Palerme, rencontre avec les jeunes, 15 sept. 2018 © Vatican Media

Palerme, rencontre avec les jeunes, 15 sept. 2018 © Vatican Media

«Tout peut changer»: le pape demande aux jeunes de Sicile de rejeter le pessimisme (traduction complète)

«Dieu déteste la paresse et il aime l’action»

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« Tout peut changer »: le pape François a demandé aux jeunes de Sicile de dire non au pessimisme et de se retrousser les manches car «Dieu déteste la paresse et il aime l’action».
Le pape a rencontré les jeunes des neuf provinces de Sicile, à Palerme, Piazza Politeama, samedi 15 septembre 2018, au terme de sa journée dans l’île, à l’occasion du 25e anniversaire de l’assassinat su bienheureux don Pino Puglisi (1937-1993) qui réunissait les jeunes et les aidait à ne pas se laisser entraîner dans la mafia.
Le pape les a exhortés à faire naître l’espérance, à contre-courant de « la logique de l’irrémédiable », une logique « perverse » : « Vous avez dans le cœur et dans les mains la possibilité de faire naître et grandir l’espérance. Pour être des aubes de l’espérance, il faut se lever chaque matin avec un cœur jeune et plein d’espérance, en luttant pour ne pas se sentir vieux, ne pas céder à la logique de l’irrémédiable. C’est une logique perverse : cela ne va pas, rien ne change, tout est perdu… C’est une logique perverse, c’est le pessimisme, selon lequel il n’y a pas de salut pour cette terre, tout est fini. »
« Non ! Non au fatalisme, non au pessimisme, oui à l’espérance chrétienne. Et vous avez entre vos mains la capacité à faire l’espérance, à promouvoir l’espérance. S’il vous plaît, non à la résignation ! Ecoutez bien : un jeune ne peut pas être résigné. Non à la résignation ! Tout peut changer. »
Le pape les a exhortés à faire naître « une civilisation nouvelle, une civilisation accueillante, une civilisation fraternelle, une civilisation de l’amour » car « tout peut changer ».
Le pape les a aussi notamment invités à se mettre en chemin, à rêver, à accueillir et à s’engager pour servir les autres, à cultiver leurs racines pour avoir une « appartenance », une « identité ».
Voici notre traduction, intégrale de ce long discours, en réponse à trois questions de jeunes. On y pressent ce que le pape François désire dire aux jeunes, à quelques semaines de l’ouverture du synode sur les jeunes, la foi et le discernement des vocations.
AB

