Mgr Paglia © Twitter @PontAcadLife

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Présentation de «Humana communitas» par Mgr Paglia (traduction complète)

Message du pape pour les 25 ans de l’Académie pour la vie

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« Aujourd’hui il devient de plus en plus urgent, en particulier en raison des progrès extraordinaires de la technique, de porter une attention renouvelée à ceux qui habitent cette maison, à savoir la famille humaine dans son intégralité ». C’est ce qu’affirme Mgr Vincenzo Paglia. En effet, poursuit-il, les technologies émergentes « dilatent de façon extraordinaire notre capacité d’intervention sur la matière vivante, ouvrant de nouveaux espaces à notre responsabilité ».

La lettre que le pape François a adressée au président de l’Académie pontificale pour la Vie, Mgr Vincenzo Paglia, à l’occasion du 25ème anniversaire de l’institution de cette Académie le 11 février 1994, a été présentée à la salle de presse du Saint-Siège ce mardi 15 janvier 2019. La prochaine Assemblée générale de l’Académie, intitulée « Robot-éthique. Personnes, machines et santé », se tiendra du 25 au 27 février prochains au Vatican.

Dans sa lettre, le pape se demande si « en tant que croyants, nous avons apporté une contribution adéquate à la construction d’un humanisme capable d’inspirer, de motiver et de mettre en œuvre dans le monde une coexistence civile plus fraternelle ». C’est pourquoi, explique Mgr Paglia, il invite les Académiciens à « comprendre de quelle manière les nouvelles découvertes de la science et de la technique ont une incidence sur notre humanité » afin d’ « élaborer des critères d’évaluation qui nous permettent de promouvoir la dignité de toute personne et de toutes les populations qui habitent la planète »

À cette conférence de presse, outre Mgr Vincenzo Paglia, sont aussi intervenus Mgr Renzo Pegoraro, chancelier de l’Académie pontificale pour la Vie (APV), le p. Paolo Benanti, T.O.R., professeur de théologie morale et éthique des technologies à l’Université pontificale grégorienne et académicien de l’APV, et Laura Palazzani, professeur de bio-droit et de philosophie du droit à l’Université libre Maria Santissima Assunta (LUMSA) et académicienne de l’APV.

Voici notre traduction de l’intervention de Mgr Paglia, prononcée en italien.

HG

Intervention de Mgr Vincenzo Paglia

L’Académie pontificale pour la Vie célèbrera le 25ème anniversaire de sa fondation le 11 février 2019. À cette occasion, le pape François a adressé une lettre, pas simplement commémorative, à l’Académie pour remercier tous ses membres du travail qu’ils ont effectué pendant ces années et pour les encourager à aborder avec un engagement renouvelé la tâche qui les attend à l’avenir.

Le titre de cette lettre, Humana communitas, indique exactement le point central de cet engagement. Alors que nous sommes au cœur des questions relatives à la protection de la création, une problématique nouvelle et bien plus profonde, relative à la famille humaine, interroge l’humanité. En somme, l’attention à la création comme « maison commune » est entrée à l’intérieur des frontières qui décident de l’avenir de la planète. Aujourd’hui il devient de plus en plus urgent, en particulier en raison des progrès extraordinaires de la technique, de porter une attention renouvelée à ceux qui habitent cette maison, à savoir la famille humaine dans son intégralité. Et c’est ici que le pape veut attirer l’attention, entre autres de l’Académie pour la Vie, au point d’inviter à un élargissement sémantique. La « vie » n’est pas un concept universel abstrait : c’est l’homme dans son histoire, c’est toute la famille humaine dans la trame de ses liens. Le pape relève l’affaiblissement des liens qui constituent la fraternité : « Nous devons reconnaître que la fraternité demeure la promesse manquée de la modernité. La respiration universelle de la fraternité qui grandit dans la garde mutuelle – au sein de la citoyenneté moderne, comme entre les peuples et les nations – apparaît très affaiblie. La force de la fraternité, que l’adoration de Dieu en esprit et en vérité génère parmi les êtres humains, est la nouvelle frontière du christianisme ». C’est un défi qui concerne la planète tout entière. L’affaiblissement de la fraternité – qu’on le veuille ou non – contamine toutes les sciences de l’homme et de la vie.

Dans la Lettre, apparaît clairement l’attention du pape au cri qui s’élève de la souffrance des peuples, pour que nous nous en rendions tous compte. Mais il ne s’attarde pas sur le moment du diagnostic. Il s’interroge aussi sur la mission de l’Église. Et il se demande si, en tant que croyants, nous avons apporté une contribution adéquate à la construction d’un humanisme qui ne soit pas seulement confiné dans le contexte ecclésial, mais qui soit capable d’inspirer, de motiver et de mettre en œuvre dans le monde une coexistence civile plus fraternelle. Que nous dit le paradoxe criant d’une techno-science qui, avec ses instruments, pourrait permettre à toute l’humanité de vivre dans de bien meilleures conditions alors qu’elle alimente au contraire des inégalités et, plus profondément, « la mélancolie d’une vie qui ne trouve pas de destination à la hauteur de sa qualité spirituelle » (n.3) ?

