Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus et de la Sainte Face @Carmel de Lisieux

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500 ans de la Réforme: Thérèse de l’Enfant Jésus anticipe "l’entente œcuménique", selon le card. Koch

L’«esprit œcuménique» de la commémoration (traduction complète)

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« S’efforçant de vivre en tout dans la grâce de Dieu », sainte Thérèse de l’Enfant Jésus (1873-1897) « a anticipé l’entente œcuménique entre l’Église catholique et les Églises nées de la Réforme », estime le cardinal Koch. Son « témoignage » montre que « le message crucial de la justification de l’homme par la foi, redécouvert durant la Réforme, ne divise pas les chrétiens, mais les unit. Et qu’elle n’ait jamais à nous diviser, même si ce fut le cas pendant des siècles ».
Le cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, a réfléchi sur le sens de la commémoration des 500 ans de la Réforme sur les pages de L’Osservatore Romano en italien du 21 février 2017 en précisant que cette commémoration sera imprégnée d’un « un esprit œcuménique » et que sainte Thérèse de l’Enfant Jésus a été parmi les précurseurs de l’œcuménisme. Un docteur de l’Eglise, rappelons-le.
« Nous trouvons, dans les paroles d’une sainte catholique de la fin du XIXe siècle, la doctrine de la justification à l’état pur, affirme le cardinal.  Thérèse, en effet, a annoncé non seulement le message pleinement chrétien du « par seule grâce », mais en a témoigné par sa vie-même. » Pour sainte Thérèse,  la sainteté est « plus une question d’attitude de fond nourrie par la foi, dans la vie de tous les jours », explique le cardinal : « C’est pourquoi elle a détaché son regard des bonnes actions et des œuvres pieuses, annonçant et louant plutôt, avec joie, la grâce de Dieu. »
« Les condamnations doctrinales du XVIe siècle, chez les catholiques comme chez les protestants, n’ont aujourd’hui pas plus de valeur entre les partenaires œcuméniques », poursuit le cardinal. « Une lecture » et « une interprétation commune des saintes Écritures »  ont «  conduit à une convergence de vue fondamentale dans la compréhension de la doctrine de la justification ».
« À nous maintenant, dans notre vie et dans notre cohabitation œcuménique, de tirer les justes conséquences de ce beau témoignage de consensus œcuménique sur la doctrine de la justification », souligne-t-il. La commémoration commune de la Réforme « aurait été impensable sans un consensus œcuménique sur la doctrine de la justification », conclut le cardinal Koch.
Voici notre traduction complète des réflexions du cardinal Koch, publiées en italien.
MD
La commémoration de la réforme et Thérèse de Lisieux, par le card. Koch
En 2017, le monde chrétien commémore les 500 ans de la Réforme. Comme il s’agit du premier centenaire de la Réforme de l’ère œcuménique, ce ne sont plus des tons  religieusement subversifs et polémiques mais un esprit œcuménique qui imprégnera cette commémoration. On doit ces circonstances favorables au fait notamment que nous ne commémorerons pas uniquement les 500 ans de la Réforme, mais aussi les 50 ans d’un intense dialogue entre catholiques et protestants, un laps de temps durant lequel nous avons pu découvrir tout ce qui nous est commun. Ces échanges œcuméniques ont eu pour résultat positif de montrer que, dans les vérités fondamentales de la foi chrétienne, il était possible de formuler un consensus œcuménique, tout en mettant en évidence que les différences théologiques encore aujourd’hui existantes ne mettent pas en discussion ce consensus. Par conséquent, les condamnations doctrinales du XVIème siècle, chez les catholiques comme chez les protestants, n’ont aujourd’hui pas plus de valeur entre les partenaires œcuméniques.