Palerme, rencontre avec les jeunes, 15 sept. 2018 © Vatican Media

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Discours du pape François
Chers amis, bonsoir!
Je suis heureux de vous rencontrer au plus fort de cette journée! Une journée un peu fatigante, mais belle, belle, belle ! Merci aux Palermitains ! Merci pour les trois questions. Je connaissais les trois questions et j’avais écrit quelques éléments de réponse, mais j’aime mettre des choses en relief et, si une autre idée me vient l’insérer sur le moment.
La première portait sur comment écouter la voix du Seigneur et mûrir une réponse. Mais je voudrais demander : Comment est-ce qu’on écoute le Seigneur? Comment l’écouter ? Où parle-t-il, le Seigneur ? Vous avez le numéro du portable du Seigneur, pour l’appeler ? Comment est-ce qu’on écoute le Seigneur? Je vous dirais ceci, et ceci, sérieusement: le Seigneur ne s’écoute pas en restant dans un fauteuil. Vous comprenez ? Assis, une vie confortable, sans rien faire, et je voudrais écouter le Seigneur. Je t’assure que tu entendras bien des choses, sauf le Seigneur. On n’écoute pas le Seigneur dans une vie confortable, dans un fauteuil. Rester assis, dans la vie – écoutez cela, c’est très important pour votre vie de jeunes – rester assis crée une interférence avec la Parole de Dieu, qui est dynamique. La Parole de Dieu n’est pas statique, et si tu es statique, tu ne peux pas l’entendre. Dieu se découvre en marchant. Si tu n’es pas en chemin pour faire quelque chose, pour travailler pour les autres, pour rendre témoignage, pour faire le bien, tu n’écouteras jamais le Seigneur. Pour écouter le Seigneur, il faut être en chemin sans attendre que quelque chose arrive comme par magie dans la vie.
Nous le voyons dans cette histoire d’amour fascinante qu’est la Bible. Le Seigneur y appelle continuellement des jeunes. Toujours, sans cesse. Il aime parler aux jeunes alors qu’ils sont en chemin – pensez par exemple aux deux disciples d’Emmaüs – ou lorsqu’ils s’affairent– pensez à David qui fait paître son troupeau, tandis que ses frères restaient tranquillement à la maison ou à la guerre. Dieu déteste la paresse et il aime l’action. Les paresseux ne pourront pas hériter de la Parole de Dieu. Vous comprenez ? Mais il ne s’agit pas de bouger pour se maintenir en forme, de courir tous les jours pour s’entraîner. Non, il ne s’agit pas de cela. Il s’agit de bouger son cœur, de mettre son cœur en marche. Pensez au jeune Samuel. Il était jour et nuit dans le Temple, mais il était constamment en mouvement, car il n’était pas plongé dans ses affaires, mais il était en recherche. Si tu veux écouter la voix du Seigneur, vis en recherche. Le Seigneur parle à qui est en recherche. Qui cherche marche. C’est toujours sain d’être en recherche. Se sentir déjà arrivé, surtout pour vous, c’est tragique. Vous comprenez ? Ne vous sentez jamais arrivés, jamais ! J’aime dire que ce n’est pas beau de voir un jeune à la retraite, retraité ! Ce n’est pas beau ! Un jeune doit être en chemin, pas à la retraite. La jeunesse te pousse à cela, mais si tu prends ta retraite à 22 ans, tu as vieilli trop vite, trop vite !
