Père Bruno Marie Duffé, capture vidéo KTO

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Afrique : "Le centre de tout, c'est la dignité de la personne", par le p. Bruno-Marie Duffé

Journée de réflexion organisée par le Dicastère pour le service du développement humain intégral

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« Le centre de tout, c’est la dignité de la personne, affirme le p. Bruno-Marie Duffé, secrétaire – numéro 2 – du Dicastère pour le service du développement humain intégral, dans une interview à L’Osservatore Romano du 22 juillet 2018. C’est autour d’elle que l’Afrique, terre depuis des siècles blessée par la violence et par l’exploitation irresponsable et criminelle des ressources naturelles et humaines, par la corruption, par les luttes de pouvoir, pourra construire un avenir. »
Le dicastère du Vatican a organisé une journée de réflexion dans le cadre de la XIXe Assemblée plénière de l’Association des Membres des Conférences épiscopales d’Afrique de l’Est (AMECEA) qui s’est déroulée du 13 au 23 juillet à Addis Abeba, en Éthiopie, sur le thème «Diversité vibrante, dignité égale, unité pacifique en Dieu à la région de l’AMECEA» (Vibrant Diversity, Equal Dignity, Peaceful Unity in God in the AMECEA Region).
« Le développement humain intégral, dans le contexte africain », souligne le secrétaire, apparaît « comme l’alternative aux dérives qui naissent des abus de pouvoir, de la corruption et de l’aveuglement dus à la seule recherche de pouvoir et de contrôle ». « Le Dicastère est au service de ceux qui agissent pour la solidarité et pour la paix », poursuit-il.
Le père Duffé affirme que « l’église représente une autorité morale déterminante dans les processus de paix » et qu’« elle peut aussi l’être en Afrique orientale ».
Il rappelle que la « mission de l’Église » est de « prendre soin des hommes, surtout de ceux qui sont rejetés, dans l’obéissance à l’Évangile et dans la pratique de la doctrine sociale ». « Dans la région de l’AMECEA, en particulier, note-t-il, l’Église, ses pasteurs, les religieux, les laïcs et les personnes de bonne volonté semblent vouloir affronter » les « défis avec l’optimisme et l’enthousiasme de la foi ».
Voici notre traduction de l’entretien avec le père Bruno-Marie Duffé publié en italien par le quotidien du Vatican.
MD
Comment s’insère le concept de développement humain intégral dans le concret de l’action de l’Église en Afrique ?
Bruno-Marie Duffé : Dans le contexte africain, la dignité est en même temps une mémoire de la communauté – qui s’exprime à travers les cultures, la vie commune, le sentiment religieux et la solidarité entre les membres de la famille élargie – mais aussi une espérance de pouvoir donner aux plus jeunes l’éducation et la possibilité d’assumer la responsabilité de l’avenir du groupe et de l’ethnie. Et la pastorale doit avoir une incidence sur ces deux niveaux, en se confrontant aux urgences les plus importantes. La réflexion sur la violence par exemple, qui a eu une place importante dans les travaux de l’Amecea, a mis en évidence le fait que tant que cette dimension essentielle de la dignité humaine n’est pas respectée, la voie aux conflits sociaux, politiques et inter-ethniques est ouverte. Le développement humain intégral, dans le contexte africain, apparaît alors comme l’alternative aux dérives qui naissent des abus de pouvoir, de la corruption et de l’aveuglement dus à la seule recherche de pouvoir et de contrôle. L’Église aussi doit se convertir à cette intégralité : éduquer au respect de toute la personne et de toutes les personnes sans discrimination.
Quelles ont été les réponses des évêques d’Afrique orientale ?
Ils portent sur les épaules les souffrances et les espérances des personnes, ils sont directement impliqués par les urgences que vivent les hommes et les femmes de leurs communautés : accès à l’eau potable, nourriture saine, éducation, santé, justice, droits et paix. Ils savent que l’action est si nécessaire et si vaste qu’elle peut épuiser celui qui s’y donne totalement. C’est pourquoi leur préoccupation est aussi de maintenir un bon équilibre entre l’action sociale et la dimension spirituelle de l’annonce de l’Évangile. Une seconde préoccupation pastorale est de pouvoir offrir aux plus pauvres soutien, ressources, éducation et espérance. Le fossé entre les riches et les pauvres, en Afrique et partout dans le monde, augmente et cette inégalité alimente la violence, le radicalisme, le terrorisme et le désespoir. En troisième lieu, les pasteurs sont préoccupés pour les jeunes, liés à des moyens de communication sociale qui uniformisent leurs comportements et les poussent à un déracinement de leur histoire et de leur culture. Les évêques, en définitive, ont besoin d’être soutenus : il est essentiel que tous les agents de la solidarité puissent œuvrer et travailler ensemble pour contribuer au développement et à la croissance des droits. Et cela exige aussi de soigner le dialogue entre nous tous.