Cela est vrai surtout pour la «  Déclaration conjointe sur la doctrine de la justification », signée le 31 octobre 1999 à Augsbourg par la Fédération luthérienne mondiale et le Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens. Le fait qu’à propos justement de la question centrale qui amena, au XVIe siècle, à la Réforme puis à la division de l’Eglise, il fut possible d’obtenir un large accord peut être considéré comme une véritable première étape œcuménique. Le dialogue œcuménique des dernières décennies a montré que telle division ne pourra être surmontée et l’unité de l’Eglise rétablie qu’en prenant le chemin d’une lecture et d’une interprétation commune des saintes Ecritures. En effet, l’écoute commune de la Parole de Dieu témoignée dans les Ecritures a conduit à une convergence de vue fondamentale dans la compréhension de la doctrine de la justification.
Pour comprendre de manière plus approfondie la collaboration entre la grâce de Dieu et la liberté de l’homme dans le cadre du salut, il peut être utile de réfléchir à la comparaison utilisée par le théologien Bonaventure, au Moyen Age, pour illustrer la force de l’espérance eschatologique. Bonaventure compare le mouvement de l’espérance au vol d’un oiseau, qui vole au gré d’une petite brise et se laisse porter par elle. Mais pour voler, l’oiseau doit d’abord déployer ses ailes le plus possible et utiliser, pour les faire bouger, toutes ses énergies. Lui-même doit ensuite  se mettre en marche pour prendre son envol et monter à haute altitude. Vivre dans l’espérance signifie donc voler. Qui espère, en effet, doit s’efforcer, comme fait l’oiseau, de bouger et de faire bouger tous ses membres, pour contraster la force de gravité qui tire vers le bas, pour atteindre les vraies hauteurs et se laisser porter par l’air. En faisant cette comparaison, Bonaventure suggère que la grande espérance de la foi ne rend pas superflue l’action de l’homme, mais lui permet au contraire d’acquérir une forme correcte et sa liberté. Voler requiert toutes nos énergies ; mais cela n’est possible qu’en ayant totalement confiance en l’air qui nous entoure et nous porte. Comme l’oiseau peut voler parce qu’il se sait léger, le chrétien aussi saura mieux voler s’il ne donne pas trop de poids à lui-même et si, surtout, il ne se laisse pas écraser par la force de gravité des péchés.
Martin Luther utilise une image qui va dans le même sens pour clarifier le rapport entre la foi et les œuvres : «  L’évangile est comme une brise fraîche et délicate dans la grande chaleur estivale, il est un réconfort dans l’angoisse de la conscience. Mais dès que la brise de l’Evangile a rafraichi nos forces, a donné du réconfort, nous ne devons pas rester indolents, nous coucher et ronfler ; ou bien, quand l’Esprit de Dieu a rassasié notre conscience, l’a tranquillisée et consolée, nous devons montrer notre foi en accomplissant aussi les bonnes œuvres que Dieu nous a commandées et indiquées dans les dix commandements ». En effet, ceux qui, dans la foi, sont soulevés du tourment, de la préoccupation, de leur propre salut, peuvent et doivent prendre sur eux les préoccupations des hommes et du monde.
Si nous gardons à l’esprit ces similitudes, nous comprenons aussi pourquoi le théologien catholique Otto Hermann Pesch, expert de Luther, a dit que la dispute qui a éclaté au temps de la réforme sur la  foi et sur les œuvres était «  la plus superflue de toutes les questions controverses ». Le message crucial de la justification de l’homme par la foi, redécouvert durant la Réforme, ne divise pas les chrétiens, mais les unit. Et qu’elle n’ait jamais à nous diviser, même si ce fut le cas pendant des siècles. Le montre un témoignage de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus (1873-1897), qui remonte à l’époque précédant l’ouverture œcuménique de l’Église catholique durant le concile Vatican II, que le Catéchisme de l’Eglise catholique présente afin d’expliquer sa propre interprétation de la doctrine de la justification: «Après l’exil de la terre, j’espère aller jouir de vous dans la Patrie, mais je ne veux pas amasser