« Que ta foi soit ta culture », thème de la rencontre des jeunes avec le pape François au Timor oriental © Vatican Media

« Que ta foi soit ta culture », thème de la rencontre des jeunes avec le pape François au Timor oriental © Vatican Media

Liberté, engagement et fraternité : des valeurs chères au peuple timorais

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Discours du pape François aux jeunes du Timor oriental

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Ce mercredi 11 septembre, le pape a été accueilli à l’entrée du Centro de Convenções de Dili par le président exécutif de la Commission nationale de la jeunesse catholique du Timor-Leste, le père Francisco Indra Tey Seran, et par quelques jeunes qui lui ont offert des fleurs et le foulard traditionnel, le tais. Le pape François a ensuite déposé des fleurs devant la statue de la Vierge.

Après le mot de bienvenue du président exécutif de la Commission nationale de la jeunesse catholique du Timor-Leste (CNJCTL), quatre jeunes apportent leur témoignage. Le Saint-Père a ensuite prononcé son discours.

À la fin de la rencontre, après la prière des fidèles, la bénédiction, le cadeau des jeunes au pape et le chant final, le Saint-Père a rejoint l’entrée principale où deux jeunes lui ont remis des colombes pour les relâcher en symbole de paix. Il s’est ensuite rendu à l’aéroport international du président Nicolau Lobato pour se rendre à Singapour.

Nous publions ci-dessous le discours intégral que le pape a prononcé lors de la rencontre avec les jeunes.

Chers jeunes, bonjour ! Dadeer di’ak!

Je vous remercie pour vos salutations, pour vos témoignages et pour les questions que vous m’avez posées. Je suis heureux de vous rencontrer et de partager ce moment de fête et de réflexion avec des jeunes dans un pays de jeunes !

Oui, parce que vous représentez la nette majorité de la population de cette terre et que, par votre présence, vous la remplissez de vie, d’espérance, d’avenir. Non seulement cela, mais grâce à l’enthousiasme de votre foi, vous en faites un véritable gymnase d’athlètes de l’Évangile, appelés, comme le dit saint Paul, à devenir des champions de l’amour (cf. 1 Co 9, 23-27).

Ceux qui, au prix d’immenses sacrifices, vous ont précédés pour jeter les bases de cette nation, vous ont transmis un grand chantier ouvert, dans lequel il reste encore beaucoup à faire, à différents niveaux : économique, politique, social. Il vous appartient maintenant de poursuivre l’œuvre, de construire ensemble, à la lumière de l’Évangile, une cité, une communauté civile, une société où règnent la justice, la coopération, l’honnêteté et l’unité.

C’est une entreprise passionnante, celle qui vous invite à « rêver de grandes choses, chercher de larges horizons […] accepter des propositions provocantes » (Exhort. ap. post-synodale Christus vivit, n. 15), comme nous l’a rappelé tout à l’heure le Père Francisco ; et dans cette entreprise se trouve aussi la réponse à la question de Nelson sur ce qu’est le message de l’Exhortation Christus vivit. Être vivant comme le Christ est vivant (cf. ibid., n. 1) : tel est le message, en donnant toujours le meilleur de vous-mêmes, sans calcul et sans peur, en visant haut, en voyant grand, selon le cœur de Dieu.

Ambiance de joie avec chants et danses pour accueillir le Saint-Père © Vatican Media

Ambiance de joie avec chants et danses pour accueillir le Saint-Père © Vatican Media

Vous avez derrière vous une histoire marquée par de grandes souffrances, mais aussi par de magnifiques exemples de foi, de martyre, et surtout de pardon et de réconciliation ; des exemples enracinés dans des valeurs qui vous sont chères, telles que la liberté, l’engagement et la fraternité, sur lesquelles je voudrais que nous nous arrêtions un instant et que nous réfléchissions : liberté, engagement et fraternité.

Premièrement, la liberté. Une expression typique de la langue tetum dit : « ukun rasik-an », “que chacun se gouverne soi-même”. Certains pourraient proposer à tort de lire ces mots comme une invitation à l’individualisme, au désengagement et à l’autoréférentialité, mais cela ne vous aidera pas dans la vie. Il vaut mieux le lire comme un rappel à être des protagonistes responsables et libres de votre avenir, et à veiller sur vos choix, pour les orienter toujours vers des objectifs de communion, de respect des personnes et de la création, de compassion, de coexistence pacifique et généreuse, surtout dans les périodes de tempête. Rogéria et Cecilia Efranio l’ont très justement souligné, en évoquant l’importance de protéger la maison commune et de cultiver l’unité familiale. Être libre ne signifie pas faire ce que l’on veut, sans se soucier des conséquences de ses actes pour les autres, ni renier les liens d’amour qui, en nourrissant nos cœurs dès les premiers instants de notre existence, nous unissent à nos proches. Être libre, c’est choisir, en toutes ces choses, le bien, le respect, l’amour, même quand cela coûte.

