Conférence de presse du Saint-Père au cours du vol de retour de Mongolie © Vatican Media

Conférence de presse du Saint-Père au cours du vol de retour de Mongolie © Vatican Media

Conférence de presse du pape lors de son retour de Mongolie

Dix points essentiels

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Lundi 4 septembre 2023

Matteo Bruni 

Bonjour, bonjour à tous. Merci, Sainteté, pour ces journées intenses de rencontre avec ce petit peuple de culture riche dans un grand pays, comme vous l’avez qualifié, et aussi avec une communauté chrétienne vivante, qui témoigne de sa foi avec fraîcheur. Les journalistes ont pu s’intéresser et voir ce lieu et ont encore des questions à vous poser.

Pape François :

Bonjour à tous et merci pour la compagnie. Merci pour le travail que vous avez accompli : présenter par les médias la culture de ce peuple, son histoire. Merci beaucoup.

Matteo Bruni :

Sainteté, la première question est posée par un journaliste de la Mongolie, M. Dambadarjaa.

Jargalsaikhan Dambadarjaa (The Defacto Gazete) : 

Merci beaucoup, Sainteté, d’avoir visité la Mongolie. Ma question est la suivante : quel était l’objectif principal de votre visite et êtes-vous satisfait du résultat obtenu ?

Pape François

Oui, l’idée de visiter la Mongolie est venue en pensant à la petite communauté catholique. Je fais ces voyages pour visiter les communautés catholiques et aussi pour entrer en dialogue avec l’histoire et la culture des peuples, avec la mystique d’un peuple. Il est important que l’évangélisation ne soit pas conçue comme un prosélytisme, car le prosélytisme restreint toujours. Le pape Benoît a dit que la foi ne grandit pas par le prosélytisme, mais par attraction. La proclamation de l’Évangile entre en dialogue avec la culture. Il y a une évangélisation de la culture et une inculturation de l’Évangile. Car les chrétiens expriment aussi leurs valeurs dans la culture de leur propre peuple. C’est le contraire de ce qui serait une colonisation religieuse. Pour moi, le voyage a consisté à connaître ce peuple, à dialoguer avec ce peuple, à recevoir la culture de ce peuple et à accompagner l’Église sur son chemin dans ce peuple, avec beaucoup de respect pour la culture du peuple. Et je suis satisfait des résultats.

Matteo Bruni

La deuxième question vient de Monsieur Markhaakhuu de la télévision mongole.

Ulambadrakh Markhaakhuu (ULS Suld Tv)

Aujourd’hui, les conflits entre civilisations ne peuvent être résolus que par le dialogue, comme vous l’avez dit, Votre Sainteté. Oulan-Bator peut-elle être la plateforme d’un dialogue international entre l’Europe et l’Asie ?

Pape François

Je pense que oui. Vous avez une chose très intéressante qui encourage également ce dialogue. Je me permets de l’appeler la « mystique du troisième voisin », qui vous fait poursuivre une politique de « troisième voisin ». Tu penses qu’Oulan-Bator est la capitale d’un pays très éloigné de la mer, et nous pouvons dire que votre pays se trouve entre deux grandes puissances, la Russie et la Chine. C’est pourquoi votre mystique consiste à chercher à dialoguer également avec les « troisièmes voisins » : non pas par mépris pour ces deux pays, car vous entretenez de bonnes relations avec eux, mais par aspiration à l’universalité, pour montrer vos valeurs au monde entier, et aussi pour recevoir les valeurs des autres, de sorte que cela vous conduise au dialogue. Il est intéressant de noter que dans l’histoire, partir à la recherche d’autres terres a souvent été confondu avec le colonialisme, ou avec le fait d’entrer pour dominer. Au contraire, avec la mystique du troisième voisin, vous avez cette philosophie de partir à la recherche pour dialoguer. J’ai beaucoup aimé cette expression de « troisième voisin ». C’est l’une de vos richesses.

Matteo Bruni

La troisième question vient de Cristina Cabrejas de Efe.

