« D’ici, aujourd’hui, peuvent partir de nouvelles voies d’avenir vers l’Europe et vers tant d’autres lieux du monde », affirme le pape François depuis Iasi, en Roumanie.
Le discours du pape aux jeunes et aux familles de Roumanie, à Iasi, à la frontière moldave, à quelque 400 km au nord-est de Bucarest, a été applaudi 20 fois: un enthousiasme unique typique des jeunes assemblées – quelque 100 000 personnes -.
Le pape François avait passé la matinée au sanctuaire marial de Sumuleu-Ciuc, ce samedi 1er juin 2019, au deuxième jour de son voyage apostolique dans cette terre appelée le « Jardin de Marie »: la rencontre s’est achevée par la prière du pape confiant chacun et tous et Marie.
La foule à exprimé son adhésion, spécialement son invitation à « marcher ensemble » de différentes générations, état de vie et ethnies. Et cette marche aura des conséquences positives au-delà des frontières, affirme le pape.
Le pape a invité les jeunes à « ouvrir des chemins pour marcher ensemble et réaliser ce rêve qui est une prophétie, ce rêve des grands parents: sans amour et sans Dieu, aucun homme ne peut vivre sur la terre ».
« Jeunes, a insisté le pape, vous êtes les Pèlerins du XXIe siècle, capables d’imaginer de manière nouvelle les liens qui nous unissent. »
Les paroles du pape, prononcées en italien, étaient sous-titrées en roumain sur grand écran et les phrases improvisées étaient traduites de façon consécutives par un interprète.
Le pape est ensuite reparti en avion pour Bucarest. Dimanche, à Blaj (Alba Iulia) il béatifiera 7 évêques martyrs pendant la persécution communiste et rencontrera les Roms, avant de rentrer à Rome.
AB
Chers frères et soeurs, bună seara! (Appl.)
Ici, avec vous, on sent la chaleur d’être en famille, entouré des petits et des grands. C’est facile, en vous voyant et en vous entendant, de se sentir chez soi. Le Pape parmi vous se sent chez lui. (Appl.)
Merci pour votre accueil chaleureux et pour les témoignages que vous nous avez donnés. Mgr Petru, comme un bon et fier père de famille, vous a tous pris dans ses bras avec ses paroles en vous présentant et tu l’as confirmé Eduard quand tu nous as dit que cette rencontre ne veut être ni seulement celle des jeunes, ni celle des adultes, ni celle des autres, mais que vous “avez désiré que nos parents et nos grands-parents soient avec nous ce soir”. (Appl.)
Aujourd’hui, c’est la journée des enfants sur ces terres, un applaudissement pour eux. (Appl.)
Je voudrais que la première chose que nous fassions soit de prier pour eux : demandons à la Vierge de les garder sous son manteau. Jésus les a placés au milieu de ses apôtres, nous voulons nous aussi les placer au milieu et réaffirmer notre engagement à les aimer du même amour avec lequel le Seigneur les aime, en nous engageant à leur donner le droit à un avenir. C’est un bel héritage: donner aux enfants un droit à un avenir. (Appl.)
Je suis heureux de savoir que sur cette place, il y a le visage de la famille de Dieu qui embrasse des enfants, des jeunes, des couples mariés, des personnes consacrées, des anciens, roumains de diverses régions et traditions, ainsi que de la Moldavie, et même ceux qui sont venus de l’autre bord de la rivière Prut, les fidèles de langue csango, polonaise et russe. (Appl.)
L’Esprit Saint nous convoque tous et nous aide à découvrir la beauté d’être ensemble, de pouvoir nous rencontrer pour marcher ensemble. Chacun dans sa propre langue et sa propre tradition, mais heureux de se retrouver entre frères. Avec cette joie que nous partageaient Elisabetta et Ioan, ces deux-là! avec leurs onze enfants, tous différents, arrivés de divers lieux, mais “aujourd’hui ils sont tous réunis, tout comme il y a quelque temps, chaque dimanche matin, ils prenaient tous ensemble la route vers l’église”. La joie des parents de voir leurs enfants réunis. Je suis sûr qu’aujourd’hui, on fait la fête dans le ciel, en voyant tant d’enfants qui ont décidé d’être ensemble. (Appl.)
