Messe à Sainte-Marthe, 5 mai 2020 © Vatican Media

Messe à Sainte-Marthe, 5 mai 2020 © Vatican Media

Sainte-Marthe : Les freins à la connaissance de Jésus

Print Friendly, PDF & Email

D’abord le manque de liberté (Traduction intégrale)

Share this Entry
Print Friendly, PDF & Email

Qu’est-ce qui empêche « d’avancer dans la connaissance de Jésus » et de « confesser Jésus » ? C’est la question qu’a posée le pape François dans son homélie de ce mardi 5 mai 2020, en commentant l’Évangile selon saint Jean dans lequel Jésus reproche aux juifs, qui l’interrogent sur son identité, de ne pas croire parce qu’ils ne sont « pas de ses brebis ».

Le pape a dressé une liste, désormais familière à ses auditeurs, des attitudes qui ne « permettent pas d’avancer dans la connaissance du Seigneur, y compris chez « beaucoup d’entre nous » qui « sommes entrés par la porte du Seigneur, et ensuite nous nous arrêtons et nous n’avançons pas parce que nous sommes emprisonnés ».

Ces « antipathies préalables », a indiqué le pape François, sont : les richesses, la rigidité « qui n’est pas la fidélité » mais « une sécurité pour moi-même », l’acédie « qui te rend tiède », le cléricalisme « qui ôte la liberté de la foi des croyants », et l’esprit mondain. « Nous sommes des brebis », a-t-il souligné, qui suivent « toutes ces choses » et auxquelles « il manque la liberté ».

La messe matinale célébrée par le pape François dans la chapelle de la Maison Sainte-Marthe a été transmise en direct streaming par les médias du Vatican, alors que le déconfinement progressif a commencé ce lundi 4 mai 2020 en Italie.

Voici notre traduction de l’homélie du pape François.

HG

Homélie du pape François

Jésus était dans le temple et la fête de la Dédicace approchait (cf. Jn 10,22-30). Même les juifs, en ce temps-là, « firent cercle autour de lui ; ils lui disaient : “Combien de temps vas-tu nous tenir en haleine ? Si c’est toi le Christ, dis-le nous ouvertement !“ » (v.24). Ils faisaient perdre patience et, avec beaucoup de douceur, « Jésus leur répondit : “Je vous l’ai dit et vous ne croyez pas“ » (v.25). Ils continuaient de dire : « Mais est-ce toi ? Est-ce toi ? – Oui, je l’ai dit mais vous ne croyez pas ! ». « Mais vous, vous ne croyez pas, parce que vous n’êtes pas de mes brebis » (v.26). Et peut-être cela suscite-t-il un doute en nous : je crois et je fais partie des brebis de Jésus ; mais si Jésus nous disait : « Vous ne pouvez pas croire parce que vous n’en faites pas partie », y a-t-il une foi préalable à la rencontre avec Jésus ? Que signifie faire partie de la foi en Jésus ? Qu’est-ce qui m’arrête devant la porte qu’est Jésus ?

Il y a des attitudes préalables à la confession de Jésus. Même pour nous, qui sommes dans le troupeau de Jésus. Il y a comme des « antipathies préalables » qui ne nous permettent pas d’avancer dans la connaissance du Seigneur. La première de toutes, ce sont les richesses. Beaucoup d’entre nous aussi, qui sommes entrés par la porte du Seigneur, et ensuite nous nous arrêtons et nous n’avançons pas parce que nous sommes emprisonnés dans les richesses. Le Seigneur a été dur, avec les richesses, il a été très dur, très dur. Au point de dire qu’il est plus facile pour un chameau de passer par le chas d’une aiguille que pour un riche d’entrer dans le royaume des cieux (cf. Mt 19,24). C’est dur, cela. Les richesses sont un empêchement pour avancer. Mais devons-nous tomber dans le paupérisme ? Non ! Mais ne pas être esclaves des richesses, ne pas vivre pour les richesses, parce que les richesses sont un maître, elles sont le maître de ce monde et nous ne pouvons pas servir deux maîtres (cf. Lc 16,13). Et les richesses nous arrêtent.