Cristina Cabrejas (EFE)

Buenos dias Pape François. C’est la question du groupe hispanophone. Hier, le Pape François a envoyé un message au peuple chinois et a demandé aux catholiques d’être de bons citoyens, après que les autorités du pays n’ont pas autorisé les évêques à se rendre en Mongolie. À ce stade, quelles sont les relations avec la Chine ? A-t-on des nouvelles du voyage du Cardinal Zuppi à Pékin pour la mission en Ukraine ? Merci

Pape François

La mission du cardinal Zuppi est une mission de paix que je lui ai confiée. Il avait prévu de se rendre à Moscou, à Kiev, aux États-Unis et à Pékin. Le cardinal Zuppi est un homme d’universalité et de grand dialogue : il a dans son histoire le travail réalisé au Mozambique pour la paix et tout cela, et c’est pour cela que je l’ai envoyé. Les relations avec la Chine sont très respectueuses, très respectueuses. Personnellement, j’ai une grande admiration pour le peuple chinois, il est très ouvert, disons comme ça… Pour la nomination des évêques, il y a une commission qui travaille avec le gouvernement chinois et le Vatican depuis un certain temps : c’est un dialogue. Par ailleurs, certains prêtres ou intellectuels catholiques sont invités à enseigner dans les universités chinoises. En ce sens, il y a un discours ouvert. Je pense que nous devons aller plus loin dans l’aspect religieux, pour mieux nous comprendre. Les citoyens chinois ne doivent pas penser que l’Église n’accepte pas leur culture et leurs valeurs et que cette Église est dépendante d’une autre puissance étrangère. La commission présidée par le Cardinal Parolin s’acquitte bien de cette tâche amicale : elle fait du bon travail, y compris du côté chinois ; les relations sont ainsi, en bonne voie, disons-le en un mot. J’ai beaucoup de respect pour le peuple chinois.

Ensuite, vous avez posé une autre question ?

Matteo Bruni:

C’était sur Zuppi, s’il y a du nouveau sur la mission du Cardinal Zuppi.

Pape François

C’est ce que j’ai dit au début. Continuons.

Matteo Bruni

Merci Sainteté. La quatrième question vient de Gerry O’Connell d’America Magazine

Gerard O’Connell (America Magazine) 

Votre Sainteté, étant donné que les relations entre le Saint-Siège et le Vietnam sont très positives, ils ont récemment fait un grand pas en avant, de nombreux catholiques vietnamiens vous demandent de leur rendre visite, comme vous l’avez fait en Mongolie. Ma question est la suivante : avez-vous la possibilité de vous rendre au Vietnam, le gouvernement vous a-t-il invité à le faire ? Et quels sont les autres voyages que vous prévoyez ? Merci

Pape François

Le Vietnam est l’une des très belles expériences de dialogue que l’Église a faite ces derniers temps. Je dirais que…, je ne sais pas, c’est comme une sympathie dans le dialogue. Les deux parties ont eu la bonne volonté de se comprendre et de chercher des moyens de progresser. Il y a eu des problèmes, mais au Vietnam, je constate que tôt ou tard, les problèmes sont surmontés. Le président du Vietnam était ici il y a peu et nous avons parlé librement. Je suis très positif dans ma façon de voir les relations avec le Vietnam. Cela fait des années que l’on fait du bon travail dans ce domaine. Je me souviens – je crois il y a quatre ans – un groupe de parlementaires vietnamiens est venu rendre visite au Pape : nous avons eu un beau dialogue avec eux, très respectueux. Lorsqu’une culture s’ouvre, le dialogue est possible ; s’il y a fermeture ou suspicion, le dialogue est très difficile. Avec le Vietnam, je dirais que le dialogue est ouvert, avec des hauts et des bas, mais il est ouvert et nous avançons lentement. Il y a eu quelques problèmes, mais ils ont été résolus.

Ensuite, le voyage au Vietnam : si je n’y vais pas, Jean XXIV ira certainement… Il est certain qu’il se fera, parce que c’est un pays qui mérite d’y aller, qui a ma sympathie. D’autres voyages : Marseille… ; et puis il y en a un dans un petit pays d’Europe que nous sommes en train de voir si nous pouvons le faire… Mais, je vais vous dire la vérité, pour moi faire un voyage maintenant n’est pas aussi facile qu’au début, il y a des limitations dans la marche et cela conditionne. Mais nous verrons.

