« Remercions le Seigneur qui nous a donné la capacité de soutenir nos fidèles dans ces rudes et difficiles circonstances », écrit Mgr Jean-Clément Jeanbart, archevêque catholique melkite d’Alep, dans cette lettre publiée en arabe et que L’Œuvre d’Orient publie en français.
Lettre de Mgr Jeanbart
Mes bien chers frères,
Remercions le Seigneur de nous avoir gardés vivants dans notre pays. Il nous a préservés des dangers et de l’humiliation de l’émigration, de l’exil loin de notre chère patrie. Grâce à Sa Providence, nous sommes aujourd’hui sains et saufs et espérons la paix à venir avec foi et confiance. Nous entrevoyons déjà le retour à la vie normale dans notre chère ville, Alep, où nous pouvons trouver pour nous et nos familles le bien-être et la joie d’une vie sereine et tranquille au milieu de nos proches et de nos amis.
Remercions le Seigneur pour l’arrêt de la violence et des affrontements entre les Syriens qui vient tout juste de commencer, pour donner lieu au dialogue et à la réconciliation entre les frères, habitants du même pays, dialogue qui actuellement, progresse d’une manière sensible. Notre espoir est grand que cet arrêt des combats perdurera jusqu’à l’aboutissement à une entente entre les belligérants et à une réconciliation nationale qui permettra aux gens de vivre ensemble en harmonie et en amitié.
Remercions le Seigneur maintenant que les grandes nations ont accepté de changer de position et de suivre une politique de pacification face aux affrontements en Syrie : elles soutiennent aujourd’hui la conférence de Genève 3, qui nous l’espérons, sera couronnée de succès et nous conduira vers la paix tant espérée, après tout ce que nous avons enduré durant ces longues années, des horreurs de cette guerre sale et destructrice.
Remercions le Seigneur qui nous a donné la capacité de soutenir nos fidèles dans ces rudes et difficiles circonstances qui ont affecté beaucoup d’entre eux, surtout ceux dont les vivres ont manqué à cause de la destruction des sources de leur revenu. Nous espérons, avec son aide divine, pouvoir continuer à leur procurer le support qui leur est nécessaire pour faire face aux difficultés de la vie quotidienne jusqu’à la fin de cette horrible guerre.
Remercions le Seigneur d’avoir raffermi la bonne volonté de nombre de nos fidèles et de leur avoir donné la patience nécessaire pour supporter leurs malheurs et faire face à tant de défis. Ils ont continué à vivre dans leur ville chérie, qui est aussi celle de leurs ancêtres, Alep, joyau de l’Orient et de l’Occident. Ils ont sauvé leurs familles de l’exil et des épreuves à endurer dans des pays lointains, et ont conservé en cela la grâce de rester et de continuer leur enracinement dans la terre de leurs aïeux et de leurs pères, si chère et si précieuse. Les jours rayonnants de douceur qui s’annoncent, leur feront sûrement oublier l’hiver obscur avec ses nuages et son froid glacial, qu’ils ont su supporter, soutenus par la divine providence et raffermis par un amour profond pour leur patrie bien-aimée et pour la terre bénie de leur pays, si généreuse envers ses citoyens et ses amis bienveillants.
N’y aurait-il pas lieu d’entonner ici, ce bel hymne de nos « grandes complies » en gage de reconnaissance à la divine providence qui accompagne toujours les croyants : « Nous, qui marchons sur les sentiers de la mort et de ses ténèbres, une lumière nous est apparue parce que Dieu est avec nous. »
Oui, mes chers amis, une nouvelle lumière rayonne chez nous, lumière d’une paix tant attendue et d’une sécurité tant souhaitée, lumière qui va éclairer le chemin du retour des expatriés dans leur pays, des réfugiés dans leurs maisons, et des ouvriers à leurs labeurs. Nous attendons ce retour et nous nous préparons pour subvenir à tous ses besoins et à tout ce qui pourra faciliter son accomplissement de la façon la meilleure.
Nous venons de lancer un mouvement prénommé « Bâtir pour Rester », qui a déjà commencé à offrir différents services en vue d’aider les personnes préjudiciées, à restaurer leurs maisons, leurs magasins et leurs ateliers. Ce mouvement a ouvert dernièrement un centre de formation professionnelle, et il est en voie de lancer différents projets de développement, de construction et de services sociaux, qui permettront à nos fidèles d’entreprendre des métiers rentables et utiles pour eux-mêmes et pour ceux qui les entourent. Éventuellement, nous n’aurions aucune réticence à ce que ce mouvement puisse lancer un nouveau projet pour venir en aide à ceux qui désirent retourner dans leur ville bien-aimée et que nous appellerions « Projet Retour ».
Nous avons lutté auparavant pour rester sur le sol de notre chère patrie, et avons persévéré avec l’aide du Seigneur, malgré le terrorisme et ses violences, malgré tous les obstacles et toutes les difficultés de la vie quotidienne qui ont porté atteinte à notre gagne-pain, à nos habitations, à notre sécurité. Nous avons résisté à l’assaut d’une campagne médiatique sauvage et à une propagande malicieuse qui nous harcelaient jour après jour. A présent, et après l’apaisement de cette tempête, nous nous trouvons face à un nouveau défi, celui de l’édification d’un pays moderne, et de la construction d’une ville nouvelle ; défi qui emplit nos cœurs de joie et d’enthousiasme, et invite nos jeunes et nos anciens à aller de l’avant dans le chantier de l’action et de la reconstruction. Le mouvement « Bâtir pour Rester » sera présent aux côtés de chaque combattant qui aime son pays et qui veut se donner généreusement à la tâche de sa reconstruction pour permettre à ses concitoyens et à tous les siens d’y vivre dignement sous les regards du Seigneur, que nous louons et remercions en tous temps, aujourd’hui, demain et à tout jamais !
Alep, le 16 mars 2016
Métropolite J.-C. JEANBART
Archevêque d’Alep
Mgr Jean-Clément Jeanbart - Romasette
Syrie: «Nous sommes sains et saufs et nous espérons la paix à venir», par Mgr Jeanbart
Lettre aux chrétiens d’Alep, publiée en arabe