de mérites pour le Ciel, je veux travailler pour votre seul Amour. Au soir de cette vie, je paraîtrai devant vous les mains vides, car je ne vous demande pas, Seigneur, de compter mes œuvres. Toutes nos justices ont des taches à vos yeux. Je veux donc me revêtir de votre propre Justice et recevoir de votre Amour la possession éternelle de Vous-même ». Ce n’est pas un hasard si sainte Thérèse a rejeté l’image traditionnelle de la sainteté, qu’elle voit le saint comme un héros de vertus, comme un «  sportif » capable de très hautes prestations religieuses. Pour elle, la sainteté chrétienne ne se réalise pas dans quelque chose de sensationnel et d’héroïque, mais se vit au quotidien sous le voile de la discrétion d’une foi non ostentatoire, de manière à ce que la soit le contenu essentiel de la sainteté. Thérèse est convaincue que la sainteté est moins une question d’exercices ou de prestations religieuses, mais plus une question d’attitude de fond nourrie par la foi, dans la vie de tous les jours. C’est pourquoi elle a détaché son regard des bonnes actions et des œuvres pieuses, annonçant et louant plutôt, avec joie, la grâce de Dieu. Elle savait en effet que, dans une vie de foi, en fin de compte, tout est grâce et que rien n’est si loin de l’existence chrétienne que la pieuse spéculation sur la récompense céleste pour les bonnes œuvres: « Nous devons faire tout ce que nous pouvons, par amour de Dieu, mais il est indispensable en vérité de reposer toute notre confiance en l’Unique qui sanctifie nos œuvres et qui peut nous sanctifier sans elles ».
Nous trouvons, dans les paroles d’une sainte catholique de la fin du XIXe siècle, la doctrine de la justification à l’état pur. Thérèse, en effet, a annoncé non seulement le message pleinement chrétien du « par seule grâce », mais en a témoigné par sa vie-même.  S’efforçant de vivre en tout dans la grâce de Dieu, elle a anticipé l’entente œcuménique entre l’Église catholique et les Églises nées de la Réforme.  Et cette anticipation a eu lieu sur le « petit chemin » qu’elle a pris, un chemin sur lequel la sola fide va jusqu’à se réconcilier avec la sola caritate, et en première ligne non pas avec l’amour humain, mais avec l’amour de Dieu pour nous les hommes.
Le fait que cette entente œcuménique d’une sainte se soit réalisée est un signe prometteur. Avec ça, on a dépassé aussi la traditionnelle opposition entre la piété catholique et la piété protestante, comme le montre ce qu’écrit le grand théologien protestant et martyr chrétien du régime nazi, Dietrich Bonhoeffer, parlant d’une conversation qu’il a eu un jour avec un pasteur français: « On se demandait simplement ce qu’au fond nous voulions réaliser dans notre vie.  Il a dit : je veux devenir un saint. Je fus très frappé sur le moment. Toutefois je n’étais pas d’accord, et j’ai plus ou moins dit: Je veux apprendre à croire ». Si Dietrich Bonhoeffer avait connu sainte Thérèse de Lisieux, il n’aurait probablement plus vu d’antagonisme entre le « devenir saint » et « apprendre à croire », comprenant que, pour cette sainte catholique, le pivot de la sainteté chrétienne est justement la foi. Sûrement, Thérèse et Dietrich Bonhoeffer se seront depuis mis d’accord sur la question, au ciel. A nous maintenant, dans notre vie et dans notre cohabitation œcuménique, de tirer les justes conséquences de ce beau témoignage de consensus œcuménique sur la doctrine de la justification, en considérant aussi les différentes perspectives spirituelles  qui se sont développées au sein des différentes traditions confessionnelles. Et nous devons le faire tout particulièrement en cette année 2017, année de la commémoration commune de la Réforme, commémoration qui aurait été impensable sans un consensus œcuménique sur la doctrine de la justification.
Traduction de Zenit, Océane Le Gall

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Océane Le Gall

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