Le p. Jorge Mario Bergoglio SJ au Japon en 1987 @ Université Sophia de Tokyo

Le p. Jorge Mario Bergoglio SJ au Japon en 1987 @ Université Sophia de Tokyo

Les deux «généraux» espagnols de la Compagnie de Jésus qui ont choisi le Japon

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A l’occasion de la visite du pape François aux prêtres âgés, à Tokyo

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Il a été « général » de la Compagnie de Jésus entre 2008 et 2016 : le père Adolfo Nicolas est retourné au Japon après sa « retraite ». Ce mardi matin, 26 novembre 2019, il a rencontré le pape François à la maison des prêtres âgés ou malades, à l’université Sophia de Tokyo (Japon).
Un autre « général » de la Compagnie de Jésus avait lui aussi auparavant choisi le Japon, Pedro Arrupe.
Le pape François a multiplié les gestes de compassion tout au long de son séjour au Japon : avec les victimes des deux bombes atomiques, avec les rescapés du « triple désastre » de 2011 et les familles de victimes, et encore ce matin avec les prêtres âgés ou malades, à l’université Sophia où il a célébré la messe avec les jésuites.

Messe avec les jésuites à Tokyo, Sophia © p. Antonio Spadaro SJ

Messe avec les jésuites à Tokyo, Sophia © p. Antonio Spadaro SJ

Destins croisés
Le p. Adolfo Nicolas, jésuite espagnol un peu plus âgé que le pape, (il est né en avril 1936 et le pape en décembre 1937) a été envoyé au Japon à sa demande alors qu’il était jeune jésuite, en Espagne. Une demande qui avait été refusée, en Argentine, au jeune père Jorge Mario Bergoglio, pour raison de santé.
Le pape a lui-même expliqué aux évêques du Japon, le 25 novembre, qu’il avait subi une lobectomie à 21 ans, en 1957: « Comme on m’avait enlevé une partie de mon poumon, il (le père général, ndlr) a répondu: « non, ta santé ne te le permet pas ».
Le pape a confié en souriant aux évêques japonais qu’il s’était ensuite «vengé» en envoyant au Japon 5 jeunes jésuites d’Argentine. Il était alors supérieur des jésuites de cette province de la Compagnie. L’un d’eux, aujourd’hui « provincial » du Japon, le p. Renzo De Luca, a accompagné le pape dans son voyage en tant qu’interprète. Il a concélébré la messe ce mardi matin avec le pape à l’Université Sophia.
Le père Bergoglio était venu leur rendre visite à Tokyo en 1987 et la photo était dans le livret de la rencontre de ce mardi matin à l’université.
Le p. Nicolas ordonné prêtre à Tokyo
A Tokyo, le p. Adolfo Nicolas a d’abord consacré une année entière à l’étude de la langue et de la culture japonaise. À partir de 1964, il a suivi un enseignement de théologie à cette même université Sophia où il a retrouvé le pape Bergoglio ce 26 novembre. Et c’est à Tokyo qu’il a été ordonné prêtre le 17 mars 1967.
En 1968, il revient en Europe où il passe trois ans (1968-1971) pour y obtenir, à l’université grégorienne de Rome un doctorat en théologie avec une thèse sur la Théologie du progrès humain.
Rentré au Japon, Adolfo Nicolas enseigne la théologie systématique, toujours à l’université Sophia. Mais en 1978, il est nommé directeur de l’institut pastoral à Manille, aux Philippines, jusqu’en 1984.
De nouveau au Japon, il est nommé supérieur de la communauté des étudiants jésuites à Tokyo (1991 à 1993) avant de devenir le supérieur provincial des Jésuites du Japon, poste qu’il occupe jusqu’en 1999.
Il passe alors trois ans dans une paroisse auprès des émigrants philippins et asiatiques pauvres de Tokyo, tout en continuant son enseignement théologique à l’université. En 2004, il devient modérateur de la conférence des Provinciaux jésuites d’Asie Orientale et Océanie.
Elu supérieur général des jésuites en 2008, il présentera sa démission en 2016, à 80 ans.
Le pape François bénit le p. Adolfo Nicolas SJ, Sophia, Tokyo © Antonio Spadaro SJ

Le pape François bénit le p. Adolfo Nicolas SJ, Sophia, Tokyo © Antonio Spadaro SJ

Le P. Arrupe à Hiroshima
C’est ainsi qu’il a pu revenir au Japon, où un autre grand jésuite espagnol, supérieur général, a marqué les esprits, le père Pedro Arrupe.
Des Japonais il admirait « la courtoisie, la délicatesse et l’hospitalité ; rectitude, honnêteté, discipline, maîtrise de soi, patience et endurance ; la capacité au travail, au sacrifice et à une résilience prouvée à la dureté de la vie », essayant « de se pénétrer de l’esprit japonais, apprenant la cérémonie compliquée du thé, la calligraphie, la musique de son théâtre ».
Parti en 1938 pour le Japon, le p. Arrupe (1907-1991) est nommé, en 1942, responsable de la formation des novices, à Hiroshima, sur la colline de Nagatsuka.
Il s’y trouve lorsque la première bombe atomique est larguée sur la ville, le 6 août 1945. Il est médecin de formation. Le noviciat se trouve à 4 kilomètres de l’épicentre. Il est indemne. Il se dévoue jour et nuit avec ses novices, qui n’ont que des blessures superficielles, auprès des blessés et moribonds. Le noviciat est alors devenu pour des milliers d’entre eux un refuge: « Le bureau du Père Arrupe devint une table d’opération et sa chambre devint une salle d’attente où l’on ne pouvait contenir les cris de douleur ».
Le p. Arrupe dira : « Le Cœur de Jésus est plus puissant que la bombe atomique » (in « Prier 15 jours avec le Pedro Arrupe », François Bécheau, éd. Nouvelle Cité, 2004).
Le p. Pedro Arrupe SJ @arrupe.jesuitgeneral.org

Le p. Pedro Arrupe SJ @arrupe.jesuitgeneral.org

En août dernier, à Hiroshima, le p. Arturo Sosa, actuel « général » de la Compagnie de Jésus a rendu hommage à son « énergie apostolique », soulignant l’importance de son héritage.
Il est considéré par beaucoup, même non catholiques, comme un « saint » a confié à Zenit le responsable de l’aumônerie catholique japonaise du diocèse de Paris, Shintaro Yuzawa.
Plus tard, il est supérieur provincial des jésuites du Japon. Mais il est élu supérieur général en 1965 et il le restera jusqu’en 1983. Son procès de béatification a été ouvert à Rome, en février dernier.
Ces deux grands jésuites et l’Université Sophia attestent la continuité cette estime et de cet amour du Japon manifestés par les jésuites depuis des commencements – saint François-Xavier avait débarqué à Kagoshima, sous le signe de la Vierge Marie, le 15 août 1549 -, et par le pape François, depuis sa jeunesse.
 

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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