L’enjeu de la communication et des médias en Afrique

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Message de Mgr Foley à l’Assemblée du SCEAM

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ROME, Vendredi 19 janvier 2007 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le message de Mgr John Foley, président du Conseil pontifical pour les Communications sociales à la XIVème Assemblée plénière du Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SECAM) qui se déroule à Dar Es-Salaam, en Tanzanie, du 15 au 22 janvier.

* * *

Eminences,
Excellences,
Honorables participants à la XIVème Assemblée plénière du SCEAM,

La tenue de l’Assemblée du SCEAM est certainement un moment particulier de grâces non seulement pour l’Eglise en Afrique, pour tous les Fils et Filles du continent et des îles, mais également pour l’Eglise et le monde.

Je viens par ce message saluer le courage et l’abnégation des pasteurs réunis à Dar-Es-Salaam autour du thème de l’Evangélisation et par là apporter tous les encouragements du Conseil Pontifical pour les communications sociales à vos travaux. Je ne peux pas être avec vous mais nous envoyons le père Janvier Yaméogo, premier official africain de notre dicastère. Qui dit évangélisation dit témoignage de la foi : priorité par excellence pour les Eglises chrétiennes de vivre un témoignage commun par l’ensemble des réseaux de la multimédialité (voir l’insistance répétée de Benoît XVI pour une entente interecclésiale et même interreligieuse au service de la paix, de l’humanité, de la communication). C’est ainsi que le message évangélique deviendra crédible : « ut mundus credat ». Une gestion commune des potentialités et des ressources s’avérera urgente.

Je ne doute pas que l’Assemblée plénière se préoccupe « des moyens de communication sociale, une question très importante, car il s’agit à la fois de moyens d’évangélisation et de moyens de diffusion d’une nouvelle culture qu’il faut évangéliser. » (EIA 52) « Le premier aréopage des temps modernes est le monde de la communication, qui donne une unité à l’humanité en faisant d’elle, comme on dit, un village global. Les médias ont pris une telle importance qu’ils sont, pour beaucoup de gens, le moyen principal d’information et de formation; ils guident et inspirent les comportements individuels, familiaux et sociaux » (EIA , 71 citant Nostra Aetate).

« Les médias, surtout dans leurs formes les plus modernes, ont un impact qui dépasse toutes les frontières; une coordination plus étroite est nécessaire afin de permettre une collaboration plus efficace à tous les niveaux: diocésain, national, continental et universel. En Afrique, l’Eglise ressent un très grand besoin de solidarité de la part des Eglises-sœurs des pays plus riches et plus avancés du point de vue technologique. En Afrique même, des programmes de collaboration continentale déjà mis en œuvre, comme le « Comité épiscopal panafricain de Communications sociales », devraient être encouragés et redynamisés. Et comme le Synode l’a suggéré, il faudrait établir une plus grande collaboration dans d’autres secteurs, comme la formation professionnelle, les moyens de production de la radio et de la télévision et les stations émettrices à portée continentale » (EIA 126). Un lien opératif spécifique entre le CEPACS et la présidence du SCEAM permettra de répondre en temps réel et sans délai au sein du tourbillon informatif et communicatif dans lequel nous sommes plongés : tout retard informatif projettera une teinte négative à ce qui sera transmis : le SCEAM devra informer ‘mieux’, ‘avant’… L’Eglise d’Afrique peut se plaindre qu’elle ne compte pas pour le reste du monde : raison de plus pour peaufiner son ‘image’ et la rendre incisive et attrayante, sans crainte ni faux-fuyants, respectant les critères humains de la communication et sans vouloir ‘posséder’ celle-ci au nom de l’Eglise.

Au cours de ces jours de travaux, notre dicastère sait que vous serez attentifs aux promesses et aux inconnues de la nouvelle communication pour les peuples d’Afrique. Aussi nous ne pouvons que souhaiter vivement la redynamisation du CEPACS « Comité épiscopal panafricain de Communications sociales ». Ce comité devrait aider à la promotion efficace d’« une solidarité pastorale organique dans tout le territoire africain et les îles adjacentes » (EIA, 131). « L’idée-force de l’Église Famille de Dieu » est sans cesse remise en cause dans la crise moderne des valeurs (environnement, justice et paix, dialogue social ) ; des défis s’imposent en terme de communication à l’Eglise en Afrique comme d’ailleurs partout dans le monde en termes d’enjeux ecclésiologiques et missiologiques : comment soutenir, favoriser et défendre les valeurs existantes de manière à refléter la culture africaine et en même temps « communiquez le Christ » (Redemptoris Missio 46 et 47) ?