C’est l’expérience d’une nouvelle Pentecôte, comme nous l’avons entendu dans la lecture. Où l’Esprit embrasse nos différences et nous donne la force d’ouvrir des chemins d’espérance en tirant le meilleur de chacun; le même chemin que les apôtres ont commencé, il y a deux mille ans, et dont il nous appartient de prendre le relais aujourd’hui et de nous décider à semer. Nous ne pouvons pas attendre que d’autres le fassent, cela nous appartient.
C’est difficile de marcher ensemble, n’est-ce pas ? C’est un don que nous devons demander, une oeuvre artisanale que nous sommes appelés à construire et un beau don à transmettre. Mais par où commençons-nous ?
Je voudrais à nouveau “voler” les paroles de ces grands-parents, Elisabetta et Ioan. C’est beau de voir quand l’amour prend racine avec dévouement et engagement, travail et prière. L’amour a pris racine en vous et a donné beaucoup de fruit. Comme l’a dit Joël, quand jeunes et anciens se rencontrent, les grands-parents n’ont pas peur de rêver (cf. Jl 3,1). Et cela a été votre rêve : “Nous rêvons qu’ils puissent se construire un avenir sans oublier d’où ils sont partis. Nous rêvons que tout notre peuple n’oublie pas ses racines”.
Vous regardez vers l’avenir et vous ouvrez l’avenir pour vos enfants, pour vos petits-enfants, pour votre peuple, en offrant le meilleur de ce que vous avez appris sur votre chemin : qu’ils n’oublient pas d’où ils sont partis. Où qu’ils aillent, quoiqu’ils fassent, qu’ils n’oublient pas les racines. C’est le même rêve, la même recommandation que saint Paul a faite à Timothée : maintenir vivante la foi de sa mère et de sa grand-mère (Cf. 2 Tm 1, 5-7).
Dans la mesure où tu grandis – dans tous les sens : fort, grand, et aussi en se faisant un nom – n’oublie pas la chose la plus belle et la plus précieuse que tu as apprise en famille. C’est la sagesse que l’on reçoit avec les années : quand tu grandis, n’oublie pas ta mère et ta grand-mère et cette foi simple mais solide qui les caractérisait et qui leur donnait force et constance pour aller de l’avant et ne pas baisser les bras. C’est une invitation à rendre grâce et à réhabiliter la générosité, le courage, le désintéressement d’une foi “faite maison”, qui passe inaperçue mais qui construit peu à peu le Royaume de Dieu.
Certes, la foi qui “n’est pas cotée en bourse”, n’a rien à vendre, et comme nous le rappelait Eduard, elle peut sembler “ne servir à rien”. Mais la foi est un don qui maintient vivante une assurance profonde et belle : notre appartenance d’enfants, et d’enfants aimés de Dieu. Dieu aime avec un amour de Père. Chaque vie, chacun de nous lui appartient. Et c’est une appartenance d’enfants, mais aussi de petits-enfants, d’époux, de grands-parents, d’amis, de voisins; une appartenance de frères. Le malin divise, disperse, sépare et crée la discorde, il sème la méfiance. Il veut que nous vivions “détachés” des autres et de nous-mêmes. L’Esprit, au contraire, nous rappelle que nous ne sommes pas des êtres anonymes, abstraits, des êtres sans visage, sans histoire, sans identité. Nous ne sommes pas des êtres vides ni superficiels. Il existe un réseau spirituel très puissant qui nous unit, nous “connecte” et nous soutient et qui est plus puissant que tout autre type de connexion. Ce sont les racines: savoir que nous nous appartenons les uns aux autres, que la vie de chacun est amarrée à la vie des autres. “Les jeunes s’épanouissent quand ils sont vraiment aimés”, disait Eduard. Tous, nous nous épanouissons quand nous nous sentons aimés. Parce que l’amour prend racine et nous invite à les porter dans la vie des autres. Comme ces belles paroles de votre poète national qui souhaitait à sa douce Roumanie que “tes enfants vivent seulement dans la fraternité, comme les étoiles de la nuit” (M. EMINESCU, “Ce que je te souhaite, douce Roumanie”). (Appl.) Eminescu était un grand. Eminescu était mûr, il se sentait fraternel aimait voulait qu’en Roumanie les Roumains soient des frères comme les étoiles du ciel. (Appl.) Nous appartenons les uns aux autres et le bonheur personnel passe par le fait de rendre les autres heureux. Tout le reste, ce sont des fables. (Appl.)