Deuxième valeur : l’engagement. Un proverbe oriental dit que “les temps difficiles créent des hommes forts”, et que “les hommes forts créent des temps faciles”, mais il ajoute ensuite que “les temps faciles créent des hommes faibles” et que “les hommes faibles créent des temps difficiles”. Un jeu de mots qui semble enfermer les gens dans une dynamique sans espérance, où l’on revient sans cesse détruire ce que l’on a construit. Je vous invite cependant à ne pas vous résigner à cette façon de penser, mais à réagir ! Ne vous laissez pas tromper par l’attrait de la vie confortable et sans engagement, ni par l’apparence de bonheur, en réalité vide et illusoire, que peuvent promettre le consumérisme et le matérialisme. Les temps difficiles vécus par votre peuple vous ont forgés, ont fait de vous des hommes et des femmes forts : demeurez ainsi, n’abandonnez pas et continuez à travailler avec engagement, à lutter avec sacrifice, non pas tant pour créer des “temps faciles”, mais plutôt pour améliorer le monde, afin qu’au Timor-Oriental et dans tout le pays, la paix, la justice et la prospérité pour tous puissent croître de plus en plus. Comme de bons athlètes, ne cessez pas de vous entraîner dans le bien, ne laissez pas les muscles de l’esprit s’affaiblir, gardez la forme : et gardez toujours devant vous un objectif clair : « pour recevoir une couronne – comme le dit saint Paul – une couronne […] qui ne se fane pas » (1 Co 9, 25).

Le Saint-Père se réjouit de la vitalité et de la foi de cette jeunesse © Vatican Media

Le Saint-Père se réjouit de la vitalité et de la foi de cette jeunesse © Vatican Media

Enfin, la troisième valeur : la fraternité. Saint Paul – un jeune homme comme vous, fort, décidé, impulsif – a commis beaucoup d’erreurs dans sa jeunesse : il a même persécuté les chrétiens (cf. Ph 3, 6), utilisant les dons qu’il avait non pas pour construire et unir, mais pour détruire et diviser. Jusqu’à ce qu’il rencontre Jésus sur le chemin de Damas, et depuis lors, tout a changé (cf. Ph 3, 7-11). Il a cessé de haïr et a commencé à aimer. D’ennemi, il est devenu frère, et le souvenir du sang dont il s’était souillé l’a poussé à devenir un annonciateur tenace de l’Évangile, un messager infatigable d’espérance, de communion, de charité.

C’est ainsi qu’il a commencé à transmettre à tous ce qu’il avait appris à son tour : à savoir que l’on ne devient pas champion en éliminant les autres, mais en courant avec eux – chacun comme un frère, “alin”, de l’autre – sans jamais se lasser et sans baisser la garde, en se passant le “témoin” les uns aux autres jusqu’à ce que le but soit atteint. Et ici, permettez-moi de vous adresser une invitation spéciale : ne vous laissez pas influencer par ceux qui vous proposent des modèles de comportements négatifs, destructeurs et violents, même s’ils exaltés par sont les réseaux sociaux, ou des réalités collectives apparemment fortes, mais en réalité mesquines, anti-éducatives et trompeuses. Jamais de violence : nous sommes tous frères ! Jamais de guerre entre frères ! Je le répète : jamais ! Rappelez-vous ce que Dieu dit à Caïn, dans la Bible, après le meurtre d’Abel : « Qu’as-tu fait ? La voix du sang de ton frère crie de la terre vers moi » (Gn 4, 10). Le Seigneur veut que nous soyons les gardiens les uns des autres (cf. Gn 4, 9), et non des ennemis, et la vie de chacun d’entre nous est un don sacré de Dieu. Souvenons-nous toujours que la vie de chacun d’entre nous est un don sacré de Dieu !

Au début, le Père Francisco a rappelé comment, depuis des années, vous perpétuez la belle tradition de la “Cruz dos Jovens”, la “croix des jeunes”, à l’occasion des Journées Nationales de la Jeunesse. Une communauté reçoit une croix qu’elle restitue, après un an, aux autres, enrichie de ses symboles traditionnels. C’est un signe positif à prendre comme modèle, pour apprendre à s’accueillir et à se donner les uns aux autres dans le respect de votre unicité ; en compétition, certes, mais en s’estimant et en se valorisant (cf. Rm 12, 10), afin que chacun puisse contribuer au mieux au bien de tous, au-delà de toute différence ethnique, d’âge, de statut social et de foi, comme nous l’a rappelé Ilham.

Chers jeunes, le Jubilé, qui commencera dans quelques mois, approche pour toute l’Église. Peut-être certains d’entre vous pourront-ils, à cette occasion, aller en pèlerinage à Rome, pour rencontrer beaucoup d’autres jeunes de leur âge, venus de toutes les parties du monde, afin de renouveler ensemble leur foi. D’ores et déjà, je vous emmène évidemment tous avec moi, dans l’affection et la prière, et je vous bénis. Et puisque le moment est venu pour moi de quitter le Timor oriental, j’étends ma bénédiction à tout le peuple de ce pays bien-aimé, avec beaucoup de gratitude pour l’accueil que vous m’avez réservé. Je vous remercie du fond du cœur ! Et s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi !

 

 

 

 

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Pape Francois

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