Jésus nous donne un conseil pour écouter la voix du Seigneur: « Cherchez et vous trouverez » (Lc 11, 9). Oui, mais où chercher? Pas sur le téléphone portable – comme je viens de le dire – : les appels du Seigneur n’arrivent pas là. Pas à la télévision, où le Seigneur ne possède aucune chaîne. Pas même dans la musique assourdissante ni dans un divertissement qui abrutit: là, la ligne avec le ciel est interrompue. On ne doit pas non plus chercher le Seigneur devant le miroir – c’est un danger, écoutez bien : on ne cherche pas non plus le Seigneur devant le miroir -, où comme vous êtes seuls, vous risquez d’être déçus de ce que vous êtes. Cette amertume que vous ressentez, qui conduit parfois à de la tristesse. Non. En chemin, toujours en chemin. Ne le cherchez pas dans votre petite chambre, enfermés sur vous-mêmes, à repenser au passé ou à errer dans vos pensées sur un avenir inconnu. Non, Dieu parle maintenant dans la relation. Sur le chemin et dans la relation avec les autres. Ne vous renfermez pas sur vous-mêmes, ayez confiance en lui, confiez-lui tout, cherchez-le dans la prière, cherchez-le dans el dialogue avec les autres, cherchez-le toujours en mouvement, cherchez-le en chemin.
Vous comprendrez que Jésus croit en vous plus que vous ne croyez en vous-mêmes. C’est important cela : Jésus croit en vous plus que vous ne croyez en vous-mêmes. Jésus vous aime plus que vous ne vous aimez vous-mêmes. Cherchez-le en sortant de vous-mêmes, en chemin : Lui, il vous attend. Formez un groupe, faites vous des amis, faites des marches, faites des rencontres, faites Eglise ainsi, ne marchant. L’Évangile est école de vie, l’Evangile nous conduit toujours au chemin. Je crois que c’est cela la façon de se préparer à écouter le Seigneur.
Et ensuite, tu entendras l’invitation du Seigneur à faire une chose ou une autre… Dans l’Evangile, on voit qu’il dit à l’un : « Suis-moi! ». A un autre il dit : « Va faire cela… » Le Seigneur te fera entendre ce qu’Il veut de toi, mais à condition que tu ne sois pas assis, que tu sois en chemin, que tu cherches les autres et que tu cherches à faire dialogue et communauté avec les autres, et surtout que tu pries. Pries avec tes mots: avec ce qui te vient au cœur. C’est la prière la plus belle. Jésus nous appelle toujours à avancer au large : ne te contente pas de regarder l’horizon depuis la plage! Jésus ne veut pas que tu restes sur le banc de touche, il t’invite à entrer sur le terrain. Il ne te veut pas dans les coulisses à espionner les autres ou dans les tribunes à commenter, mais sur scène. Prends des risques! Tu as peur de te ridiculiser? Fais-le, patience ! Nous l’avons tous fait tant de fois ! Perdre la face, ce n’est pas un drame dans la vie. Le drame de la vie c’est au contraire de ne pas faire face : voilà le drame. De ne pas donner la vie! Mieux vaut faire les beaux rêves en se ridiculisant que de devenir des retraités d’une vie tranquille – prendre du vendre, confortablement -. Il vaut mieux de bons idéalistes que des réalistes paresseux: mieux vaut être Don Quichotte que Sancho Panza!
Et une autre chose peut aussi vous aider, je l’ai dit en passant mais je veux le redire : faites des rêves en grand ! Rêver grand, en grand ! Parce que dans de grands rêves tu trouveras tant, tant de paroles du Seigneur qui est en train de te dire quelque chose.
Palerme, rencontre avec les jeunes, 15 sept. 2018 © Vatican Media