Matteo Bruni

Merci Sainteté. Une autre question vient de Fausto Gasparroni de l’ANSA, du groupe italien

Fausto Gasparroni (ANSA)

Sainteté, je pose cette question au nom du groupe italien. Récemment, certaines déclarations que vous avez faites à de jeunes catholiques russes concernant la grande mère Russie, l’héritage de personnages tels que Pierre le Grand et Catherine II, ont suscité un débat. Ce sont des affirmations qui, disons, ont fortement irrité les Ukrainiens, par exemple, et qui ont également eu des conséquences dans la sphère diplomatique et ont été presque perçues comme une exaltation de l’impérialisme russe et une sorte d’approbation de la politique de Poutine. Je voulais vous demander pourquoi vous avez ressenti le besoin de faire ces déclarations, si vous avez estimé l’opportunité de les faire, si vous les répéteriez et aussi, par souci de clarté, si vous pouvez nous dire ce que vous pensez des impérialismes et en particulier de l’impérialisme russe.

Pape François

Voyons où cela a été fait : un dialogue avec de jeunes Russes. À la fin du dialogue, je leur ai donné un message, un message que je répète toujours : prendre en charge leur héritage. En premier lieu : prenez en charge votre héritage. Je dis la même chose partout. C’est avec cette vision que j’essaie également d’établir un dialogue entre grands-parents et petits-enfants : que les petits-enfants prennent en charge l’héritage. C’est ce que je dis partout, et cela a été le message. Une deuxième étape pour rendre l’héritage explicite : j’ai parlé de la grande Russie, parce que l’héritage russe est très bon, il est très beau. Pense à la littérature, à la musique, jusqu’à un Dostoïevski qui nous parle aujourd’hui d’humanisme mature ; il a assumé cet humanisme, qui s’est développé, dans l’art et la littérature. Ce serait un deuxième plan, lorsque j’ai parlé de l’héritage. Le troisième, peut-être pas très heureux, mais en parlant de la grande Russie au sens non pas tant géographique mais culturel, je me suis souvenu de ce qu’on nous avait appris à l’école : Pierre Ier, Catherine II, et ce troisième aspect m’est venu à l’esprit, qui n’est peut-être pas tout à fait juste, je ne sais pas, que les historiens nous le disent, mais c’est un ajout qui m’est venu à l’esprit parce que je l’avais étudié à l’école. Mais ce que j’ai dit aux jeunes Russes, c’est de prendre en charge leur propre héritage, de prendre leur propre héritage, ce qui signifie qu’il ne faut pas aller l’acheter ailleurs. Assumer son propre héritage. Et quel héritage ? Celui de la grande Russie : la culture russe est d’une grande beauté, d’une très grande profondeur, et elle ne doit pas être effacée à cause de problèmes politiques. La Russie a connu des années sombres – politiques – mais l’héritage est toujours resté tel quel, disponible.

Ensuite, vous parlez d’impérialisme. En fait, je ne pensais pas à l’impérialisme en disant cela, je parlais de la culture, et la transmission de la culture n’est jamais « impériale », jamais ; elle est toujours un dialogue, et c’est de cela que je parlais. Il est vrai qu’il y a des impérialismes qui veulent imposer leur idéologie. Je maintiens ceci : lorsque la culture est « distillée » et transformée en idéologie, c’est un poison. La culture est utilisée, distillée en idéologie. Il faut faire la distinction entre la culture d’un peuple et les idéologies émanant d’un philosophe ou d’un politicien de ce peuple. Et je le dis pour tout le monde, y compris pour l’Église : des idéologies sont parfois mises dans l’Église, qui détachent l’Église de la vie qui vient de la racine et qui va vers le haut ; elles détachent l’Église de l’influence de l’Esprit Saint. Une idéologie est incapable de s’incarner, elle n’est rien qu’une idée. Mais quand l’idéologie se renforce et devient politique, elle devient généralement dictature, elle devient incapable de dialoguer, d’avancer avec les cultures. Et c’est ce que font les impérialismes. L’impérialisme se consolide toujours sur la base d’une idéologie. Dans l’Église aussi, nous devons faire la distinction entre doctrine et idéologie : la vraie doctrine n’est jamais idéologique, jamais ; elle est enracinée dans le saint peuple fidèle de Dieu ; au contraire, l’idéologie est détachée de la réalité, détachée du peuple… Je ne sais pas si j’ai répondu.

