« Le dialogue théologique entre juifs et catholiques doit recevoir de nouvelles impulsions », explique le P. Norbert Hofmann.
Les dons et l’appel de Dieu sont irrévocables (Romains 11, 29) : c’est le titre d’un nouveau document de la Commission pontificale pour les rapports religieux avec le judaïsme élaboré pour marquer le 50e anniversaire de la Déclaration conciliaire Nostra ӕtate et publié ce 10 décembre.
Le document a été présenté par le cardinal Kurt Koch, président de la Commission pontificale pour les rapports religieux avec le judaïsme ; par le P. Norbert Hofmann, S.D.B., secrétaire de ce même dicastère ; par le rabbin David Rosen, directeur international des Affaires interreligieuses de l’American Jewish Committee (AJC), de Jérusalem (Israël) et par le Prof. Edward Kessler, directeur fondateur de l’Institut Woolf, de Cambridge (Royaume-Uni).
« Notre souhait est que les théologiens catholiques engagés depuis longtemps dans le dialogue judéo-chrétien accueillent et développent ultérieurement les réflexions contenues dans ce document », déclare le P. Hofmann qui souligne que le document a aussi été élaboré en consultant des autorités juives pour les passages qui concernent le judaïsme.
Voici notre traduction complète, de l’italien, de la présentation du P. Hofmann.
A.B.
Intervention du P. Hoffman
Déjà, pour le 40e anniversaire de la promulgation de la Déclaration conciliaire « Nostra aetate » on avait pensé à l’origine de publier un document de la Commission du Saint-Siège pour les rapports religieux avec le judaïsme. Pour différentes raisons, cela n’a pas été possible en 2005. En y réfléchissant rétrospectivement, nous pouvons dire que c’était mieux d’attendre jusqu’à aujourd’hui, puisque les questions théologiques présentes dans le document actuel ont été discutées de façon détaillée et passionnée surtout ces dix dernières années.
Le document n’entend absolument pas mettre un point final à ces discussions. Il veut plutôt être un stimulant pour la poursuite et l’approfondissement de la dimension théologique du dialogue judéo-chrétien. La Commission pour les rapports religieux avec le judaïsme renvoie à l’objectif que le pape François lui-même s’est fixé, c’est-à-dire de faire en sorte que le dialogue judéo-chrétien acquière plus de profondeur et d’ampleur, du point de vue théologique. Voilà aussi un des motifs principaux pour lesquels ce document est publié en ce moment : le dialogue théologique entre juifs et catholiques doit recevoir de nouvelles impulsions.
Notre souhait est que les théologiens catholiques engagés depuis longtemps dans le dialogue judéo-chrétien accueillent et développent ultérieurement les réflexions contenues dans ce document. En effet, le document s’adresse en premier à tous ceux qui sont actifs dans ce dialogue. Cependant, il peut être aussi utile à qui s’intéresse, de façon plus générale, aux relations judéo-catholiques.
Le document a été élaboré non seulement sur la base des affirmations de foi catholiques, mais en tenant aussi compte des positions de nos partenaires dans le dialogue. A un certain point de la rédaction du document, des consulteurs juifs ont été également impliqués, et il leur a été demandé leur avis sur le caractère adéquat de ce qui était exposé sur le judaïsme. On trouve dans le texte non seulement des références à l’Ancien et au Nouveau Testament, mais aussi à la Mishna et au Talmud. La rédaction du document a duré en tout deux ans et demi, puisque les premières ébauches remontent à 2013. Le pape Benoît XVI déjà s’était dit favorable à la rédaction d’un semblable document mais ce n’est qu’avec l’avis favorable du pape François, exprimé peu après son élection que le travail a pu commencer.
Il y a eu dès le début une étroite collaboration avec la Congrégation pour la Doctrine de la foi, qui, naturellement, est toujours interpelée quand il s’agit de textes théologiques du Vatican. A ce sujet, nous désirons remercier de tout cœur Son Eminence le cardinal Gerhard Müller et ses collaborateurs pour leur compétence et pour leur disponibilité dans ce travail commun.
Le cardinal Koch, le cardinal Müller et moi-même étant de langue maternelle allemande, la première ébauche du document a été élaborée en allemand.
Un petit groupe de quatre personnes – deux représentant notre Commission pour les rapports religieux avec le judaïsme, et deux représentants de la Congrégation pour la doctrine de la foi – ont préparé la première version du document, avant qu’il ne soit traduit en anglais. Le texte a été lu par les deux cardinaux qui ont proposé certaines modifications, une consultation internationale de consulteurs de la Commission pour les rapports religieux avec le judaïsme a ensuite été organisée. Sur la base du texte anglais, les consulteurs ont avancé des suggestions pour améliorer le document. A la lumière de ces observations, le texte a été modifié et envoyé à la Congrégation pour la doctrine de la foi, qui a à son tour interpelé ses propres consulteurs. La version anglaise du document a été à nouveau modifiée en tenant compte de ces suggestions. Cela signifie que le document est le résultat d’un travail collectif, auquel ont contribué de nombreuses personnes compétentes. Envers toutes, nous sommes sincèrement reconnaissants.
Après le « nihil obstat » accordé, en septembre 2015, par la Congrégation pour la doctrine de la foi, le texte a été présenté à la Secrétairerie d’Etat qui, peu après, en octobre 2015, donnait le feu vert à la publication.
En décembre 2014, le pape François avait déjà donné son avis favorable à la publication d’un document de la Commission pour les rapports religieux avec le judaïsme, pour le 50e anniversaire de la promulgation de “Nostra aetate” (n. 4).
Le jour précis de la commémoration de “Nostra aetate” a été le 28 octobre dernier, jour où, il y a cinquante ans, la Déclaration a été promulguée par le concile Vatican II. Ce même jour, le pape François a consacré l’audience générale à la Déclaration conciliaire. Dès le début, il avait été décidé de ne pas publier ce document – qui est le quatrième document de la Commission pour les rapports religieux avec le judaïsme – dans le cadre des célébrations du 28 octobre dernier, mais de lui réserver un moment à part, distinct. La première date possible était celle d’aujourd’hui, 10 décembre, étant donné qu’au mois de novembre on était encore en train d’achever les traductions du texte. Comme on l’a déjà dit, le texte original est en anglais, mais des versions sont disponibles également en italien, en français, en espagnol et en allemand.
Nous avons invité aujourd’hui, à la présentation du document, deux amis juifs qui ont été impliqués aussi dans le processus de préparation du texte : le Rabbin David Rosen, de Jérusalem, de l’American Jewish Committee, et le Prof. Edward Kessler, de Cambridge, du Woolf Institute. Le fait que des représentants du judaïsme avec lesquels nous menons le dialogue judéo-catholique soient aussi présents à la présentation de ce document me paraît un signe éloquent et positif. L’opinion publique sera sûrement intéressée de savoir comment nos interlocuteurs juifs accueillent le document.
Naturellement, et je tiens à le répéter, la Déclaration présente est un texte catholique, formulé depuis une perspective catholique, puisqu’il est normal qu’en tant que chrétiens, croyants, nous affirmions notre identité de foi de fa
çon claire aussi dans le dialogue avec le judaïsme, comme nous attendons que le fassent nos partenaires juifs dans le dialogue. Ce n’est qu’ainsi que le respect réciproque et que l’appréciation mutuelle pourront grandir, ce n’est qu’ainsi que nous pourrons nous connaître toujours mieux et devenir ensemble une bénédiction pour les autres.
© Traduction de Zenit, Anita Bourdin