Une autre chose qui empêche d’avancer dans la connaissance de Jésus, dans l’appartenance de Jésus, c’est la rigidité : la rigidité du coeur. Et aussi la rigidité dans l’interprétation de la Loi. Jésus reproche cette rigidité aux pharisiens, aux docteurs de la Loi (cf. Mt 23, 1-36). Ce qui n’est pas la fidélité : la fidélité est toujours un don fait à Dieu ; la rigidité est une sécurité pour moi-même. Je me souviens d’une fois où j’entrais dans la paroisse et une femme – une femme bonne – s’est approchée de moi et m’a dit : « Père, un conseil… » – Dites-moi… » – La semaine dernière, samedi, pas hier, le samedi d’avant, nous sommes allés en famille à un mariage : il y avait la messe. C’était samedi après-midi et nous avons pensé qu’avec cette messe nous avions obéi au précepte dominical. Mais ensuite, en rentrant chez nous, j’ai pensé que les lectures de cette messe n’étaient pas celles du dimanche. Et je me suis ainsi aperçue que j’avais fait un péché mortel parce que je n’y suis pas allée parce que j’y suis allée samedi, mais à une messe qui n’était pas vraie, parce que les lectures n’étaient pas vraies ». Quelle rigidité !… Et cette dame faisait partie d’un mouvement ecclésial. La rigidité. Cela nous éloigne de la sagesse de Jésus, de la sagesse beauté de Jésus ; elle te prend ta liberté. Et beaucoup de pasteurs font grandir cette rigidité dans les âmes des fidèles ; et cette rigidité ne nous permet pas d’entrer par la porte de Jésus (cf. Jn 10,7) : il est plus important d’observer la loi telle qu’elle est écrite ou telle que je l’interprète plutôt que la liberté d’avancer en suivant Jésus.

Une autre chose qui ne nous permet pas d’avancer dans la connaissance de Jésus, c’est l’acédie. Cette fatigue… Pensons à cet homme de la piscine : 38 ans là-bas (cf. Jn 5, 1-9). L’acédie. Elle nous enlève la volonté d’avancer et tout est « oui, mais… non, pas maintenant, non, mais… », qui nous entraîne dans la tiédeur et qui te rend tiède. L’acédie est une autre chose qui nous empêche d’avancer.

Une autre attitude, assez grave, c’est le cléricalisme. Le cléricalisme se met à la place de Jésus. Il dit : « Non, cela doit être comme ceci, ceci et ceci… – Mais, le Maître… – Ne t’occupe pas du Maître ; c’est comme ceci, ceci, ceci, et si tu ne fais pas comme ceci, comme ceci, comme ceci, tu ne peux pas entrer ». Un cléricalisme qui ôte la liberté de la foi des croyants. C’est une maladie, cela, grave, dans l’Église : le cléricalisme.

Ensuite, une autre chose qui nous empêche d’avancer, d’entrer pour connaître Jésus et confesser Jésus, c’est l’esprit mondain. Quand l’observance de la foi, la pratique de la foi finit dans la mondanité. Et tout est mondain. Pensons à la célébration de certains sacrements dans certaines paroisses : que de mondanité il y a ! Et on ne comprend pas bien la grâce de la présence de Jésus.

Ce sont ces choses qui nous empêchent de faire partie des brebis de Jésus. Nous sommes des « brebis » [à la suite] de toutes ces choses : des richesses, de l’acédie, de la rigidité, de la mondanité, du cléricalisme, de modalités, d’idéologies, de formes de vie. Il manque la liberté. Et on ne peut pas suivre Jésus sans liberté. « Mais parfois, la liberté va au-delà et on glisse ». Oui, c’est vrai. Nous pouvons glisser en marchant dans la liberté. Mais c’est pire de glisser avant de marcher, à cause de ces choses qui empêchent de se mettre en marche.

Que le Seigneur nous éclaire pour que nous voyions, en nous, s’il y a la liberté de passer par la porte qu’est Jésus et de passer par Jésus pour devenir son troupeau, pour devenir les brebis de son troupeau.

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

 

Share this Entry

Hélène Ginabat

FAIRE UN DON

Si cet article vous a plu, vous pouvez soutenir ZENIT grâce à un don ponctuel