Pour marcher ensemble là où tu es, n’oublie pas ce que tu as appris en famille, n’oublie pas tes racines.
Cela m’a rappelé la prophétie d’un saint ermite de ces terres. Un jour, le moine Galaction Ilie du Monastère Sihastria, marchant avec les moutons sur la montagne, rencontra un saint ermite qu’il connaissait et lui demanda: “Dis-moi, père, quand sera la fin du monde ?” Et le vénérable ermite, soupirant du fond du coeur, dit : “Père Galaction, sais-tu quand sera la fin du monde ? Quand il n’y aura plus de sentiers de voisin à voisin ! (Appl.) C’est-à-dire, quand il n’y aura plus d’amour chrétien et de compréhension entre frères, parents, chrétiens et entre peuples ! Quand les personnes n’aimeront plus, ce sera vraiment la fin du monde. Parce que sans amour et sans Dieu, aucun homme ne peut vivre sur la terre ! (Appl.)
La vie commencera à s’éteindre et à flétrir, notre coeur cessera de battre et se dessèchera, les anciens ne rêveront plus et les jeunes ne prophétiseront plus, quand il n’y aura plus de sentiers de voisin à voisin… Parce que sans amour et sans Dieu, aucun homme ne peut vivre sur la terre.
Eduard nous a dit que lui, comme tant d’autres dans son pays, essaie de vivre la foi au milieu de nombreuses provocations. Il y a vraiment beaucoup de provocations qui peuvent nous décourager et nous fermer en nous-mêmes. Nous ne pouvons pas le nier, nous ne pouvons pas faire comme si de rien n’était. Les difficultés existent et elles sont évidentes. Mais cela ne peut pas nous faire perdre de vue que la foi nous donne la plus grande des provocations : celle qui, loin de t’enfermer ou de t’isoler, fait germer le meilleur de chacun. Le Seigneur est le premier à nous provoquer et à nous dire que le pire vient “quand il n’y aura plus de sentiers de voisin à voisin”, quand nous voyons plus de tranchées que de chemins. Le Seigneur est celui qui nous offre un chant plus fort que celui de toutes les sirènes qui veulent paralyser notre marche. Et il le fait de la même manière : en entonnant un chant plus beau et plus attirant.
Le Seigneur nous donne à tous une vocation qui est une provocation pour nous faire découvrir les talents et les capacités que nous possédons et pour que nous les mettions au service des autres. Il nous demande d’user de notre liberté comme liberté de choix, de dire “oui” à un projet d’amour, à un visage, à un regard. C’est une liberté bien plus grande que de pouvoir consommer et acheter des choses. Une vocation qui nous met en mouvement, qui nous fait supprimer des tranchées et ouvrir des chemins qui nous rappellent notre appartenance d’enfants et de frères.
