Marie Lussignol, actrice, fait partie des premières artistes qui se sont engagées dans la Diaconie de la Beauté. Elle a joué dans deux spectacles : Sainte Faustine (incarnant Faustine) et Sainte Thérèse (incarnant sainte Thérèse de l’Enfant Jésus). Elle souligne comment les artistes sont «des bâtisseurs et des artisans du beau».
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C’est lorsque que j’ai rencontré le Christ à mes 18 ans que je suis née une seconde fois. Mon existence était confirmée. J’existais, parce qu’il le voulait. J’existais et il avait un projet pour moi. Quand il y a un appel, il faut y répondre.
Cette confirmation dans la foi et ce renouvellement de mon baptême, précédait l’appel de la vie d’artiste : l’un ne va pas sans l’autre, ils sont intimement liés dans mon parcours. C’est ce qu’on appelle la confirmation d’une existence. Avoir choisi ce métier de comédienne, pour quelqu’un qui, comme moi, avait été en « crise existentielle » et en profonde recherche d’identité, pourrait étonner. Mais une quête, un désir d’aventure, une soif d’amour m’animaient.
Quoi de plus paradoxal en effet, tant le comédien peut se perdre dans ses personnages. Comme il est tentant pour la personne, derrière tous ses masques, toutes ces vies différentes, de se fuir elle-même. En devenant actrice, on est poussée en avant, c’est comme sauter dans le vide, apprendre à lâcher prise, avec toutes les incertitudes que cela implique : une véritable école d’abandon. Il s’agit de laisser s’exprimer cet élan de vie intérieur qui circule et que l’on veut donner. C’est aussi s’incarner, de la parole donnée et la faire vibrer de tout son être. En choisissant pour cela de se mettre au service de la pensée d’un auteur, en lui donnant un « corps et une âme ».
Cela demande un engagement si entier qu’il est important de discerner : peut-on tout jouer ? Cette question, si récurrente dans le choix de mes projets, m’a fait comprendre qu’il ne s’agit pas seulement d’interpréter des personnages chrétiens ou des saints, mais plutôt de s’efforcer de ne pas trahir les valeurs de son cœur, de ne pas blesser la créature que nous sommes. A cette condition, mon métier me permet de garder cette connexion divine, il devient alors vecteur de l’invisible, ce fil qui me relie à lui.
Me serais-je d’ailleurs penchée sur leur histoire, si je n’avais pas dû les incarner au Théâtre, ces personnages spirituels, eux dont j’ai partagé un moment l’existence ? Sainte Thérèse de Lisieux, sainte Jeanne d’Arc, mais aussi sainte Faustine… tous font désormais partie de ma vie. Si je leur ai prêté ma voix, eux de leur côté, m’aident à trouver la Voie. Ils sont ces compagnons de route, des amis bienveillants qui m’accompagnent sur le chemin de la foi.
Ces deux rôles où j’ai joué Faustine et Thérèse de Lisieux ont été présenté dans le cadre de deux spectacles écrit par Daniel Facérias avec Françoise Thuriès, organisés par la Diaconie de la Beauté.
Il y a deux ans aussi, j’interprétais un spectacle sur Bernard de Clairvaux. J’y jouais sa mère, Aleth, une femme pieuse qui avait une grande dévotion pour la vierge Marie. Je lui dois une prière qui ne me quitte plus, et qui résonne si particulièrement en la fête de l’Assomption :
« Dans le péril, l’angoisse, le doute, pensez à Marie, invoquez Marie. Que son nom ne quitte ni vos lèvres ni vos cœurs ! Et pour obtenir son intercession, ne vous détournez pas de son exemple. En la suivant, vous ne vous égarerez pas. En la suppliant, vous ne connaîtrez pas le désespoir. »
Saint Augustin disait « chanter c’est prier deux fois ». Jouer c’est peut-être, aussi, une façon de cheminer au travers de ces existences que l’on emprunte, une façon de trouver la sienne et de rencontrer notre créateur.
Nous devenons alors, fils et fille de Dieu, co-créateurs avec lui, et nous participons à son œuvre par la beauté.
Merci Seigneur pour la confiance que tu mets en nous. En faisant de nous des bâtisseurs et des artisans du beau. Garde-nous toujours à ton écoute, afin que nous puissions puiser l’inspiration au cœur de ta vie et de ta parole.
Au lendemain du 15 août, je vous partage deux prières à la sainte vierge qui me sont favorites :
Il est midi. Je vois l’église ouverte. Il faut entrer.
Mère de Jésus-Christ, je ne viens pas prier.
Je n’ai rien à offrir et rien à demander.
Je viens seulement, Mère, pour vous regarder.
Vous regarder, pleurer de bonheur, savoir cela
Que je suis votre fils et que vous êtes là.
Rien que pour un moment pendant que tout s’arrête.
Midi !
Etre avec vous, Marie, en ce lieu où vous êtes.
Ne rien dire, mais seulement chanter
Parce qu’on a le coeur trop plein,
Comme le merle qui suit son idée
En ces espèces de couplets soudains.
Parce que vous êtes belle, parce que vous êtes immaculée,
La femme dans la Grâce enfin restituée,
La créature dans son honneur premier
Et dans son épanouissement final,
Telle qu’elle est sortie de Dieu au matin
De sa splendeur originale.
Intacte ineffablement parce que vous êtes
La Mère de Jésus-Christ,
Qui est la vérité entre vos bras, et la seule espérance
Et le seul fruit.
Parce que vous êtes la femme,
L’Eden de l’ancienne tendresse oubliée,
Dont le regard trouve le coeur tout à coup et fait jaillir
Les larmes accumulées,
Parce qu’il est midi,
Parce que nous sommes en ce jour d’aujourd’hui,
Parce que vous êtes là pour toujours,
Simplement parce que vous êtes Marie,
Simplement parce que vous existez,
Mère de Jésus-Christ, soyez remerciée !
Paul Claudel
La prière de Saint Bernard de Clairvaux «Regardez l’étoile, invoquez Marie »:
« Lorsque vous assaillent les vents des tentations, lorsque vous voyez paraître les écueils du malheur, regardez l’étoile, invoquez Marie. Si vous êtes ballottés sur les vagues de l’orgueil, de l’ambition, de la calomnie, de la jalousie, regardez l’étoile, invoquez Marie. Si la colère, l’avarice, les séductions charnelles viennent secouer la légère embarcation de votre âme, levez les yeux vers Marie. Dans le péril, l’angoisse, le doute, pensez à Marie, invoquez Marie. Que son nom ne quitte ni vos lèvres ni vos cœurs ! Et pour obtenir son intercession, ne vous détournez pas de son exemple. En la suivant, vous ne vous égarerez pas. En la suppliant, vous ne connaîtrez pas le désespoir. En pensant à elle, vous éviterez toute erreur. Si elle vous soutient, vous ne sombrerez pas ; si elle vous protège, vous n’aurez rien à craindre ; sous sa conduite vous ignorerez la fatigue ; grâce à sa faveur, vous atteindrez le but. Ainsi soit-il. »
Saint Bernard de Clairvaux (1090-1153)