ROME, Vendredi 18 novembre 2005 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le commentaire de l’évangile de ce dimanche, que proposait cette semaine le père Raniero Cantalamessa OFM Cap, prédicateur de la Maison pontificale, dans l’hebdomadaire catholique italien « Famiglia cristiana ».
XXXIVe Dimanche du temps ordinaire (Année A) – 20 novembre 2005
Jésus Christ Roi de l’univers
Evangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 25,31-46.
Il viendra tous nous juger
« Quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire, et tous les anges avec lui, alors il siégera sur son trône de gloire.
Toutes les nations seront rassemblées devant lui ; il séparera les hommes les uns des autres, comme le berger sépare les brebis des chèvres :
il placera les brebis à sa droite, et les chèvres à sa gauche.
Alors le Roi dira à ceux qui seront à sa droite : ‘Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la création du monde.
Car j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ;
j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi !’
Alors les justes lui répondront : ‘Seigneur, quand est-ce que nous t’avons vu…? tu avais donc faim, et nous t’avons nourri ? tu avais soif, et nous t’avons donné à boire ?
tu étais un étranger, et nous t’avons accueilli ? tu étais nu, et nous t’avons habillé ?
tu étais malade ou en prison… Quand sommes-nous venus jusqu’à toi ?’
Et le Roi leur répondra : ‘Amen, je vous le dis : chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait.’
Alors il dira à ceux qui seront à sa gauche : ‘Allez-vous-en loin de moi, maudits, dans le feu éternel préparé pour le démon et ses anges.
Car j’avais faim, et vous ne m’avez pas donné à manger ; j’avais soif, et vous ne m’avez pas donné à boire ;
j’étais un étranger, et vous ne m’avez pas accueilli ; j’étais nu, et vous ne m’avez pas habillé ; j’étais malade et en prison, et vous ne m’avez pas visité.’
Alors ils répondront, eux aussi : ‘Seigneur, quand est-ce que nous t’avons vu avoir faim et soif, être nu, étranger, malade ou en prison, sans nous mettre à ton service ?’
Il leur répondra : ‘Amen, je vous le dis : chaque fois que vous ne l’avez pas fait à l’un de ces petits, à moi non plus vous ne l’avez pas fait.’
Et ils s’en iront, ceux-ci au châtiment éternel, et les justes, à la vie éternelle. »
© AELF
Nous sommes arrivés au dernier dimanche de l’année liturgique, où nous célébrons la fête du Christ Roi. L’Evangile nous fait assister au dernier acte de l’histoire : le jugement dernier. Quelle différence entre cette scène et celle du Christ face à ses juges lors de sa Passion ! Ils étaient tous assis et lui debout, enchaîné ; à présent, ils sont tous debout et lui est assis sur le trône. En ce monde, les hommes et l’histoire jugent le Christ ; ce jour-là, le Christ jugera les hommes et l’histoire. Devant lui est décidé qui résiste et qui tombe. C’est la foi immuable de l’Eglise qui proclame dans son credo : « Il viendra de nouveau dans la gloire pour juger les vivants et les morts. Et son règne n’aura pas de fin ».
L’Evangile d’aujourd’hui nous dit également comment se déroulera le jugement : « j’avais faim, et vous ne m’avez pas donné à manger ; j’avais soif, et vous ne m’avez pas donné à boire ». Il y aura donc ceux qui, non seulement n’ont pas donné à manger à qui avait faim, mais leur ont ôté la nourriture ; ceux qui non seulement n’ont pas accueilli l’étranger, mais ont fait de lui un visiteur et un étranger ? Cela ne concerne pas seulement quelques criminels. Il peut s’instaurer un sens général d’impunité, où c’est à qui violera le plus la loi, corrompra ou se laissera le plus corrompre, sous prétexte que tout le monde le fait. Mais en attendant, la loi n’a jamais été abrogée. Et voilà qu’un beau jour quelqu’un ouvre une enquête et c’est une hécatombe, comme ce fut le cas en Italie avec l’opération « mains propres » [en réaction au scandale de corruption dans l’administration publique, dans les années 90, NdT].
Mais n’est-ce pas la situation dans laquelle nous vivons tous d’une certaine manière, enquêtés et enquêteurs, face à la loi de Dieu ? On viole allègrement les commandements de Dieu, l’un après l’autre, y compris celui qui dit de ne pas tuer (sans parler de celui qui dit de ne pas commettre d’adultère), sous prétexte que de toute façon tout le monde le fait, que la culture, le progrès, et même la loi des hommes, le permettent désormais. Mais Dieu n’a jamais eu l’intention d’abroger ni les commandements ni l’Evangile, et ce sentiment général de sécurité n’est qu’une illusion fatale.
Il y a quelques années on a restauré la fresque du jugement dernier de Michel-Ange. Mais il y a un autre jugement dernier à restaurer, un jugement qui n’est pas peint sur des murs de pierre, mais dans le cœur des chrétiens. Celui-là aussi a perdu ses couleurs et tombe en ruine.
« L’au-delà, et donc le jugement, est devenu une plaisanterie, une exigence tellement incertaine que l’on se divertit même à la pensée qu’à une époque cette idée transformait la vie humaine tout entière » (Sören Kierkegaard). On peut tenter de se réconforter en disant que de toute façon, le jour du jugement est bien loin, peut-être à des millions d’années. C’est encore Jésus, à travers l’Evangile, qui répond : « Insensé, cette nuit même, on va te redemander ton âme » (Lc 12, 20).
Dans la liturgie d’aujourd’hui, le thème du jugement est intimement lié à celui de Jésus bon pasteur. Dans l’antienne du psaume on dit : « Le Seigneur est mon berger ; je ne manque de rien ; sur des prés d’herbe fraîche il me fait reposer » (Ps 22, 1-2). Le sens est clair : maintenant le Christ se révèle à nous comme bon pasteur ; un jour il sera contraint à être notre juge. Maintenant c’est le temps de la miséricorde, un jour ce sera celui de la justice. C’est à nous de choisir, alors qu’il en est encore temps.
[Texte original en italien publié dans « Famiglia cristiana » – Traduction réalisée par Zenit]