La Lettre ne se limite pas à des réflexions sur le plan général. Elle entre aussi dans le vif du sujet. Je cite seulement quelques points.

Il y a le thème de la bioéthique mondiale. Les processus de la mondialisation lient de plus en plus étroitement les questions qui concernent la vie et la santé aux conditions sociales et environnementales. Ils mettent donc en jeu la pratique de la justice. Étant donné la pluralité des cultures et des savoirs scientifiques qui interagissent de plus en plus étroitement dans notre monde, il faut élaborer des critères opérationnels universellement acceptables qui soient incisifs sur la détermination des politiques nationales et internationales. Les droits humains sont, à beaucoup d’égard, le terrain sur lequel se produit cette confrontation et il faut par conséquent en favoriser une interprétation correcte qui, comme le disait le pape Benoît XVI, trouve un juste équilibre avec les devoirs.

Il faut ensuite ajouter les fameuses technologies émergentes et convergentes, comme les nanotechnologies, les biotechnologies, les technologies de l’information et les sciences cognitives. Elles dilatent de façon extraordinaire notre capacité d’intervention sur la matière vivante, ouvrant de nouveaux espaces à notre responsabilité. Cela vaut pour les thérapies, mais aussi pour les hypothèses d’amélioration des organismes vivants. Ce dont il est important de se rendre compte, c’est qu’il ne s’agit pas seulement de rendre plus efficaces certaines fonctions de l’organisme ou de les transférer sur des supports artificiels ; plus profondément, c’est un nouveau rapport au monde qui est en jeu. De nouveaux dispositifs informatiques sont de plus en plus omniprésents dans divers domaines de la réalité, y compris notre corps, qui se trouve de plus en plus exposé aux dynamiques de l’administration selon les critères de la techno-science (technocratie). C’est une des formes de ce que l’on appelle habituellement la bio-politique.

Il est donc nécessaire de participer au débat et de favoriser la participation la plus large possible de tous les sujets impliqués, de sorte que le développement et l’utilisation de ces ressources extraordinaires visent à promouvoir la dignité de la personne et au bien le plus universel. En somme, nous devons être avertis pour éviter le risque de réductionnisme de l’humain et le risque, encore plus dangereux, de substitution de l’humain. De cette façon, l’utopie technocratique prépare la voie à un développement fonctionnel dont nous nous croyons maîtres alors que nous en devenons esclaves.

Par conséquent, le pape exhorte l’Académie à entrer dans les territoires de la technique et à les parcourir avec audace et créativité et avec un discernement attentif. Ce qui signifie ne pas avoir de réponses préfabriquées parce que déduites d’une théorie abstraite pré-constituée, mais se mettre avant tout dans une écoute attentive des phénomènes dans leur complexité et s’engager dans un travail sérieux d’interprétation pour comprendre de quelle manière les nouvelles découvertes de la science et de la technique ont une incidence sur notre humanité. Et par conséquent élaborer des critères d’évaluation qui nous permettent de promouvoir la dignité de toute personne et de toutes les populations qui habitent la planète. C’est un travail qui met en jeu la conscience morale, comprise non pas tant comme une fonction d’application des normes mais comme le cœur de la personne vue dans son ensemble, où on ne peut séparer la dimension éthique de la dimension spirituelle.

La Foi dans la résurrection encourage tout le monde, même les non-croyants, à ne pas céder sur la profondeur de nos sentiments et de nos liens en repoussant des solutions de compromis. Notre vie commune – aussi enchantée et vulnérable qu’elle soit – doit être un sujet d’alliance pour le rachat de l’humain, et non une monnaie d’échange pour le post-humain.

La date à laquelle la lettre du pape a été signée est la fête de l’Épiphanie. Elle représente un symbole qui peut nous inspirer. L’Évangile cherche l’alliance des peuples et non la fermeture de la communauté. Les mages sont le symbole du partage de l’humain et de la convergence de sa sagesse autour du Fils éternellement engendré par Dieu, qui se fait homme et destination de l’homme pour toujours. Ils sont en quelque sort les académiciens et les ambassadeurs de l’humain : ils scrutent les signes du ciel et de la vie, ils se soustraient à la complicité d’Hérode et sont heureux de donner leurs richesses à l’Enfant de Bethléem, Seigneur du ciel et de la vie.

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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