardé par les anges ». Elle nous apprenait le chant, puis nous expliquait telle ou telle chose… et nous étions curieux. C’est ainsi qu’elle m’a enseigné la messe, en me préparant à la première communion.
Je ne sais pas, j’ai peut-être été un peu long, mais ceci est une préoccupation pour moi : que la célébration eucharistique soit digne, pieuse, qu’elle implique aussi l’affect du peuple. Et aussi dans l’homélie. Puis, dans ma jeunesse, après ma conversion, à l’âge de dix-sept ou dix-huit ans, j’allais une ou deux fois par mois faire l’adoration perpétuelle chez les Sacramentains le soir. C’était l’époque où il n’y avait pas de vêpres, et les Sacramentains à Buenos Aires ont leur église dans un quartier central et élégant. Je me souviens – il était cinq heures et demie du matin – il y avait la messe, après l’adoration, et les gens venaient des fêtes directement à la messe, pour dormir tout le dimanche. Je me souviens que cela ne me plaisait pas…Je disais : « Mais ces gens ne viennent à la messe que pour satisfaire le précepte ». Et je n’aimais pas non plus beaucoup le luxe des femmes là-bas. Mais ces soirs d’adoration…. Une heure, puis 40 minutes de repos, puis une heure. C’était bon pour moi à l’époque où je me préparais à la décision finale. Oui… Je ne sais pas si j’ai répondu à la question sur l’Eucharistie.
© Traduction de Zenit, Océane Le Gall

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Océane Le Gall

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