Dans cette capitale historique et culturelle du pays, on partait ensemble – au Moyen-Âge – comme pèlerins par la Via Transilvana, pour Saint-Jacques-de-Compostelle. Aujourd’hui, vivent ici de nombreux étudiants de diverses parties du monde. Je me souviens d’une rencontre virtuelle que nous avons eue, en mars, avec Scholas Occurentes, dans laquelle on me disait aussi que cette ville, durant cette année, est la capitale nationale de la jeunesse. (Appl.) C’est vrai? C’est vrai que cette ville cette année est la capitale nationale de la jeunesse (ovations)!
Deux très bons éléments, faites attention : c’est une ville qui historiquement sait ouvrir et initier des processus; une ville qui sait accueillir des jeunes provenant de diverses parties du monde comme actuellement. Deux caractéristiques qui rappellent les potentialités et la grande mission que vous pouvez développer : ouvrir des chemins pour marcher ensemble et réaliser ce rêve qui est une prophétie, ce rêve des grands parents: sans amour et sans Dieu, aucun homme ne peut vivre sur la terre. D’ici, aujourd’hui, peuvent partir de nouvelles voies d’avenir vers l’Europe et vers tant d’autres lieux du monde. Jeunes, vous êtes les Pèlerins du XXIe siècle, capables d’imaginer de manière nouvelle les liens qui nous unissent.
Mais il ne s’agit pas de créer de grands programmes ni de grands projets, mais de laisser grandir la foi: les racines apportent la sève. Comme je vous le disais au début: la foi ne se transmet pas seulement avec les paroles, mais par des gestes, des regards, des caresses comme celles de nos mères, de nos grands-mères; avec la saveur des choses que nous avons apprises à la maison, de manière simple et authentique. Là où il y a beaucoup de bruit, que nous sachions écouter; là où il y a de la confusion, que nous inspirions de l’harmonie; là où tout se revêt d’ambiguïté, que nous puissions mettre de la clarté; là où il y a de l’exclusion, que nous apportions du partage; au milieu du sensationnalisme, des messages et des nouvelles rapides, que nous prenions soin de l’intégrité des autres; au milieu de l’agressivité, que nous donnions la priorité à la paix; au milieu du mensonge, que nous apportions la vérité; qu’en tout, en tout nous privilégions l’ouverture de chemins pour sentir cette appartenance d’enfants et de frères (cf. Message pour la 52ème Journée mondiale des Communications Sociales 2018).
Cette dernière chose que je viens de dire c’est la musique de saint François d’Assise. Savez-vous ce que saint François d’Assise conseillait à ses frères pour transmettre la foi? Il disait: « Allez, prêchez l’Evangile, et si c’est nécessaire, par des paroles ». (Appl.)
Cet applaudissement pour saint François d’Assise! (Appl.)
Je termine il reste un paragraphe et je voudrais cous raconter expérience alors que j’arrivais sur cette place. Il y avait une vieille femme, assez âgée, une grand -mère: dans ses bras, elle tenait son petit-fils de deux mois, pas plus. Quand je suis passé, elle me l’a fait voir, elle souriait, avec un sourire de complicité, comme pour dire: regarde, aujourd’hui je peux rêver! (Appl.)
Et je me suis ému sur le moment, de voir le courage de venir jusqu’ici les grands parents rêvent quand les petits enfants prennent d’eux leurs racines. (Appl.)
La Roumanie est le “Jardin de la Mère de Dieu” et dans cette rencontre, j’ai pu m’en rendre compte, parce qu’elle est une Mère qui cultive les rêves de ses enfants, qui en garde les espérances, qui apporte la joie dans la maison. C’est une Mère tendre et concrète qui prend soin de nous. Vous êtes la communauté vivante et florissante, pleine d’espérance que nous pouvons offrir à notre Mère. (Appl.)
A elle, à la Mère, nous consacrons l’avenir des jeunes, l’avenir des familles et de l’Église. Mulțumesc! [Merci!] [Texte original: Italien] (c) Librairie éditrice du Vatican pour le texte prévu,
et Zenit pour les passage improvisés (en italiques)