Palerme, rencontre avec les jeunes, 15 sept. 2018 © Vatican Media

Marcher, chercher, rêver… Un dernier verbe aide à écouter la voix du Seigneur, c’est servir, faire quelque chose pour les autres. Toujours pour les autres, pas replié sur toi-même, comme ceux qui s’appellent « je, moi, avec moi, pour moi » : ces personnes qui vivent pour elles-mêmes mais finissent comme le vinaigre, si mauvais…
La deuxième question. Voyons si j’ai écrit quelque chose… Vraiment votre île est le centre de rencontre de tant de cultures… Je ne connais pas la Sicile, c’est la première fois : je suis allé à Lampedusa et maintenant ici. Même votre langue, vos dialectes ont les racines de tant de langues, tant, parce qu’elle a été un carrefour de cultures et elles ont toutes laissé une trace culturelle. Vous êtes un peuple [fruit] de la rencontre de cultures et de personnes. J’ai aimé entendre cela, entendre dire par vous, de toi, que la Sicile est au centre de la Méditerranée, a toujours été une terre de rencontre. Il ne s’agit pas seulement d’une belle tradition culturelle, c’est un message de foi. Votre vocation sera certainement d’être de hommes et des femmes de rencontre. Rencontrer et faire se rencontrer, favoriser les rencontres, parce que le monde d’aujourd’hui est un monde d’affrontements, de guerres, d’affrontements… On ne comprend pas les gens… Et la foi se fonde sur la rencontre, une rencontre avec Dieu. Dieu ne nous a pas laissés seuls, Lui est descendu pour nous rencontrer. Lui vient à notre rencontre, Lui nous précède, pour nous rencontrer. La foi se fonde sur la rencontre. Et dans la rencontre entre nous, combien compte la dignité des autres ? Dieu veut que nous nous sauvions ensemble, pas tout seuls, que nous soyons heureux ensemble, pas tout seuls, égoïstement, que nous nous sauvions en tant que peuple. Ce mot, « peuple » : vous êtes un peuple avec une grande identité et vous devez être ouverts à tous les peuples qui, comme à d’autres époques, viennent chez vous. Par ce travail d’intégration, d’accueil, de respect de la dignité des autres, de solidarité… Pour nous, ce ne sont pas de bons propos de personnes bien élevées, mais les traits distinctifs du chrétien. Un chrétien qui n’est pas solidaire n’est pas chrétien. La solidarité est un trait du chrétien. Ce qui manque aujourd’hui, dont il y a « famine », c’est l’amour : pas l’amour sentimental, que l’on peut regarder à la télévision dans les romans, les séries, mais celui qui est concret, l’amour de l’Evangile. Et je vais vous dire, à toi et à tous ceux qui ont posé la question avec toi : comment va ton amour ? Comment va le thermomètre de ton amour ?
On est forts pour faire des distinctions, même justes et fines, mais parfois nous oublions la simplicité de la foi. Et que nous dit la foi ? « Dieu aime celui qui donne avec joie » (2 Co 9,7). Amour et joie : c’est cela l’accueil. Pour vivre, on ne peut pas faire que distinguer, souvent pour se justifier, il faut s’impliquer. Je le dis en dialecte ? En dialecte humain : il faut se mettre les mains dans le cambouis ! [1] Vous comprenez? Si vous n’êtes pas capables de vous mettre les mains dans le cambouis, vous ne serez jamais accueillants, vous ne penserez pas à l’autre, aux besoins d’autrui.
Chers jeunes, « la vie ne s’explique pas, elle se vit ! ». Laissons les explications pour après, mais vivre la vie ! La vie se vit. Ce n’est pas de moi, c’est un grand auteur de cette terre qui l’a dit [3]. Cela vaut encore plus pour la vie chrétienne. La première question à se poser, c’est : « Est-ce que je mets mes capacités, mes talents, tout ce que je sais faire, à disposition ? Est-ce que j’ai du temps pour les autres ? Est-ce que je suis accueillant pour les autres ? J’active un peu d’amour concret dans mes journées ? »
Nous sommes forts pour faire des distinctions, même justes, mais nous oublions parfois la simplicité de la foi: « Dieu aime ceux qui donnent avec joie » (2 Co 9,7). Dieu aime qui donne: vivre, on ne peut pas seulement distinguer, souvent se justifier; nous devons nous impliquer, nous dépenser pour les autres. « La vie ne peut pas être expliquée, nous vivons », a écrit un grand auteur de ces terres. C’est encore plus précieux pour la vie chrétienne. La première question à poser est la suivante: est-ce que je mets mes talents à ma disposition? Est-ce que j’ai du temps pour les autres? Actif un peu d’amour concret dans mes jours?
Palerme, rencontre avec les jeunes, 15 sept. 2018 © Vatican Media

