Chine : Vers une réforme de la politique de l’enfant unique ?

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Une timide remise en cause

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ROME, Vendredi 1er octobre 2010 (ZENIT.org) – « Vers une réforme de la politique de l’enfant unique ? », Eglises d’Asie (EDA), l’agence des Missions étrangères de Paris, pose la question dans cette dépêche de ce 29 septembre 2010.

Le 25 septembre dernier a marqué le trentième anniversaire de la mise en place de la politique de l’enfant unique. A l’origine présentée comme une mesure temporaire, ne devant pas excéder l’espace d’une génération, la réforme instaurée en 1980, qui a causé d’immenses souffrances et contribué à la chute de la fécondité dans le pays, se voit aujourd’hui timidement remise en cause.

Les raisons qui ont présidé à la mise en place de la réforme sont connues : Deng Xiaoping lançait le pays sur la voie des réformes économiques, les planificateurs mettaient en garde contre le risque de voir les efforts en termes d’accroissement de la richesse grignotés par une augmentation démographique excessive. Des experts étrangers furent consultés et préconisèrent la mise en place d’un système de retraite et de sécurité sociale pour inciter les couples à réduire leur fécondité. La haute direction chinoise trancha, estimant que la mise en place d’un tel système était trop coûteuse et sa réussite hasardeuse. En décrétant la politique de l’enfant unique, elle décida d’opter pour une politique volontariste et coercitive de maîtrise de la croissance de la population (1).

En trente ans, cette politique a eu des conséquences considérables (2). Selon des experts, 400 millions de naissances ont été « évitées », permettant ainsi à la richesse par habitant de la Chine populaire de croître considérablement. Parallèlement, les souffrances infligées aux couples ont été tout aussi considérables. Il a été dicté aux couples, non seulement le nombre de leurs enfants, mais aussi le moment où ils pouvaient engendrer : une grossesse survenant à un « mauvais » moment car hors quota devait être interrompue, la coercition étant employée en cas de refus d’avortement. Dans ce contexte, et en l’absence d’un système de retraite généralisé, les couples ont recouru à la sélection des sexes. 2005 a marqué la dernière année où des statistiques ont été publiées à ce propos et celles-ci indiquaient une moyenne de 119 garçons à la naissance pour 100 filles (là où le ratio naturel est de 105 garçons pour 100 filles). Aujourd’hui, ce sont plusieurs dizaines de millions de jeunes hommes qui ne trouvent pas à se marier, des millions de femmes manquant à l’appel. Enfin, les démographes annoncent un vieillissement accéléré de la population chinoise : les plus de 60 ans représentent 12,5 % de la population en 2009 et forment un groupe de 167 millions de personnes ; en 2050, ils devraient être 438 millions, à la charge d’une population en âge de travailler qui ne croît pas au même rythme.

Pour le trentième anniversaire de la politique de l’enfant unique, le Vice-Premier ministre Li Keqiang a déclaré que le gouvernement allait prendre des mesures pour combler l’écart que l’on constate entre les sexes et faire face aux problèmes induits par le vieillissement de la population. Il n’a toutefois pas donné de détails sur les mesures gouvernementales envisagées.

Au plan académique, cela fait déjà plusieurs années que les chercheurs chinois attirent l’attention sur les coûts tant économiques que sociaux de la politique de l’enfant unique. Relayés par des parlementaires (3), ils appellent à une refonte de la politique démographique. Selon He Yafu, un expert qui est en lien étroit avec les démographes du gouvernement, la haute direction chinoise pourrait bientôt autoriser la mise en place d’un projet-pilote dans cinq provinces du pays. Plus qu’une remise en cause de la politique, il s’agirait d’un assouplissement de celle-ci.

Dans le nord-est, les provinces du Heilongjiang, de Jilin et du Liaoning et, dans l’est, celles du Jiangsu et du Zhejiang pourraient autoriser à avoir deux enfants les couples dont l’un des membres est lui-même un enfant unique. Jusqu’à présent, seuls les couples dont les deux membres étaient eux-mêmes des enfants uniques étaient autorisés à avoir deux enfants. « Le choix des cinq provinces est arrêté et, peu à peu, la mesure devrait être étendue au reste du pays », a précisé He Yafu à l’AFP (4).

(1)           Aussi curieux que cela paraisse, la politique de l’enfant unique, durant vingt ans, a été assise non sur une législation nationale mais sur un ensemble de législations provinciales et locales. Ce n’est qu’en 2002 que le Comité permanent de l’Assemblée nationale populaire a voté une loi nationale sur le contrôle des naissances. Ce texte national visait à éliminer les variations et les abus, courants à l’échelon local, tels que les avortements tardifs ou forcés et les amendes arbitraires. Il introduisait deux innovations : l’interdiction d’utiliser l’échographie pour sélectionner les naissances et une réforme du financement du planning familial. Avant cette date de 2002, les administrations locales du planning familial étaient essentiellement financées par les amendes infligées aux couples contrevenants, amenant ainsi les fonctionnaires à faire preuve d’un « zèle » souvent excessif afin d’augmenter leurs revenus et ceux de leur administration. Depuis 2002, les gouvernements locaux doivent prévoir un budget et payer eux-mêmes les salaires des cadres chargés de faire appliquer la politique de l’enfant unique.

(2)           On pourra lire à ce sujet le ‘Pour approfondir – Chine’ publié avec la présente dépêche.

(3)           Voir EDA 468, 526

(4)           Agence France Presse, 23 septembre 2010.

© Les dépêches d’Eglises d’Asie peuvent être reproduites, intégralement comme partiellement, à la seule condition de citer la source.

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ZENIT Staff

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