« Soit nous sommes frères… soit tout s’écroule », avertit le pape François dans un message à l’occasion de la première Journée mondiale de la Fraternité humaine, ce 4 février 2021. « Il n’est nul besoin d’une guerre pour faire des ennemis. La négligence suffit », souligne-t-il aussi.
« Aujourd’hui, la fraternité est la nouvelle frontière de l’humanité. Soit nous sommes frères, soit nous nous détruisons mutuellement », insiste le pape dans cette vidéo enregistrée pour un événement virtuel avec le grand imam d’Al-Azhar, co-signataire de la Déclaration sur la Fraternité humaine deux ans plus tôt (2019), à Abou Dhabi.
« Il n’est plus de temps aujourd’hui pour l’indifférence », affirme encore le pape qui invite à refuser la « distance », la « négligence », le « désintérêt » : « Fraternité veut dire main tendue ; fraternité veut dire respect. Fraternité veut dire écouter avec le coeur ouvert. »
« C’est le moment de l’écoute. C’est le moment de l’acceptation sincère. C’est le moment de la certitude qu’un monde sans frères est un monde d’ennemis…. Disons-le clairement : soit des frères, soit des ennemis. »
Voici notre traduction de ce message.
Message du pape François
Soeurs et frères. Ce sont les mots : soeurs et frères. Pour réaffirmer la fraternité.
Un merci spécial à vous, mon frère, mon ami, mon compagnon sur les défis et les risques dans la lutte pour la fraternité, le grand imam Ahmed Al-Tayyeb, merci pour votre compagnie sur le chemin de la réflexion et de la rédaction du document qui a été présenté il y a deux ans. Votre témoignage m’a beaucoup aidé parce qu’il a été un témoignage courageux. Je sais que ce n’était pas une mission facile. Mais nous avons pu le faire ensemble, et nous aider mutuellement. La plus belle chose est que ce premier désir de fraternité s’est consolidé dans une vraie fraternité. Merci, mon frère, merci !
Je souhaite aussi remercier Son Altesse le cheick Mohammed bin Zayed pour tous les efforts qu’il a réalisés pour que l’on puisse avancer sur ce chemin.Il a cru en ce projet. Il y a cru.
Et je pense qu’il est juste aussi de remercier – permettez-moi l’expression, Monsieur le Juge – “l’enfant terrible” de tout ce projet, le juge Abdel Salam, ami, travailleur, plein d’idées, qui nous a aidé à avancer.
Merci à tous d’avoir parié sur la fraternité, parce qu’aujourd’hui la fraternité est la nouvelle frontière de l’humanité. Soit nous sommes frères, soit nous nous détruisons mutuellement.
Il n’y a plus de temps aujourd’hui pour l’indifférence. Nous ne pouvons pas nous en laver les mains, en prenant de la distance, avec négligence, ou par désintérêt. Soit nous sommes frères – permettez-moi –, soit tout s’écroule. C’est la frontière. La frontière sur laquelle nous devons construire; c’est le défi de notre siècle, c’est le défi de notre époque.
Fraternité veut dire main tendue ; fraternité veut dire respect. Fraternité veut dire écouter avec le coeur ouvert. Fraternité veut dire fermeté dans ses propres convictions. Parce qu’il n’y a pas de vraie fraternité si l’on négocie ses convictions.
Nous sommes frères, nés d’un même Père. Avec des cultures, des traditions différentes, mais tous frères. Et dans le respect de nos cultures et de nos traditions différentes, de nos citoyennetés différentes, il faut construire cette fraternité. Non pas en la négociant.
C’est le moment de l’écoute. C’est le moment de l’acceptation sincère. C’est le moment de la certitude qu’un monde sans frères est un monde d’ennemis. Je veux souligner ceci. Nous ne pouvons pas dire: soit des frères, soit pas. Disons-le clairement : soit des frères, soit des ennemis. Parce que la négligence est une forme subtile d’inimitié. Il n’est nul besoin d’une guerre pour faire des ennemis. La négligence suffit. Cette technique – elle s’est transformée en une technique – suffit, cette attitude de détourner le regard, de ne pas se soucier de l’autre, comme s’il n’existait pas, suffit.
Cher frère grand imam, merci pour votre aide. Merci pour votre témoignage. Merci pour ce chemin que vous avez fait ensemble.
[Félicitations du pape au secrétaire général des Nations unies, António Guterres, lauréat du prix Zayed]Je souhaite féliciter pour ce Prix le secrétaire général des Nations unies et le remercier pour tous les efforts qu’il accomplit pour la paix. Une paix qui ne peut être obtenue qu’avec un coeur fraternel. Merci pour ce que vous faites.
[Félicitations du pape à Latifa Ibn Ziaten, lauréate du Prix Zayed]Chère soeur, tes dernières paroles n’ont pas été dites par ouï-dire ou par convention : “nous sommes tous frères”. C’est une conviction. Et une conviction façonnée dans la douleur, dans tes plaies. Tu as dépensé ta vie avec le sourire, tu as dépensé ta vie dans le non ressentiment et, à travers la douleur de perdre un enfant – seule une mère sait ce que signifie perdre un fils –, à travers cette douleur tu as le courage de dire “nous sommes tous frères” et de semer des paroles d’amour. Merci pour ton témoignage. Et merci d’être la mère de ton fils, de tant d’enfants ; d’être mère aujourd’hui de cette humanité qui t’écoute et qui apprend de toi : soit le chemin de la fraternité, soit des frères, soit nous perdons tout.
Merci, merci !
Traduction de Zenit, Anne Kurian-Montabone