« Aucune société n’est exempte de problèmes », affirme Ahmed, un jeune réfugié. « Ici, dans le camp, nous sommes unis par notre situation, mais quand un problème surgit, les gens se séparent et forment des groupes sur la base de leurs origines ».
« Les camps, ajoute le cheikh Ali, du camp de Dereig – un camp qui accueille actuellement plus de 20.000 personnes –, affrontent beaucoup de problèmes »: « des problèmes au sein des familles – généralement entre mari et femme –, des problèmes entre un cheikh et la population de son village, des disputes entre acheteurs et vendeurs ».
« Il existe parfois des malentendus entre les divers groupes de personnes. Si une organisation sert un secteur du camp et que l’autre secteur ne reçoit rien, cela peut dégénérer en conflit », ajoute quant à lui Ahmed de Mershing, où 50.000 personnes vivent dans les camps.
Malgré tout, grâce à l’assistance des deux partenaires d’ « Action by Churches Together « (ACT)/Caritas – le Conseil soudanais des Eglises et Sudanaid -, bon nombre de groupes, réunissant des cheikhs, des femmes et des jeunes, ont reçu les compétences et les connaissances nécessaires pour résoudre pacifiquement les conflits.
Il existe à ce jour plusieurs comités pour la résolution des conflits et la réconciliation dans cinq camps du Darfour sud: El Neem, Mershing, Dereig, Merir et Ta’asha.
« Résoudre un conflit, créer un climat de réconciliation en jouant les médiateurs, tel est notre rôle », explique Babi, un des membres de ces comités.
« Nous avons été formés à intervenir pour résoudre un problème entre les personnes ou entre les groupes; nous écoutons les deux parties, d’abord séparément, puis nous réunissons les deux parties devant le comité qui agit en intermédiaire et de façon neutre. Les deux parties ont ainsi la possibilité de s’exprimer et les médiateurs de pouvoir trouver une issue vers la paix », ajoute Salih un autre membre du comité.
Mais les conflits n’existent pas seulement à l’intérieur du camp. « Partageant les pompes à eau avec la communauté locale, nous rencontrons souvent des problèmes. On nous insulte et on nous reproche d’être source de problèmes. Il arrive souvent, quand nous partons couper du bois, que nous soyons menacés et attaqués par des hommes armés. Et tous les mois, des femmes sont attaquées ou se font tuées en allant ramasser du bois », poursuit Babi.
Résoudre les conflits avec ceux qui vivent en dehors des camps n’est pas facile, observent les membres des comités. « Nous n’avons pas autorité pour jouer le rôle de médiateur auprès de ceux qui sont en dehors de la communauté; ces derniers sont armés alors que nous, nous sommes des personnes ordinaires. Mais s’ils abandonnent leurs fusils, alors il y a une possibilité. Les êtres humains peuvent faire quelque chose ensemble ».
Le Sheikh Ali estime que « la situation au Darfour ne pourra se stabiliser tant que les milices n’auront pas déposer leurs armes. La réconciliation et le pardon dépendront ensuite de ce que l’on reconnaîtra ou non les fautes commises. Il faut dialoguer et impliquer tous les habitants du Darfour, en présence d’un parti neutre qui serait investi du rôle de médiateur ».
« Nous avons appris, tout au long de notre formation, que si les opinions étaient respectées, et que l’on respectait la justice, il y avait toutes les chances de faire de cette terre un lieu sûr ».
« Action by Churches Together » (ACT) et Caritas internationalis (CI) travaillent ensemble pour répondre conjointement à la crise du Darfour. L’ACT est une alliance mondiale d’églises et d’organisations connexes œuvrant pour sauver des vies et soutenir les communautés dans des situations d’urgence, dans le monde entier. La CI est une confédération de 162 organisations catholiques de secours, de développement et de service social présentes dans 200 pays et territoires.