P. José Tolentino da Mendonça, Ariccia , 2018 capture @ Vatican Media

P. José Tolentino da Mendonça, Ariccia , 2018 capture @ Vatican Media

END : "Dieu accepte le risque de notre liberté"

Méditation de Mgr José Tolentino Calaça de Mendonça

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« Dieu accepte le risque de notre liberté, il accepte que nous prenions ce qu’il nous donne et que nous partions loin, il accepte que nous puissions commettre des erreurs, il accepte notre faiblesse », affirme Mgr José Tolentino Calaça de Mendonça, archiviste et bibliothécaire de la Sainte Église romaine, devant les Equipes Notre-Dame réunies à Fatima (Portugal) pour leur 12e rassemblement international.
Le poète portugais, qui a prêché la dernière retraite de carême pour la Curie romaine, donnait les méditations quotidiennes de ce rassemblement. Nous publions ci-dessous la quatrième, du 20 juillet 2018, sur le thème « Son père l’aperçut et fut touché de compassion ».
Mgr José Tolentino Calaça de Mendonça souligne que « la miséricorde n’est pas d’accorder à l’autre ce qu’il mérite… (c’est) d’offrir à l’autre précisément ce que l’autre ne mérite pas, mais donner par le haut, donner au-delà, aller plus loin ».
Et de prévenir les familles : « Si nous voulons être des gens modérés et neutres, si nous ne voulons qu’être justes, nous serons de bonnes personnes, mais nous ne connaîtrons pas l’Évangile de la Miséricorde. Parce que l’Évangile de la Miséricorde nous demande un excès d’amour : que nous soyons capables d’étreindre la vie blessée, capables de tout comprendre sans éprouver le besoin de dire de grandes choses. »
AK
Méditation de Mgr José Tolentino Calaça de Mendonça
Le texte de la parabole nous fait regarder ici la figure du père. Posons sur lui non seulement notre regard, mais aussi notre cœur, et nous découvrirons que ce père est la vraie représentation de la miséricorde. Il a deux enfants et se rend compte qu’il doit les traiter différemment, tout en regardant chacun d’eux d’une manière unique. Le plus jeune est venu réclamer son héritage. C’est une demande surprenante parce que l’héritage suppose la mort des parents, alors que celui-ci veut déjà le sien du vivant de son père. Et pourtant le père, sans rien dire, lui donne l’héritage. Le père accepte l’espace dont son enfant a besoin ; le père accueille le risque de la liberté de son fils, il l’aime tout simplement. Dieu accepte le risque de notre liberté, il accepte que nous prenions ce qu’il nous donne et que nous partions loin, il accepte que nous puissions commettre des erreurs, il accepte notre faiblesse.
Le plus jeune fils, même quand il revient, le fait toujours dans une logique égoïste et égocentrique. Il est parti vivre sa vie, et quand il revient, il ne pense qu’à sauver sa peau. C’est l’instinct de survie qui parle, pas l’amour. Le fils prodigue se dit : « Combien de journaliers de mon père ont du pain en abondance, et moi je suis ici à mourir de faim ! Je veux partir, retourner vers mon père et lui dire : […] traite-moi comme l’un de tes journaliers » (Lc 15,17-19). Et il ne comprend pas que c’est impossible. Car lorsque le père l’aperçoit au loin, il prend l’initiative de courir à sa rencontre. Et il considère comme plus décisif que le fait que le fils soit parti, c’est qu’il soit maintenant de retour ; plus important que la rupture, c’est donc le retour. Le fils est encore loin et le père part à sa rencontre. Saint Luc nous dit : « Comme il était encore loin, son père l’aperçu et fut touché de compassion ; il courut se jeter à son cou et l’embrassa longuement » (Lc 15, 20). C’est-à-dire qu’il a justifié cette vie sans beauté en la rendant complètement aimable. Aux yeux du père, ce fils n’était que le fils, mais il était son fils. Et, plein de compassion, il a été capable de l’embrasser longuement, de le réintroduire dans l’intimité familiale de la maison. Et