Le sénat italien a adopté la loi sur le “biotestament”, rapporte L’Osservatore Romano en italien du 16 décembre 2017, par 180 voix favorables et 71 contraires, et 6 abstentions: il s’agit d’une loi “sur les normes en matière de consentement informé et de dispositions anticipées de traitement”. Elle réprouve notamment “l’acharnement thérapeutique”. Elle avait été approuvée par les députés en avril dernier. La Conférence épiscopale insiste notamment sur l’objection de conscience du médecin ou des structures catholiques.
La loi est “controversée” souligne L’Osservatore Romano: certains parlementaires estiment qu’elle ouvre la porte à l’euthanasie. Selon les dispositions de ce “testament” indiquant le refus ou l’acceptation des soins, le médecin est tenu de respecter la volonté du patient, ce qui exempte le médecin “de toute responsabilité civile ou pénale”, explique le quotidien du Vatican.
L’objection de conscience
Garantir au médecin l’objection de conscience, éviter que le « non » à l’acharnement thérapeutique empiète sur l’euthanasie en renonçant à l’hydratation et l’alimentation, éviter de faire du malade un « rebut » : le cardinal italien Gualtiero Bassetti, interrogé par Radio Vatican en italien commentait ainsi les paroles du pape dans son message pour la Journée Mondiale du Malade 2018, publié le 11 décembre, à la veille du vote italien.
Les paroles du pape François sur la fin de vie « s’inscrivent dans le sillage de la sollicitude de l’Eglise, qui s’est toujours caractérisée par une contribution à rendre la condition du vivant qui meurt ou du mourant qui vit la plus humaine possible », a insisté le cardinal Bassetti : « Il ne s’agit certes pas de renoncer à des gestes essentiels comme « nourrir », « hydrater » et « prendre soin de l’hygiène » de la personne.
En tant que Conférence épiscopale, a ajouté l’archevêque de Pérouse, et président de la conférence épiscopale italienne, « nous avons également à cœur qu’en plus de la possibilité pour chaque médecin d’avoir recours à l’objection (de conscience), soit reconnue celle qui concerne nos structures sanitaires », d’autant plus que ce « n’est pas toujours facile d’établir à priori une frontière nette entre l’acharnement thérapeutique et l’euthanasie ». Il devient donc nécessaire, a-t-il dit, de « considérer ensemble la volonté du patient et le respect de la conscience et de la compétence du médecin ».
Accompagnement responsable
Face au risque de réduire la santé à une entreprise, le cardinal italien reprend « les mots du Saint-Père il y a quelques jours à l’académie pour la vie, quand il a souligné que « l’accompagnement responsable de la vie humaine depuis sa conception et pendant tout son cours jusqu’à la fin naturelle est un travail de discernement et d’intelligence, d’intelligence d’amour pour les hommes et les femmes libres et passionnées, et pour des pasteurs et non des mercenaires ».
Il évoque l’attitude du Bon Samaritain: « Ce risque de l’entreprenariat est un risque que vous surmontez quand vous savez tenir les yeux et le cœur ouverts devant le visage de la personne souffrante. Ce n’est pas par hasard si le pape a fait une référence explicite à la parabole évangélique du Bon samaritain, rappelant que pour l’Eglise « ne jamais abandonner le malade est un impératif catégorique ». Le samaritain voit et se laisse impliquer profondément, mettant en œuvre toutes ses ressources pour venir à l’encontre de l’homme blessé. Ce qui est bien diffèrent que de se tourner de l’autre côté comme font le prêtre et le lévite … »
Il souligne que les paroles du pape François « s’inscrivent dans le sillage de la sollicitude de l’Eglise vis-à-vis de l’homme, une sollicitude qui s’est toujours caractérisée par sa contribution à rendre la condition du vivant qui meurt ou du mourant qui vit la plus humaine possible ».
Pour la distinction entre acharnement thérapeutique et euthanasie, il reconnaît qu’il n’est « pas toujours facile d’établir a priori une frontière nette », ce qui rend « nécessaire d’établir à qui revient de prendre des décisions dans ces situations dramatiques, en considérant ensemble la volonté du patient et le respect de la conscience et de la compétence du médecin ».
Pour le développement des soins palliatifs
Le mot clef c’est le discernement: « Le cœur du discernement réside, donc, dans la relation spéciale qui unit le malade et le médecin et la juste proportionnalité des soins, qui ne peut et ne doit jamais donner lieu à cette culture du rebut dénoncée avec force par le Saint-Père. »
Le cardinal Bassetti a encouragé le développement des soins palliatifs: « Le moment avant de mourir met l’être humain en contact avec les limites de sa propre existence : il expérimente la fragilité et le besoin de s’en remettre à l’autre, y compris à cet Autre par excellence qu’est le Seigneur. Cette situation demande une proximité de soins et d’affection, fait apparaître l’importance des soins palliatifs pour améliorer la qualité de la vie des patients incurables, rendant plus « supportable la souffrance dans la phase finale de la maladie » et garantissant « au patient un accompagnement humain adéquat » (Evangelium vitae 65). En même temps, cette situation amène à refuser des thérapies disproportionnées par rapport aux conditions du patient et à ses perspectives d’amélioration. Il ne s’agit pas par-là de renoncer à ces gestes essentiels comme « nourrir », « hydrater », « soigner l’hygiène » de la personne. Nous, évêques italiens, nous avons également à cœur – outre la possibilité à l’objection de conscience de chaque médecin – celle qui concerne nos structures sanitaires. »
Avec une traduction d’Océane Le Gall
Cardinal Gualtiero Bassetti, Capture
Italie: pour l'objection de conscience des médecins et des structures catholiques
Le sénat adopte une loi sur le « biotestament »