Sanctuaire Notre-Dame de Sheshan, Shanghai (Chine Populaire), Wikimedia Commons

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Chine: "Respect des consciences" et "miséricorde pour tous" demande le Saint-Siège

L’enregistrement du clergé? Loyalement et sans intimidations…

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Face à une situation chinoise « très complexe » le Saint-Siège publie des « lignes pastorales à propos de l’enregistrement civil du clergé en Chine », en trois langues: italien, anglais et chinois, ce vendredi 28 juin 2019, en la « solennité du Coeur Sacré de Jésus ».
Il demande le respect de « la conscience » et des « profondes convictions catholiques ». Il souligne que le dialogue se poursuit avec les autorités de façon à « trouver une formule qui, dans l’acte d’enregistrement, respecte non seulement les lois chinoises, mais aussi la doctrine catholique ».
D’ici-là, il invite  les pasteurs à manifester clairement leur loyauté, et les laïcs à « ne pas juger » la décision des pasteurs quelle qu’elle soit. Il demande que les membres de l’Eglise « non officielle » ne soient pas soumis à des intimidations. Il appelle chacun au « discernement », à la « patience » et à l’humilité », dans un esprit « de foi et d’unité ».
Les respect des consciences
Le Saint-Siège répond ainsi aux « questions des évêques de Chine continentale » concernant « une indication concrète sur l’attitude à adopter avant l’obligation de présenter demande d’enregistrement civil », explique le document.
Le Saint-Siège indique d’une part qu’il ne veut « forcer la conscience de personne ».  Et d’autre part que « l’expérience de la clandestinité ne fait pas partie de la normalité de la vie de l’Église », qu’on y a recours que lorsqu’il s’agit de « garder sa foi intègre » (cf. Lettre de Benoît XVI, 2007).
Le Saint-Siège demande « que l’enregistrement civil du clergé ait lieu avec la garantie de respecter la conscience et les profondes convictions catholiques des personnes impliquées », de façon à promouvoir « l’unité de l’Eglise » et « la contribution des catholiques au bien de la société chinoise ».
Quatre faits importants, pour une attitude nouvelle
Pour ce qui est de l’enregistrement, le document rappelle quatre faits importants. Tout d’abord, la Constitution de la République populaire de Chine « déclare officiellement protéger la liberté de religion (article 36) ».
Ensuite, l’importance de la communion avec « Pierre » selon « l’Accord provisoire du 22 septembre 2018, reconnaissant le rôle particulier du Successeur de Pierre », ce qui « amène logiquement le Saint-Siège à comprendre et à interpréter « l’indépendance » de l’Église catholique en Chine, non pas au sens « absolu », c’est-à-dire comme « une séparation d’avec Pape et de l’Eglise universelle », mais « relatif à la sphère politique », comme il advient « partout dans le monde dans les relations entre le Pape et une Eglise particulière ou entre des Eglises particulières ».
Mais cette communion avec Pierre ne veut pas dire former un « corps étranger » dans une société donnée: « Affirmer que dans l’identité catholique il ne peut pas y avoir séparation d’avec le Successeur de Pierre, ne signifie pas vouloir faire une d’Eglise particulière un corps étranger à la société et à la culture du pays dans lequel elle vit et travaille ».
Troisième point: les relations entre le Saint-Siège et la Chine ont évolué en quelque 70 ans. Elle sont actuellement « caractérisées par un dialogue renforcé, différent de celui qui a vu naître les organismes patriotiques, dans les années cinquante du siècle passé ».
Quatrième point: la communion avec Pierre et avec les évêques du monde entier. « Au fil des ans, fait observer le document, de nombreux évêques ordonnés sans mandat apostolique ont demandé et obtenu la réconciliation avec le Successeur de Pierre, de sorte que tous les évêques chinois sont aujourd’hui en communion avec le Siège apostolique et ils souhaitent une intégration toujours plus grande avec les évêques catholiques du monde entier ».
