« Il est important que le Pacte mondial sur les réfugiés conserve une nature non politisée et ne devienne pas un terrain de chasse pour des intérêts concurrents », avertit Mgr Jurkovic. Ainsi, dans le sous-secteur concernant la santé, où le projet fait référence aux « États et parties prenantes », le représentant du Saint-Siège fait observer que la note de bas de page « ne concerne que certains organismes intergouvernementaux, ignorant beaucoup d’autres acteurs importants »
Mgr Ivan Jurkovic, nonce apostolique, observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève, est intervenu lors de la sixième consultation officielle sur un Pacte mondial pour les réfugiés, intitulée : Programme d’action – Partie III.B « Zones nécessitant un soutien », à Genève, le 4 juillet 2018.
La délégation du Saint-Siège est aussi « préoccupée » par une résolution sur la santé des réfugiés et des migrants qui « appelle à la priorisation d’un “ensemble de services initiaux minimaux” qui n’a pas été négocié par les États et n’est pas basé sur le droit international des réfugiés ».
Voici notre traduction de la déclaration de Mgr Jurkovic.
HG
Déclaration de Mgr Jurkovic
Merci, Monsieur le Président.
Nous sommes reconnaissants aux autres délégations d’avoir partagé leurs points de vue et leurs préoccupations de manière respectueuse. Ma délégation souhaite également fournir quelques commentaires et considérations supplémentaires sur la partie III.B du Règlement.
La Délégation du Saint-Siège insiste à nouveau sur l’importance de maintenir une approche holistique et intégrée mettant l’accent sur la centralité de la personne humaine, véritablement capable d’améliorer la vie de millions de réfugiés et de communautés d’accueil. À cet égard, nous apprécions l’accent mis sur l’éducation, la santé et la promotion d’un travail décent. Nous nous félicitons également de la référence au soutien au développement d’alternatives à la détention, rappelant que la détention ne peut jamais être dans le meilleur intérêt de l’enfant.
Monsieur le Président,
Le Saint-Siège connaît les risques particuliers auxquels les femmes et les enfants sont confrontés dans le contexte des urgences humanitaires et leurs besoins spécifiques et intégraux en matière d’accès aux soins de santé de base. Afin d’avoir un impact puissant, il est important que le PMR conserve une nature non politisée et ne devienne pas un terrain de chasse pour des intérêts concurrents.
À cet égard, alors que, dans la sous-section 2.3 « Santé », au début du paragraphe 72, le projet fait référence aux « États et parties prenantes », la note de bas de page 32 ne concerne que certains organismes intergouvernementaux, ignorant beaucoup d’autres acteurs importants.
En outre, nous sommes préoccupés par la référence à WHA.70.15 (2017) dans la même note de bas de page. En effet, cette résolution fait référence au fameux « cadre des priorités et des principes directeurs pour promouvoir la santé des réfugiés et des migrants », qui appelle à la priorisation d’un « ensemble de services initiaux minimaux » qui n’a pas été négocié par les États et n’est pas basé sur le droit international des réfugiés.
Cette délégation souhaite réitérer la nécessité de veiller à ce que les besoins de santé des personnes touchées par le déplacement forcé soient pris en compte dans les politiques gouvernementales plus larges, y compris l’engagement et la coordination avec d’autres secteurs, la société civile, le secteur privé et les associations de réfugiés ainsi que les populations affectées elles-mêmes, pour trouver des solutions conjointes bénéfiques pour la santé des réfugiés.
Pour ces raisons, afin d’accorder une attention plus objective et plus complète au processus de rédaction et d’assurer une approche pangouvernementale et pansociétale, nous suggérons de supprimer la note de bas de page 32 et de reformuler ainsi le texte dès le début : « Conformément aux lois, politiques et plans nationaux en matière de soins de santé, et à l’appui des pays hôtes, les États et les parties prenantes concernées, y compris les organisations intergouvernementales et la société civile, apporteront des ressources et une expertise [..] ».
Au paragraphe 73, axé sur la nécessité d’accéder à un large éventail d’interventions et de ressources diagnostiques, thérapeutiques et de promotion de la santé, nous suggérons que la référence aux « produits préventifs » soit élargie aux « produits » en général, supprimant ainsi le mot « préventif » étant donné que de nombreuses personnes touchées par un déplacement forcé ont aussi besoin de dispositifs d’assistance, y compris ceux qui traitent un large éventail de handicaps physiques.
Monsieur le Président,
Cette délégation est heureuse de voir la modification de la sous-section 2.10, intitulée maintenant « Favoriser de bonnes relations et la coexistence pacifique ». De même, nous souhaitons réaffirmer notre soutien à ces références, telles qu’elles figurent au paragraphe 95, à « l’accès au regroupement familial », aux « programmes de parrainage privés ou communautaires », aux « visas humanitaires » et aux « couloirs humanitaires », ainsi qu’aux « bourses d’études et visas d’étudiants » comme voies complémentaires d’admission dans les pays tiers.
Enfin, cette délégation souhaite se faire l’écho des paroles du pape François pour la Journée mondiale du réfugié, exprimée il y a quelques jours, exprimant l’espoir de « parvenir à un accord pour assurer, avec responsabilité et humanité, assistance et protection à ceux qui sont obligés de quitter leur propre pays » et de rappeler que « chacun de nous est aussi appelé à être proche des réfugiés, à trouver des moments de rencontre avec eux, à apprécier leur contribution, afin qu’ils soient eux aussi mieux intégrés dans les communautés qui les reçoivent » (1).
Je vous remercie.
1. Pape François, Discours Angelus, 17 juin 2018.
https://w2.vatican.va/content/francesco/fr/angelus/2018/documents/papa-francesco_angelus_20180617.html
© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat
Messe pour la Journée mondiale du migrant et du réfugié @Vatican Media
ONU: le Saint-Siège rappelle la «nature non politisée» du Pacte mondial sur les réfugiés (traduction complète)
Santé des réfugiés et des migrants: un recadrage