Palerme, rencontre avec les jeunes, 15 sept. 2018 © Vatican Media

Aujourd’hui, tout semble connecté, mais en réalité, nous nous sentons trop isolés, distants. Maintenant, je vous fais réfléchir, chacun, à la solitude que vous avez dans el cœur : combien de fois ne vous trouvez-vous pas seuls avec cette tristesse, avec cette solitude ? Voilà le thermomètre qui t’indique la température de l’accueil, des mains dans le cambouis, du service des autres est trop basse. La tristesse est un indice du manque d’engagement et sans engagement, vous ne pourrez jamais être des bâtisseurs de l’avenir ! Vous devez être des bâtisseurs de l’avenir, l’avenir est entre vos mains ! Pensez-y bien : l’avenir est entre vos mains. Vous ne pouvez pas prendre le téléphone portable et appeler une entreprise qui vous fasse l’avenir : l’avenir, c’est à toi de le faire, avec tes mains, avec ton cœur, avec ton amour, avec tes passions, avec tes rêves. Avec les autres. Accueillant et au service des autres.
Nous avons besoin d’hommes et de femmes vrais, pas de personnes qui font semblant d’être des hommes et des femmes. D’hommes et de femmes vrais qui dénoncent les malversations et l’exploitation. N’ayez pas peur de dénoncer, de crier ! Nous avons besoin d’hommes te de femmes qui vivent des relations libres et libératrices, qui aiment les plus faibles et se passionnent pour la légalité, miroir d’honnêteté intérieure. Nous avons besoin d’hommes et de femmes qui font ce qu’ils disent – faire ce que tu dis – et qui disent non au gattopardisme [2] diffus. Faire ce que je veux promouvoir et pas donner un coup de pinceau et de peinture et ça va comme cela, non. La vie ne se fait pas à coup de pinceau et de peinture. La vie se fait dans l’engagement, dans la lutte, dans la dénonciation, dans la discussion, en mettant sa vie en jeu pour un idéal, dans els rêves… Faites cela, et ça ira. Etre accueillants signifie être soi-même, être au service des autres, mettre les mains dans le cambouis, et tout ce que j’ai dit. C’est d’accord ? Vraiment d’accord ?
Et maintenant, la dernière question. J’ai écrit quelque chose pendant que tu parlais : comme vivre le fait d’être jeune sur cette terre ? J’aime dire que vous êtes appelés à être des aubes de l’espérance. L’espérance jaillira à Palerme, en Sicile, en Italie, dans l’Église, à partir de vous. Vous avez dans le cœur et dans les mains la possibilité de faire naître et grandir l’espérance. Pour être des aubes de l’espérance, il faut se lever chaque matin avec un cœur jeune et plein d’espérance, en luttant pour ne pas se sentir vieux, ne pas céder à la logique de l’irrémédiable. C’est une logique perverse : cela ne va pas, rien ne change, tout est perdu… C’est une logique perverse, c’est le pessimisme, selon lequel il n’y a pas de salut pour cette terre, tout est fini. Non ! Non au fatalisme, non au pessimisme, oui à l’espérance chrétienne. Et vous avez entre vos mains la capacité à faire l’espérance, à promouvoir l’espérance. S’il vous plaît, non à la résignation ! Ecoutez bien : un jeune ne peut pas être résigné. Non à la résignation ! Tout peut changer. « Mais, Père, où dois-je appeler pour tout changer ? » A ton cœur, à tes rêves, à ta capacité d’homme, de femme, de promouvoir un fruit. De faire naître. Comme tu feras naître un fils ou une fille demain, de faire naître aussi une civilisation nouvelle, une civilisation accueillante, une civilisation fraternelle, une civilisation de l’amour. Tout peut changer.
Soyez des fils libres. Pendant que tu parlais, je pensais que nous sommes en train de vivre un temps de crise. C’est vrai. Nous le savons tous. Tant de crises différentes, mais le monde est en crise. Tant de petites guerres, mais le monde est en guerre. Tant de problèmes financiers, mais les jeunes sont sans travail… C’est un monde de crise. Un monde dans lequel nus pouvons aussi voir la désorientation qui te conduit à la crise. Le mot crise signifie qu’ils te font danser dans l’incertitude. Le mot crise dit que tu ne peux pas rester immobile parce que tout s’écroule, tout se perd. Quelles sont vos valeurs ?
J’ai parlé de votre espérance, de l’avenir : vous êtes l’espérance. J’ai parlé du présent : vous avez l’espérance entre vos mains, aujourd’hui. Mais je vous demande : dans ce temps de crise, vous avez des racines ? Que chacun réponde dans son cœur : « Quelles sont mes racines ? ». Ou tu les as perdues ? « Est-ce que je suis un jeune avec des racines, ou un jeune déjà déraciné ? » Auparavant j’ai parlé des jeunes dans leur fauteuil, de jeunes à la retraite, de jeunes tranquilles qui ne se mettent pas en route. Maintenant je te demande : es-tu un jeune avec des racines ou déraciné ? Nos avons parlé de cette terre qui a tant de culture : mais toi, tu es enraciné dans la culture de ton peuple ? Tu es enraciné dans les valeurs de ton peuple, dans les valeurs de ta famille ? ou tu es un peu dans l’air, un peu sans racines – excusé moi pour ce mot – un peu « gazeux », dans fondements, sans racines ? « Mais, Père où puis-je trouver des racines ? » Dans votre culture : vous trouverez beaucoup de racines ! Dans le dialogue avec les autres… Mais surtout – et je veux le souligner – parlez avec les vieux. Parlez avec les vieux. Ecoutez les vieux. « Père, ils disent toujours les mêmes choses ! ». Ecoutez-les. Disputez-vous avec les vieux, parce que si tu te disputes avec les vieux, ils parleront plus profondément et ils te diront des choses. Ils doivent te donner les racines, des racines qui ensuite – entre tes mains – produiront l’espérance qui fleurira dans l’avenir. Un poète disait : « Ce qui fleurit dans l’arbre vient de ce qu’il a dans le sol », des racines. Cherchez les racines.
Palerme, rencontre avec les jeunes, 15 sept. 2018 © Vatican Media