Matteo Bruni

Merci Sainteté. Une autre question vient de Robert Messner de Dpa

Robert Messner (DPA) 

Bonjour. J’ai une question concernant la mise à jour de votre encyclique Laudato si’. Je voulais vous demander si votre engagement dans la protection de l’environnement et cette mise à jour peuvent être compris comme une manifestation de solidarité avec les groupes d’activistes environnementaux tels que la « Dernière Génération », qui organisent des manifestations spectaculaires. Peut-on y voir une preuve de solidarité, et peut-être y a-t-il aussi un message dans cette mise à jour pour les jeunes activistes, les jeunes qui descendent dans la rue ? Merci beaucoup.

Pape François

Je ne m’attarde pas particulièrement sur ces extrémistes. Mais les jeunes sont inquiets, car c’est leur avenir ! Lors d’une réunion à l’Académie [des sciences], un bon scientifique, un Italien, a fait un beau discours qui se terminait ainsi : « Je ne voudrais pas que ma petite-fille, qui est née hier, vive dans un monde aussi laid dans trente ans ». Les jeunes pensent à l’avenir. Et en ce sens, j’aime qu’ils se battent bien. Mais quand l’idéologie ou la pression politique prend le dessus ou qu’elle est utilisée à cette fin, ça ne va pas. Mon exhortation apostolique, qui sera publiée le 4 octobre, jour de la Saint-François, est un examen de ce qui s’est passé depuis la Conférence de Paris, qui a peut-être été la plus fructueuse à ce jour. Il y a des nouvelles concernant certaines Cop et certaines choses qui n’ont pas encore été résolues et il y a une urgence à les résoudre. Elle n’est pas aussi étendue que Laudato si’, mais elle fait avancer Laudato si’ vers des choses nouvelles. Elle est aussi une analyse de la situation.

Matteo Bruni

Merci. Il y a ensuite la question du groupe francophone, du journaliste Etienne Loraillère

Etienne Loraillère (KTO Tv)

Bonjour, Sainteté. Vous souhaitez une Église synodale, en Mongolie et dans le monde. L’assemblée d’octobre est déjà le fruit du travail du peuple de Dieu. Comment impliquer les baptisés du monde entier dans cette étape ? Comment éviter la polarisation idéologique ? Et les participants pourront-ils parler et partager publiquement ce qu’ils vivent, pour marcher avec eux ? Ou bien tout le processus restera-t-il secret ? Merci

Pape François

Vous avez parlé de la manière d’éviter les pressions idéologiques : c’est la même chose. Dans le Synode, il n’y a pas de place pour l’idéologie, c’est une autre dynamique. Le Synode est un dialogue, entre les baptisés, entre les membres de l’Église, sur la vie de l’Église, sur le dialogue avec le monde, sur les problèmes qui touchent l’humanité aujourd’hui. Mais lorsqu’on pense de manière idéologique, le Synode s’arrête ! Dans le Synode, il n’y a pas de place pour l’idéologie : il y a de la place pour le dialogue, pour se confronter entre frères et sœurs et pour se confronter à la doctrine de l’Église. Et pour aller de l’avant. Ensuite, je veux souligner que ce Synode n’est pas une invention de ma part : c’est saint Paul VI, à la fin du Concile Vatican II, qui s’est rendu compte qu’en Occident, l’Église occidentale, disons, avait perdu la dimension synodale. L’Église orientale l’a. C’est pourquoi il a créé le Secrétariat du Synode des évêques qui, au cours de ces soixante années, a poursuivi la réflexion de manière synodale, en progressant continuellement, en allant de l’avant. À l’occasion du 50e anniversaire de cette décision de saint Paul VI, j’ai publié et signé un document sur ce qu’est le Synode, sur ce qui a été réalisé. Et maintenant, il a progressé, il a mûri davantage, et c’est pourquoi j’ai pensé qu’il était très bon d’avoir un Synode sur la synodalité dans l’Église – qui n’est pas une mode, c’est une chose ancienne, l’Église orientale l’a depuis toujours – : comment vivre la synodalité et la vivre en tant que chrétien, comme je l’ai dit précédemment, sans tomber dans les idéologies. Je ne sais pas si j’ai répondu à cette question ou s’il y avait quelque chose de plus… ?