Comment être la voix des sans voix si nous sommes absents du champ des communications sociales ? Il me semble que l’expression désormais usitée de fracture numérique ne rend pas suffisamment compte de la réalité qui ressemble fort à un écrasement des faibles et des pauvres par le jeu pervers du libéralisme jusqu’au niveau culturel le plus fondamental. Par la communication les organes ecclésiaux et chrétiens sont appelés à affronter l’alphabétisation, l’éducation à distance, le soutien aux plus démunis, le service à la justice et à la paix, devront faire partie des compétences reconnues du CEPACS. La tendance actuelle de la convergence multimédiale enracinée dans la globalisation des infrastructures est en effet lourde de conséquences politiques, économiques, culturelles ; notre foi est interpellée.

Aussi, nous manifestons notre disponibilité à collaborer et soutenir le CEPACS dans son projet de publier un directoire continental de communication qui prenne en compte les diverses priorités et aide surtout à organiser et à coordonner en réseau les nombreuses initiatives déjà existantes tant au niveau national que régional des conférences. Ce directoire ne sera pas un document spéculatif et générique mais un réel ‘plan pastoral’ basé sur une enquête pointue à tous les niveaux du continent, comme nous avions essayé de le faire à partir de « Aetatis Novae ». Au niveau national et diocésain, l’urgence pour les évêques de développer un plan pastoral pour les communications et de s’assurer de la dimension communication dans toutes les activités pastorales a été sans cesse rappelée. Il n’est plus possible que chaque évêque agisse de manière isolée. Mais que les évêques n’aient pas peur pour autant par rapport à la communication : il est urgent de coordonner stratégiquement les initiatives et les modalités communicatives.

Planifier les chantiers futurs de la communication implique la formation et l’éducation aux médias. A ce propos, sans compter les expériences déjà réalisées dans les contextes latino-américains (RIIAL) et italiens (CEI) qui pourraient être mis à disposition en lien avec Propaganda Fide, notamment l’agence ‘Fides’ ou ‘Zenit’, des centres de formation et de production bien expérimentés existent déjà qui prouvent s’il en était encore besoin que les technologies de l’information et de la communication offrent une possibilité insoupçonnée de valoriser à distance, promouvoir et partager les savoirs et les techniques en Afrique même comme dans les îles. UCAP-Afrique et Signis-Afrique aideront à un véritable professionnalisme.

L’usage créatif d’Internet par les diocèses, les Instituts religieux, organisations, institutions pour l’évangélisation, la catéchèse, et pour l’information est éloquent. Toutefois l’utilisation des moyens de communication alternatifs, particulièrement ceux qui émanent des cultures africaines, devrait être explorée, étudiée et encouragée pour enrichir davantage notre humanité. L’ensemble de l’héritage des traditions orales devrait être recueill
i, mémorisé, mis au service de tous. Dans quelques années, les derniers témoins auront disparu. Il est urgent que le CEPACS soit reconnu et qu’on lui donne le moyen d’être cette plaque tournante, comme dans d’autres continents au niveau de la communication multimédiale à distance.

Bien sûr se posent de multiples problèmes de pénurie financière soulevés par les agences de financement au niveau vertical, une coopération et une solidarité plus horizontale entre églises sœurs gagneraient à être encouragées, sur la base de liens plus personnels entre les responsables des Eglises locales et régionales et au sein des communautés. De l’aide pour l’acquisition de matériel pourrait être développée en collaboration avec SIGNIS-service missionnaire et le CPCS, sans jamais oublier l’autofinancement, un objectif indiqué par Ecclesia in Africa. Il serait bon de penser à la possibilité d’instituer des fondations en vue de rendre opératives les priorités que le discernement des évêques indiquera.

Enfin, un dernier pari et non des moindres est lancé à l’Eglise d’Afrique en matière de communication en lien avec les secteurs prioritaires du développement que sont pour l’Eglise la gestion informatique commune et pour la communauté humaine la santé. Hier, elle a été pionnière dans ces domaines en liant Evangélisation et développement intégral de l’homme ; aujourd’hui, grâce à l’internet et aux connexions satellitaires, des possibilités de collaboration s’offrent avec des ONG et divers organismes d’hommes et de femmes de bonne volonté sur ces domaines, (Cf. Communication de A. Joos au SCEAM du 30 septembre-13 octobre 2003 à Dakar (http://www.webalice.it/joos.a/DAKAR.003.pdf) il faudrait également les explorer en dialogue : un dialogue ouvert et loyal au sein de l’Eglise et avec le monde pour la gloire de Dieu et le salut de l’humanité.

Dans le contexte actuel d’immenses défis, combien il me paraît opportun de rappeler la conclusive espérance portée et proclamée par le synode spécial pour l’Afrique. « Le Christ est vivant, l’Afrique vivra ». En suivant le « Christ communicateur par excellence » (EIA, 122) je souhaite que nous demeurions fidèles à l’Esprit Saint pour évangéliser les médias et par les médias depuis la communication orale jusqu’à la nouvelle communication multimédiale et que Marie, Notre Dame d’Afrique, nous accompagne.

+ John P. FOLEY
Président du Conseil pontifical pour les communications sociales
Cité du Vatican, le 10 janvier 2007

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ZENIT Staff

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