Palerme, rencontre avec les jeunes, 15 sept. 2018 © Vatican Media

Et si quelqu’un pense que les vieux sont ennuyeux, qu’ils répètent toujours les mêmes choses, je leur conseille : allez chez eux, faites-les parler, disputez-vous avec eux. Et ils commenceront à vous dire des choses intéressantes, qui vous donneront de la force, vous donneront de la force pour aller de l’avant. « Mais est-ce que je dois faire les mêmes choses qu’eux ? » Non ! Prenez d’eux la force, l’appartenance. Un jeune qui n’a pas d’appartenance dans une société, dans une famille, dans une culture, est un jeune sans identité, sans visage. En temps de crise nous devons rêver, nous devons nous mettre en chemin, nous devons servir les autres, nous devons être accueillants, nous devons être des jeunes de rencontre, nous devons être des jeunes avec l’espérance dans les mains, avec l’avenir dans les mains, et nous devons être des jeunes qui prennent des racines la capacité à faire fleurir l’espérance dans l’avenir. Je vous en prie, ne soyez pas déracinés, « gazeux », parce que sans racines vous n’aurez pas d’appartenance et vous n’aurez pas d’identité.
J’aime vous voir ici, dans l’Eglise, porteurs joyeux d’espérance, de l’espérance de Jésus qui dépasse le péché. Je ne vous dirai pas que vous être des saints, non. Vous êtes des pécheurs, tous, comme moi, comme tous. Mais c’est la force de Jésus qui dépasse le péché, et t’aide à aller de l’avant ; L’espérance qui dépasse la mort. Rêvons et vivons la culture de l’espérance, la culture de la joie, la culture de l’appartenance à un peuple, à une famille, la culture qui sait prendre des racines la force de fleurir et de porter du fruit. Merci beaucoup de votre écoute, de votre patience… Vous êtes debout… Excusez-moi, je vous ai parlé assis, mais les chevilles me faisaient tellement mal à cette heure-ci ! Merci. Et n’oubliez pas : racines, le présent dans vos mains, et travailler pour l’espérance de l’avenir, pour avoir appartenance et identité. Merci !
Maintenant je voudrais vous donner la bénédiction. Je sais que parmi vous il y a es jeunes catholiques, chrétiens, d’autre traditions religieuse, et aussi certains agnostiques. C’est pour cela que je donnerai la bénédiction à tous, et je demanderai à Dieu qu’il bénisse cette semence d’inquiétude qui est dans votre cœur.
Seigneur, Seigneur Dieu, regarde ces jeunes. Tu connais chacun d’eux, Tu sais ce qu’ils pensent, Tu sais qu’ils ont envie d’avancer, de faire un monde meilleur. Seigneur, fais d’eux des chercheurs du bien et du bonheur ; rends-les actifs en chemin et dans la rencontre avec les autres ; rend-les audacieux dans le service ; rends-les humbles dans leur recherche de racines et fais-leur porter du fruit, avoir une identité, avoir une appartenance. Que le Seigneur, que le Seigneur Dieu accompagne tous ces jeunes sur le chemin et qu’il les bénisse tous. Amen.
 
© Traduction de ZENIT, Anita Bourdin
***
[1] Mot à mot « se salir les mains ». Mais cela a une connotation d’immoralité en français, alors que l’italien veut plutôt dire simplement : « se retrousser les manches ».
[2] Gattopardisme : promouvoir des changements spectaculaires pour en fait préserver le statu quo. Du film « Le guépard ».
[3] Probablement Luigi Pirandello (+1936), originaire d’Agrigente, Nobel de littérature.

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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