cela d’une façon que le fils lui-même n’aurait jamais espéré. Nous pouvons dire : « Ce père est allé trop loin. Son amour est excessif. Il ne devrait pas traiter son fils comme ça. Il devrait le punir ou au moins le mettre à l’épreuve, le faire réfléchir. Et lui dire : “Maintenant, souffre et pense à ce que tu as fait” ». L’excès du Père, cet excès de miséricorde a pourtant un sens. En nous, il y a un conflit parmi plusieurs modèles et façons de réagir. Mais Dieu nous dit : « La miséricorde est l’art nécessaire au salut de la vie, la miséricorde est un chemin que nous devons tous apprendre ». Et il n’y a pas de miséricorde sans excès. Je crois fermement que c’est là une des leçons fondamentales de la parabole.
Nous nous demandons souvent ce qu’est la miséricorde. Et la miséricorde n’entre pas dans une définition. Elle doit s’incarner pour que nous puissions la toucher. La miséricorde est compassion, la miséricorde est bonté, la miséricorde est pardon, la miséricorde est de se mettre à la place de l’autre, la miséricorde est de porter l’autre sur ses épaules, la miséricorde est la réconciliation profonde. Elle est tout cela. Mais elle l’est également selon un certain style, qui est le style du père de la parabole de Jésus. Il n’y a pas de miséricorde sans don, sans donation. Ce fils prodigue portait beaucoup de blessures, évidentes et cachées, et il avait besoin d’être guéri à l’aide du baume de la miséricorde.
La miséricorde n’est pas d’accorder à l’autre ce qu’il mérite. Dans un effet d’inversion éthique, la miséricorde est, nous pouvons bien le dire, d’offrir à l’autre précisément ce que l’autre ne mérite pas, mais donner par le haut, donner au-delà, aller plus loin. Réintroduire le fils à la fête, le reconfirmer avec les symboles de la joie : l’anneau au doigt, les sandales aux pieds, la plus belle robe, le banquet du veau gras. C’est cet excès d’amour qui reflète la miséricorde. Nous nous mettons facilement dans la position de ceux qui jugent les autres : « Ah, tu as fait cela, tu as mérité ceci, tu as mérité cela ». Mais le père miséricordieux ne se
laisse pas prendre par le jugement. Il voit que le fils revient comme s’il revenait d’une guerre, tout brisé, maltraité et blessé. Or, s’il n’y a pas un excès d’amour qui aide à guérir les blessures, qui donne un autre horizon, qui devienne un levier, il n’y a pas de solution. Le fils ne pourrait pas entrer dans la maison par ses propres moyens. Il avait besoin d’être porté par l’amour de son père. C’est cela la miséricorde. Il ne s’agit pas d’attendre que l’autre fasse le chemin : il s’agit d’anticiper et de le porter sur ses épaules tel que nous l’enseigne la parabole du bon berger (Lc 15,4-7), en acceptant ses blessures, ses vulnérabilités et en le réintroduisant dans l’espoir, synonyme de la fête.
En famille, nous faisons cette expérience en de nombreuses occasions. Si nous voulons être des gens modérés et neutres, si nous ne voulons qu’être justes, nous serons de bonnes personnes, mais nous ne connaîtrons pas l’Évangile de la Miséricorde. Parce que l’Évangile de la Miséricorde nous demande un excès d’amour : que nous soyons capables d’étreindre la vie blessée, capables de tout comprendre sans éprouver le besoin de dire de grandes choses. Le père n’est pas inconscient. Le père se rend compte que ce fils a tout dépensé de la pire manière qui soit ; le père sait tout. Et pourtant il embrasse tout et couvre tout de son amour. L’expérience de la miséricorde est l’une des choses les plus exigeantes et les plus fascinantes de la vie. Mais à la fin, ce fils qui était perdu est devenu un être transformé, modifié par l’amour. Prions aujourd’hui pour que notre famille devienne une école de miséricorde, où nous sentions que nous suivons les pas de Jésus

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Rédaction

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