Le P. Alessandro Amprino vit en Turquie depuis 2017. Actuellement vicaire judiciaire et chancelier du diocèse d’Izmir, sur la côte ouest du pays, il a participé à plusieurs événements lors de la récente visite apostolique du pape Léon XIV. Quelques jours seulement après ce voyage, il livre ses réactions.
Zenit : Comment avez-vous vécu la visite du pape Léon XIV et à quels événements avez-vous pu participer ?
Alessandro Amprino : La visite du pape en Turquie a été pour moi un moment de grande joie, au cours duquel j’ai pu faire l’expérience de la communion ecclésiale avec tous ceux qui font partie de l’Église de Turquie. J’ai participé à la rencontre de prière dans la cathédrale du Saint-Esprit à Istanbul avec les prêtres, les religieux et les agents pastoraux.
J’ai voulu vivre cette visite non pas comme une rencontre avec une personne célèbre, mais pour ce qu’elle est vraiment : la visite du successeur de Pierre. Avec l’espoir et la conviction que ce moment pourrait nous faire vivre aussi les prodiges dont nous parlent les Actes des Apôtres : lorsque Pierre entrait dans une maison ou rencontrait quelqu’un, il apportait la vie, la guérison du corps et de l’esprit, il confirmait dans la foi, il changeait la vie des personnes qu’il rencontrait. Et cela, uniquement par la force de l’Évangile et du nom de Jésus.
Zenit : Quels ont été les moments forts, et en quoi cette visite a pu renforcer les « ponts » avec les autres confessions chrétiennes en Turquie ?

Rencontre du pape avec l’Église catholique de Turquie © Osservatore Romano
A. Amprino : Personnellement, je pense qu’il y a eu deux moments importants : le premier est certainement la rencontre œcuménique à Nicée, où nous avons vu les représentants les plus importants des différentes confessions chrétiennes réunis dans un lieu si important pour notre foi. Le second est la messe célébrée à Istanbul. Toute l’Église de Turquie était vraiment présente ou représentée. Une communauté petite et fragile, mais vivante et désireuse de trouver dans l’Eucharistie et la communion ecclésiale la joie et l’espoir d’avancer vers l’avenir.
La visite du pape a constitué une nouvelle étape sur le chemin vers l’unité que nous, chrétiens, parcourons depuis de nombreuses années – et qui était également l’un des principaux objectifs du Concile Vatican II. Je pense que les événements de ces derniers jours ont été un témoignage crédible de la volonté commune de poursuivre ce chemin. L’histoire nous dira quels fruits concrets ces journées porteront. Mais je suis convaincu qu’il y en aura.
Zenit : Plus généralement, comment le message de paix et d’unité du pape Léon XIV pourra-t-il porter ses fruits en Turquie et au-delà ?
A. Amprino : Les gestes et les paroles du pape Léon XIV ont été très beaux et très importants. Mais il faut être réaliste : à eux seuls, ils ne suffisent pas à changer les choses. Il faut qu’ils continuent à parler à l’esprit et au cœur de chaque personne. Ils doivent rester un appel constant à la conversion, pour faire des choix concrets qui mènent à la paix et à la réconciliation.
Le pape Léon a tracé une voie très claire. Par exemple, il a rappelé que la justice et la miséricorde défient la loi de la force, et osent demander que la compassion et la solidarité soient considérées comme des critères de développement.
Il a aussi rappelé qu’aujourd’hui plus que jamais nous avons besoin de personnalités qui favorisent le dialogue et le pratiquent avec une volonté ferme et une ténacité patiente. Nous devons tous suivre cette voie ! Et chaque personne, du dirigeant le plus puissant à la personne la plus humble, peut et doit faire sa part ! Comme l’a dit le pape : l’avenir de l’humanité en dépend.
Zenit : Enfin, quels défis restent à relever pour l’Église catholique en Turquie ?
A. Amprino : Ce sont ceux que le pape Léon XIV a très bien mis en évidence dans ses discours : écouter et accompagner les jeunes, le dialogue œcuménique et interreligieux, le service pastoral aux réfugiés et aux migrants, la transmission de la foi à la population locale. J’en suis convaincu : si nous ne croyons pas que l’Évangile puisse parler à la culture turque, alors nous ne croyons pas pleinement à l’Évangile. Si nous ne voulons pas accueillir les turcs qui demandent à rencontrer et à connaître Jésus, alors nous n’avons pas pleinement accueilli Jésus.

« Cette logique de la petitesse est la véritable force de l’Église ! » © Osservatore Romano
C’est pourquoi le pape nous a exhortés à vivre un engagement particulier en faveur de l’inculturation, afin que la langue, les usages et les coutumes de la Turquie deviennent de plus en plus les vôtres. La communication de l’Évangile passe en effet par cette inculturation. Bien sûr, tout cela n’est possible qu’en choisissant de vivre une vie fondée sur la foi et l’union avec Dieu et en adoptant le regard évangélique, éclairé par l’Esprit Saint.
Cela nous rappelle, entre autres, que notre petitesse n’est pas une condition à subir avec tristesse et nostalgie, mais un style à adopter, en reconnaissant que c’est le style choisi par Dieu lui-même pour venir parmi nous. Le pape nous a dit : « Cette logique de la petitesse est la véritable force de l’Église ! »