Ces changements impliquent une « nouvelle attitude de tout le monde »: « Face à ces faits, il est légitime d’attendre une nouvelle attitude de tout le monde y compris dans la façon de traiter des questions pratiques concernant la vie de l’Église. Pour sa part, le Saint-Siège poursuit le dialogue avec les autorités chinoises sur l’enregistrement civil des évêques et des prêtres, de façon à trouver une formule qui, dans l’acte d’enregistrement, respecte non seulement les lois chinoises, mais aussi la doctrine catholique. »
Manifester clairement sa loyauté 
En attendant, que faire? Le document répond de façon concrète et prudente sur la façon de rester loyal: « Si un évêque ou un prêtre décide de s’enregistrer civilement mais que le texte de la déclaration d’enregistrement ne semble pas respecter la foi catholique, il précisera par écrit lors de la signature qu’il le fait sans perdre sa loyauté envers les principes de la doctrine catholique. S’il n’est pas possible de mettre cette clarification par écrit, le demandeur le fera également de vive voix et si possible en présence d’un témoin. »
Une règle vaut pour tous, c’est le fait d’en parler ensuite avec son évêque: « En tout cas, il convient que le demandeur certifie ensuite auprès de son propre Ordinaire l’intention avec laquelle il a fait l’enregistrement. »
Car l’enregistrement, précise le document, doit avoir « toujours pour seul but de favoriser le bien de la communauté diocésaine et sa croissance dans l’esprit d’unité, ainsi qu’une évangélisation adaptée aux nouveaux besoins de la société chinoise et une gestion responsable des biens de l’Eglise ».
Mais si quelqu’un pense devoir ne pas faire cet enregistrement? Le mot d’ordre reste la « communion ». Le Saint-Siège affirme son respect des consciences: « le Saint-Siège comprend et respecte le choix de ceux qui, en conscience, décident de ne pas pouvoir s’inscrire », et « reste proche d’eux et demande au Seigneur de les aider à garder la communion avec leurs frères dans la foi, même face aux épreuves que chacun doit affronter ».
Recommandations aux évêques et aux laïcs
Le Saint-Siège recommande la même attitude aux évêques vis-à-vis de leurs prêtres, en citant le Directoire pour le ministère pastoral des évêques: « que l’évêque, pour sa part « nourrisse et montre publiquement son estime pour les prêtres, en leur manifestant sa confiance et en les louant s’ils le méritent; qu’il respecte et fasse respecter leurs droits et les défende contre des critiques non fondées; qu’il désamorce promptement les controverses, pour éviter que des inquiétudes prolongées puissent ternir la charité fraternelle et porter préjudice au ministère pastoral » (Apostolorum Successores, 22 février 2004, n. 77).
Quant aux laïcs, ils doivent être aidés, recommande le Saint-Siège, à « comprendre la complexité de la situation », toujours dans le souci de garantir unité et communion en Eglise et qu’ils « accueillent avec un coeur grand la décision douloureuse prise par leurs pasteurs quelle qu’elle soit ».  Il insiste sur le fait que la « communauté locale » a le devoir d’accompagner les pasteurs « avec un esprit de foi, par la prière, et par l’affection, en s’abstenant de juger les choix des autres, en gardant le lien de l’unité et en usant de miséricorde envers tous ».
Non aux intimidations
Le Saint-Siège demande aussi, dans ce temps de dialogue en vue d’un enregistrement civil du clergé « plus respectueux de la doctrine catholique », que « les communautés catholiques ‘non officielles’  » ne soient pas soumises « comme il est hélas advenu » à des « pressions intimidatrices ».
Le document conclut sur le fait que ces  « indications pastorales » se veulent « un outil pour aider ceux qui se trouvent dans l’obligation de faire des choix difficiles, de les faire dans un esprit de foi et d’unité ».
Les derniers mots sont au discernement, à la patience et à l’humilité: « Tous – Saint-Siège, évêques, prêtres, religieux, fidèles laïcs – sont appelés à discerner la volonté de Dieu avec patience et humilité dans cette étape du chemin de l’Eglise en Chine, marquée de nombreuses espérances mais aussi par des difficultés persistantes. »

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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