Etienne Loraillère

Le processus de l’assemblée sera-t-il secret ?

Pape François

Il y a une chose que nous devons préserver : le climat synodal. Il ne s’agit pas d’une émission de télévision où l’on parle de tout. Non. C’est un moment religieux, un moment d’échange religieux. Pense que dans les discours synodaux, chacun parle pendant trois ou quatre minutes, puis il y a trois ou quatre minutes de silence pour la prière. Puis trois autres, et la prière. Sans cet esprit de prière, il n’y a pas de synodalité, c’est de la politique, c’est du parlementarisme. Le Synode n’est pas un parlement. Sur le secret : il y a un département dirigé par M. Ruffini, qui est ici, qui fera les communiqués de presse sur l’avancement du Synode. Dans un Synode, il faut veiller à la religiosité et à la liberté des personnes qui parlent. C’est pourquoi il y a une commission, présidée par le M. Ruffini, qui donnera les informations sur le déroulement du Synode.

Matteo Bruni

Une autre question vient d’Antonio Pelayo, que vous connaissez bien, de Vida Nueva.

Antonio PELAYO (Vida Nueva)

Saint-Père, vous venez de parler du Synode, et nous sommes tous d’accord avec vous pour dire que ce Synode suscite beaucoup de curiosité et d’intérêt. Mais malheureusement, il suscite aussi beaucoup de critiques, qui viennent de milieux catholiques : je veux faire référence à un livre avec un prologue du cardinal Burke, qui dit que le Synode est la boîte de Pandore d’où sortiront toutes les calamités pour l’Église. Que pensez-vous de cette position ? Pensez-vous qu’elle sera dépassée par la réalité ou qu’elle conditionnera le Synode ?

Pape François

Je ne sais pas si je l’ai déjà dit plusieurs fois. Il y a quelques mois, j’ai appelé un Carmel : « Comment vont les moniales, Mère Supérieure », ai-je dit à la Prieure qui m’a répondu. Et finalement, elle m’a dit – un carmel non italien – : « Votre Sainteté, nous avons peur du Synode » – « Mais que se passe-t-il ? Voulez-vous envoyer une religieuse au synode ? », ai-je dit en plaisantant. Elle m’a répondu : « Non, nous avons peur que l’on change de doctrine ». C’est ce qu’elle dit : il y a cette idée. Mais si on va à la racine de ces idées, on trouve des idéologies. Toujours, quand dans l’Église on veut attaquer le chemin de communion, ce qui attaque toujours, c’est une idéologie. Et ils accusent l’Église de ceci ou de cela, mais ils ne l’accusent jamais de ce qui est vrai : qu’elle est pécheresse. Jamais ils ne disent : « Elle est pécheresse ». Ils défendent une « doctrine », entre guillemets, qui est une doctrine comme l’eau distillée, qui ne sait rien, et qui n’est pas la vraie doctrine catholique, contenue dans le Credo. C’est que bien souvent la vraie doctrine catholique scandalise, comme scandalise l’idée que Dieu s’est fait homme, que Dieu s’est fait chair, que la Vierge a conservé sa virginité… Cela fait scandale. La doctrine catholique fait parfois scandale. Les idéologies sont toutes des distillations, elles ne scandalisent jamais.

