« Damien n’est pas mort pour rien, parce qu’il n’a pas non plus vécu pour rien », explique Mgr Lacrampre, à l’occasion des obsèque du lietenant Damien Boiteux, pilote d’hélicoptère mort au Mali à bord de sa « Gazaelle » le 11 janvier. Il était marié et père d’un jeune de quinze ans.
L’évêque de Besançon précise: « Son nom (…) rejoint ces hommes, ces femmes qui ont un jour dit avec leur sang NON à la guerre – OUI à la Paix ».
Obsèques de Damien BOITEUX
En l’église du Russey – Haut Doubs Horloger
Homélie de Mgr André LACRAMPE, archevêque de BESANCON
Samedi 19 janvier 2013
1 Jn 4, 7-11
Mt 5, 13-16
Les textes de l’Ecriture que nous venons d’entendre nous conduisent à la méditation mais c’est du cœur que partent nos paroles.
Parmi les sentiments qui habitent notre cœur, il y a bien sûr une peine très vive et une immense émotion. Comment ne pas être profondément atteint par la disparition de Damien, votre enfant, votre frère, votre père, votre compagnon, votre camarade d’unité, un fils du Pays horloger qui nous est si cher.
Dans cette peine, se glissent d’autres sentiments. La tristesse n’arrive pas seule quand nous sommes en face d’un cercueil couvert du drapeau de notre pays.
La douleur n’étouffe pas la palpitation de la fierté et de l’honneur.
Damien n’est pas mort pour rien, parce qu’il n’a pas non plus vécu pour rien. Il a vécu pour un idéal, pour une mission, avec le sens du devoir. Il est mort pour cet idéal, pour sa mission, avec la conviction d’accomplir son devoir. Damien est mort pour la France, pour la paix à établir contre tous ceux qui la menacent et, dans son cas, contre les islamistes.
Il appartient à ce grand corps aux mille visages dont les membres sont capables de donner leur vie, qui prennent le rude chemin d’être sentinelles de la paix. Son nom s’ajoute aux longues listes de nos monuments aux morts, ceux des grandes villes comme ceux des plus petits villages de France ; il rejoint ces hommes, ces femmes qui ont un jour dit avec leur sang NON à la guerre – OUI à la Paix. Son sacrifice nous renvoie à nos propres combats pour la paix, à nos propres efforts pour toujours plus de liberté, à ces combats qui jalonnent l’histoire de l’humanité, l’histoire de notre pays, à ces combats qui construisent notre propre histoire personnelle et collective.
Au cœur de ces combats, dans la peine qui nous envahit en ce moment, nous ouvrons le livre de la Parole de Dieu. Le premier texte que la famille a choisi est un extrait de la longue méditation de l’évangéliste Jean sur l’amour.
Croire en Dieu implique non pas seulement d’aimer Dieu mais également d’aimer son prochain. Aimer son prochain c’est aussi vouloir la PAIX pour lui et avec lui. Pour cela, pour ne pas succomber à la haine sur le rude chemin de nos combats, nous avons besoin de nous soutenir mutuellement : c’est ce que nous faisons en cette circonstance.
Mais dans ce monde qui gémit des douleurs de l’enfantement, nous avons aussi à révéler le vrai visage de Dieu, non pas celui que certains voudraient instrumentaliser au service de toutes les barbaries, non pas un Dieu qui lutterait à nos côtés à la manière d’un régiment ou d’une division supplémentaire, mais un Dieu AMI du genre humain, qui engage nos énergies à lutter contre toutes les atteintes à la dignité de l’homme, contre tout ce qui dégrade la personne humaine, afin d’accéder à la liberté et au respect de la dignité de chacun, quelles que soient ses croyances.
Nous avons aussi entendu les paroles du Christ dans l’Evangile.
« Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde ». (Mtt 5, 13-16)
Quel sens peuvent bien prendre ces paroles pour nous aujourd’hui ?
C’est un appel qui est lancé :
⋅ Appel à donner de la saveur à la vie en menant le combat de la paix dans la fraternité ;
⋅ Appel à être cette lumière qui, dans le pessimisme ou la peur, fait briller l’espérance.
L’espérance au cœur de l’homme aux prises avec les duretés de la vie, c’est cet élan souterrain et puissant qui jaillit quand la mort nous tient. La foi et la prière voudraient la susciter en nous. Ce temps de recueillement et de prière voudrait nous en donner l’assurance : gardons-en la mémoire et tenons ferme la force de l’espérance chrétienne qui ne trompe pas.
Pour Damien, désormais, le combat de la vie terrestre est arrivé à son terme. Notre espérance est qu’il entre désormais dans la Vie éternelle qui ne connaît plus la mort, qu’il participe à la victoire du Christ, le premier ressuscité d’entre les morts.
Quant à nous, puissions-nous continuer à mener nos propres combats avec la conviction d’être nous aussi appelés par Dieu à partager sa Vie.
+ André LACRAMPE