Quel peut être le rôle de l’Amecea dans la pacification de la zone ?
L’Église représente une autorité morale déterminante dans les processus de paix et elle peut aussi l’être en Afrique orientale. Les évêques sont conscients de cette mission même si, naturellement, ils craignent d’être instrumentalisés par ceux qui détiennent le pouvoir. La violence est très souvent comme un eu qui peut facilement être attisé quand on souffle sur les cendres. C’est là que s’insère le défi du dialogue entre toutes les communautés et les sensibilités religieuses et politiques. L’Amecea, entre autres, a des réunions périodiques régulières qui favorisent la fraternité entre les épiscopats et la possibilité de partager des méthodes et des moyens d’action. En effet, si l’Église apparaît divisée, elle perd en crédibilité. Si au contraire elle est unie et confiante, elle est évidemment plus forte.
Quel est l’impact des migrations sur le développement humain intégral ?
Les migrations sont un phénomène historique global. Le développement économique des continents riches est aussi le fruit de dynamiques migratoires. Aujourd’hui, des hommes et des femmes, en particulier des jeunes, se déplacent avant tout parce qu’ils cherchent des opportunités ; malheureusement très souvent ils fuient les violences et les guerres, les désastres naturels et les pauvretés extrêmes. Une solidarité internationale est nécessaire pour trouver des solutions communes et consolidées qui permettent de considérer les migrations comme une opportunité et non un drame. Faire en sorte que tous puissent jouir du droit d’émigrer et du droit de ne pas devoir émigrer. En Afrique, où l’on regarde l’Europe unie comme un modèle, les dernières tendances politiques présentent de plus en plus le rêve d’un continent sans frontières. Cette volonté se voit aussi dans les Églises locales et chez leurs pasteurs qui aspirent au développement humain intégral. Ils y voient la future mission de l’Église : prendre soin des hommes, surtout de ceux qui sont rejetés, dans l’obéissance à l’Évangile et dans la pratique de la doctrine sociale. Dans la région de l’Amecea, en particulier, l’Église, ses pasteurs, les religieux, les laïcs et les personnes de bonne volonté semblent vouloir affronter ces défis avec l’optimisme et l’enthousiasme de la foi. Pour eux, les migrations peuvent devenir une opportunité pour le développement humain intégral. Ils sont surtout convaincus que l’Église peut encore faire beaucoup pour les personnes en déplacement : après le débat de ces jours-ci, ceux qui étaient déjà engagés dans cette pastorale se sont sentis confirmés, ceux qui hésitaient ont perçu l’importance de la mission de l’Église en sortie pour se mettre au service du développement humain intégral des migrants, des réfugiés et des personnes victimes de la traite.
Le Dicastère a déjà programmé des initiatives similaires avec d’autres conférences épiscopales ?
Pour le moment, il est prévu la participation à deux autres rencontres à Medellin, en Colombie, en août prochain, et en Pologne. Il y aura également un rendez-vous avec les évêques en Argentine. Et nous espérons vivement pouvoir continuer ces échanges qui apparaissent vitaux pour le Dicastère et pour une heureuse collaboration avec les Églises locales, les pasteurs et avec les associations, les mouvements et les partenaires de la mission. À cet égard, la participation active des laïcs de nombreuses associations catholiques, comme celle des réseaux d’organismes caritatifs à Addis Abeba, souligne le dynamisme de cette « mission en dialogue ». Le développement humain intégral a besoin de tous les charismes et de tous les talents. Et le Dicastère est au service de ceux qui agissent pour la solidarité et pour la paix. Les trois mots-clés qui ont donné son titre à l’assemblée de l’Amecea sont pour nous un encouragement et une impulsion pour se renouveler : « Vibrante diversité, égale dignité, unité pacifique en Dieu ».
© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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