Matteo Bruni

Je demande à Cincy Wooden de venir pour une autre question

Cindy WOODEN (CNS)

Bonjour Sainteté. Je voudrais revenir un peu sur la question de mon collègue français concernant le Synode et l’information. Beaucoup de fidèles laïcs ont donné beaucoup de temps, de prières, de participation à la prise de parole, à l’écoute. Ils veulent savoir ce qui se passe durant le synode, l’assemblée. Vous avez parlé de votre expérience du Synode sur les Religieux, au cours duquel certains membres du Synode avaient dit « ne mettez pas ceci », « mettez ceci », « on ne peut pas dire ceci… ». Comme nous, journalistes, si nous n’avons pas accès au moins à l’assemblée et aux sessions générales, comment pouvons-nous être sûrs que ce qu’on nous donne comme « bouillie » est vrai ? Y a-t-il une possibilité pour être un peu plus ouverts avec les journalistes ?

Pape François

Non, il est très ouvert, il est très ouvert ! Il y a une commission présidée par Ruffini qui va donner les nouvelles tous les jours : plus ouvert je ne sais pas, plus ouvert je ne sais pas… Et ce qui est bien, c’est que cette commission sera très respectueuse des interventions de chacun, et cherchera à ne pas faire de bavardage, mais à dire les choses sur le déroulement synodal qui sont constructives pour l’Église. Si quelqu’un veut que les nouvelles soient : « celui-ci s’en est pris contre celui-là pour ceci ou cela… », c’est du bavardage politique. Non, la commission a une tâche difficile, qui consiste à dire : « Aujourd’hui, la réflexion va dans tel sens, elle va dans tel autre », et à transmettre l’esprit ecclésial, et non l’esprit politique. Un parlement est différent d’un synode. N’oublie pas que le protagoniste du synode est l’Esprit Saint. Et pour transmettre cela, il faut transmettre la mouvance ecclésiale. Mais merci, merci d’avoir eu le courage de le dire.

Matteo Bruni

Une autre question vient d’Enzo Romeo, de Tg2. Ensuite nous pourrons peut-être conclure.

Vincenzo Romeo (RAI TG 2)

Bonjour Sainteté. Vous êtes le Pape des banlieues et les banlieues, surtout en Italie et en ce moment, souffrent beaucoup. Nous avons eu des épisodes qui inquiètent beaucoup, de violence, de dégradation. Par exemple, près de Naples où un curé, Don Patriciello, vous a même invité à vous rendre ; puis à Palerme… Qu’est-ce qu’on peut faire ? Vous avez visité les villas miserias à Buenos Aires, vous avez donc de l’expérience dans ce domaine. Notre Premier ministre a aussi visité l’une de ces banlieues, on discute beaucoup. Que peut-on faire, à votre avis, que peuvent faire l’Église, les institutions, l’État pour surmonter cette dégradation et faire en sorte que les banlieues fassent vraiment partie d’un pays ?

Pape François

Oui, tu parles des périphéries, des bidonvilles… Il faut aller de l’avant, y aller et y travailler, comme on le faisait à Buenos Aires avec les prêtres qui y travaillaient : c’est une équipe de prêtres avec un évêque auxiliaire à la tête et tu y travailles. Nous devons être ouverts à cela, les gouvernements doivent être ouverts, tous les gouvernements du monde. Mais certaines périphéries sont tragiques. Je reviens sur une périphérie scandaleuse que l’on essaie d’occulter : celle des Rohingyas : les Rohingyas souffrent, ils ne sont pas chrétiens, ils sont musulmans, mais ils souffrent parce qu’ils ont été transformés en périphérie, ils ont été chassés. Nous devons voir les différents types de périphéries ; et aussi apprendre que dans les périphéries, la réalité humaine est plus visible et moins sophistiquée, les mauvais moments, je ne veux pas idéaliser, mais ils sont mieux perçus. Un philosophe a dit un jour quelque chose qui m’a frappé : « C’est à partir des périphéries que l’on comprend le mieux la réalité ». C’est là que l’on comprend le mieux la réalité. Nous devons interagir avec les périphéries et les gouvernements doivent faire de la vraie justice sociale, de la vraie justice sociale, avec les différentes périphéries sociales et aussi avec les périphéries idéologiques. Aller et interagir, là, parce que souvent il y a une périphérie idéologique qui provoque les périphéries sociales. Le monde des périphéries n’est pas facile. Merci.

Matteo Bruni

Peut-être pouvons-nous conclure ici, d’autant plus qu’il y a le service à bord et qu’il commence à y avoir un peu de turbulence. Bon travail à tous.


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