« Dans la ville, Dieu a installé sa tente …, et de là il n’est jamais parti! Sa présence dans la ville, même dans notre ville de Rome, « ne doit pas être fabriquée, mais découverte, dévoilée » », déclare le pape François dans son homélie pour les vêpres de la fête de « Marie, Mère de Dieu », qu’il a présidées ce mardi 31 décembre, à 17h, en la basilique Saint-Pierre. Le pape a souligné que Dieu se sert des femmes pour changer l’histoire.
Un message de confiance, au terme de l’année civile et au moment de chanter le « Te Deum » d’action de grâce pour l’année écoulée.
Voici notre traduction rapide, de travail, de cette homélie prononcée en italien.
AB
« Quand la plénitude des temps fut venue, Dieu a envoyé son Fils » (Gal 4: 4).
Le Fils envoyé par le Père a placé sa tente à Bethléem d’Ephrata, «si petite pour être parmi les villages de Juda » (Mi 5,1); il a vécu à Nazareth, une ville jamais mentionnée dans les Écritures sinon pour dire: « quelque chose de bon peut-il venir de Nazareth? » (Jn 1, 46), et il mourut rejeté par la grande
ville, par Jérusalem, crucifié en dehors de ses murs. La décision de Dieu est claire: pour révéler la son amour, il choisit la petite ville et la ville méprisée, et quand il arrive à Jérusalem, il s’unit au peuple des pécheurs et les rejetés. Aucun des habitants de la ville ne se rend compte que le Fils de Dieu fait homme marche dans ses rues, probablement même pas ses disciples,
qui ne comprendront pleinement qu’avec la résurrection le Mystère présent en Jésus.
Les paroles et les signes de salut qu’Il accomplit dans la ville suscitent un étonnement et un enthousiasme momentanés, mais ils ne sont pas bien accueillis dans leur pleine signification: bientôt, on ne s’en souviendra plus,
quand le gouverneur romain demandera: « Voulez-vous libérer Jésus ou Barabbas? ». En dehors de la ville, Jésus sera crucifié, en-haut, sur le Golgotha, pour être condamné par le regard de tous les habitants et tourné en dérision par leurs commentaires sarcastiques. Mais de là, de la croix, nouvel arbre de vie, la puissance de Dieu les attirera tous à lui. Et aussi la Mère de Dieu, qui est la Douloureuse au pied de la croix, va étendre sa maternité à tous les hommes. La Mère de Dieu est la Mère de l’Église et sa tendresse maternelle rejoint tous les hommes.
Dans la ville, Dieu a installé sa tente …, et de là il ne s’est jamais éloigné! Sa présence dans la ville, même dans notre ville de Rome, « ne doit pas être fabriquée, mais découverte, dévoilée » (Exhort. ap. Evangelii gaudium, 71). C’est nous qui devons demander à Dieu la grâce de nouveaux yeux capables
d’un « regard contemplatif, c’est-à-dire un regard de foi qui découvre Dieu qui habite dans ses maisons, dans ses rues, dans ses places « (ibid., 71). Les prophètes, dans l’Écriture, mettent en garde contre tentation de ne lier la présence de Dieu qu’au Temple (Jér 7,4): il vit au milieu de son peuple,
marche avec lui et vit sa vie. Sa fidélité est concrète, elle est proximité avec le quotidien de ses enfants. Plus encore, quand Dieu veut faire toutes choses nouvelles par son Fils, il ne commence pas par le Temple, mais par le sein d’une petite femme pauvre de son peuple. Ce choix de Dieu est extraordinaire ! Il ne change par l’Histoire par les hommes puissants des institutions civiles et religieuses, mais à partir des femmes de la périphérie de l’empire, comme Marie, et de leurs seins stériles, comme celui d’Elisabeth.
Dans le Psaume 147, que nous venons de prir, le psalmiste invite Jérusalem à glorifier Dieu, parce qu’Il « envoie sa Parole sur la terre, son message la parcourt » (v. 4). Grâce à son Esprit, qui prononce sa Parole dans chaque cœur humain, Dieu bénit ses enfants et les encourage à travailler pour la paix dans la ville. Je souhaite ce soir que notre regard sur la ville de Rome saisisse les choses du point de vue du regard de Dieu. Le Seigneur se réjouit de voir combien de réalités de bien, combien d’efforts et de dévouement sont faits chaque jour pour promouvoir la fraternité et la solidarité. Rome n’est pas seulement une ville compliquée, avec de nombreux problèmes, avec des inégalités, de la corruption et des tensions sociales. Rome est une ville où Dieu envoie sa Parole, qui fait son nid grâce à l’Esprit dans le cœur de ses habitants et qui les pousse à croire, à espérer malgré tout, à aimer en se battant pour le bien de tous.
Je pense aux nombreuses personnes courageuses, croyantes et non croyantes, que j’ai rencontrées ces dernières années et qui représentent le « cœur battant » de Rome. Vraiment, Dieu n’a jamais cessé de changer la
l’histoire et le visage de notre ville grâce au peuple des petits et des pauvres qui y habitent: il les choisit, les inspire, les incite à l’action, les rend solidaires, les pousse à activer des réseaux, à créer des liens vertueux, pour construire des ponts et non des murs. C’est précisément grâce à ces mille ruisseaux d’eau vive de l’Esprit que la Parole de Dieu féconde la ville et de stérile qu’elle était en fait une « mère d’enfants joyeuse » (Ps 113, 9).
Et que demande le Seigneur à l’Église de Rome? Il nous confie sa Parole et nous pousse à nous jeter dans la mêlée, pour nous impliquer dans la rencontre et dans la relation avec les habitants de la ville car « son
message coure rapidement ». Nous sommes appelés à rencontrer les autres et à nous mettre à l’écoute de leur existence, de leur appel à l’aide. L’écoute est déjà un acte d’amour! Avoir du temps pour les autres, dialoguer, reconnaître d’un regard contemplatif la présence et l’action de Dieu dans leur vie, témoigner de la vie nouvelle de l’Évangile par des actes plutôt qu’avec des paroles est vraiment un service d’amour qui change la réalité. Ce faisant, en effet, un air nouveau circule dans la ville et aussi dans l’Église un désir de se remettre en route, pour surmonter les vieilles logiques de l’opposition et des barrières, pour collaborer ensemble, construire une ville plus juste et plus fraternelle.
Nous ne devons pas avoir peur ou nous sentir inadéquats pour une mission si importante. Souvenons-nous: Dieu ne nous choisit pas à cause de notre « excellence », mais plutôt parce que nous sommes et que nous nous sentons petits. Nous le remercions pour sa grâce qui nous a soutenus cette année et avec joie élevons vers lui le chant de louange.
Copyright 2019 – Traduction de Zenit, Anita Bourdin