Mobilisation pour Asia Bibi (2/2): la conscience de l'Europe interpellée

L’arme efficace des sanctions économiques

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L’Europe doit se mobiliser pour Asia Bibi et des sanctions économiques doivent pousser le Pakistan sur la voie du respect des droits humains : c’est l’appel lancé par des Parlementaires et des ONG d’Italie qui ont organisé la rencontre de ce mardi 14 avril à « Montecitorio », le siège du Parlement. Une conférence de presse intitulée « Liberté pour Asia Bibi » et modérée par Marta Petrosillo.

Nous avons publié le 15 avril le premier volet de notre reportage sur cette mobilisation pour sauver Asia Bibi: le mari d’Asi Bibi et ne de leurs filles, ainsi qu’un des avocats, ont participé à l’audience générale du pape François, place Saint-Pierre.

Ashiq Masih, une de ses filles, Eisham Ashiq, ainsi que l’avocat, Joseph Nadeem, sont venus plaider la cause d’Asi Bibi à Rome espérant, grâce à une tournée européenne qui le conduira, après Paris également à Madrid et à Berlin, mobiliser l’opinion publique européenne et le Parlement européen.

Pour Paola Binetti, sénatrice et maintenant députée, une des chevilles ouvrières de la rencontre, c’est une « mobilisation transversale » indépendamment des couleurs politiques.

Plus de temps à perdre

Le sénateur Salvatore Di Maggio souligne que ce n’est pas seulement une question de religion, mais de liberté et il en appelle à une prise de position de tout le Parlement et des Institutions : « Il est temps d’agir et de secouer l’indifférence ! », dit-il. Il dénonce comme « surréaliste » cette condamnation à mort partie d’un « verre d’eau ».

Pour lui, la question n’est pas simplement religieuse, ce qui est en jeu c’est la « civilisation », ce qui doit susciter un « engagement » de la communauté nationale italienne, et du gouvernement italien et de la communauté internationale, spécialement en Europe : « L’Europe ne peut échapper à cet engagement », spécialement quand il n’y a plus de liberté et qu’une vie est en danger. Il rappelle ceux qui sont mort pour avoir défendu Asia Bibi publiquement.

Pour le sénateur italien « il n’y a plus de temps à perdre » : le Parlement doit se sentir interpellé.

Le Sous-Secrétaire italien à la Défense le général Domenico Rossi était promoteur de l’initiative ainsi que le sénateur Mario Mauro qui a adressé un message vidéo aux participants de la rencontre.

Pour lui, la démocratie est en jeu : « Quand il n’y a pas de liberté de religion, il n’y a pas de démocratie ni les autres libertés. La liberté religieuse qualifie notre politique. Ce n’est pas « plaider pour notre paroisse », mais pour la « coexistence humaine », sinon, on laisse la place au conflit et à la barbarie ».

Il s’agit de « combattre la barbarie » et pour cela de « prévenir les conflits ».

Il déplore aussi la notion de « crime de blasphème » et il invoque le recours à la « raison » pour « construire un monde meilleur ».

Les pressions économiques nécessaires

Pour le député Rocco Buttiglione, « quand la liberté est piétinée de façon brutale, ce qui est en question c’est la dignité de chacun ». Il déplore que les chrétiens d’Occident se soient montrés « peu solidaires » et il invite à « reconnaître notre manquement » : « On ne peut pas accepter cette barbarie de notre époque ! »

Il souhaite une « motion du Parlement italien et du Parlement européen » et que l’on joue sur les rapports diplomatiques et commerciaux : « On ne peut faire affaire avec le Pakistan tant qu’il n’y a pas un tournant dans le domaine des droits humains. »

« Le gouvernement pakistanais doit donner une garantie du respect des droits humains avec la mise en liberté d’Asia Bibi », demande le sénateur.

Il ajoute que « le refus d’agir ainsi ne sera pas sans conséquence économiques et commerciales » : ce serait « un développement inhumain ».

De fait, le maintien du moratoire sur la peine de mort (8 000 condamnations) avait jusqu’ici permis au Pakistan d’accéder au statut de GSP Plus le “Système de préférences généralisées Plus” de l’Union européenne, son premier partenaire économique, ce qui lui permettait d’exporter de nombreux produits sans barrière douanière, notamment dans le textile, qui représente plus de la moitié des exportations pakistanaises: des ventes évaluées à quelque dix milliards d’euro en 2014.

Le député voit dans la situation d’Asia Bibi, qui risque la mort depuis 5 ans, et dans l’angoisse de sa famille, une « ombre sur la liberté religieuse au Pakistan ».

A la famille d’Asia Bibi il adresse cet encouragement : « Merci de votre témoignage. Nous restons proches de vous. »

Mobilisation des ONG

C’est l’association « CitizenGo » qui a invité l’avocat et la famille d’Asia Bibi en Europe pour cette mobilisation de l’opinion publique. Son président, Ignacio Arsuga, a exprimé, en espagnol, ses remerciements au Parlement italien pour son « engagement pour la liberté religieuse » et pour l’accueil de la rencontre au siège de l’institution qui « représente la souveraineté nationale » : « Ce que nous demandons, c’est la fin de la persécution des chrétiens et en particulier en Irak, en Syrie, en Egypte, au Pakistan ». Il a appelé à la mobilisation et au témoignage des chrétiens « pour que nos gouvernements prennent des mesures efficaces pour se scandaliser beaucoup plus ! »

Sara Fumagalli a proposé des images des zones de Lahore touchées par l’incendie de plus de 170 maisons de chrétiens après une fausse accusation de blasphème.

Elle a évoqué, dans ce pays de 190 millions d’habitants, une « pression populaire très forte sur l’appareil administratif qui fait que la police et les juges se sentent menacés et acceptent des sentences injustes par peur d’être eux-mêmes condamnés pour blasphème ».

Elle souligne la mobilisation de l’association des « Pakistanais chrétiens en Italie » spécialement depuis 2011 pour la libération et la protection d’Asia Bibi et l’abolition de la loi sur le blasphème.

Elle rappelle l’importance de la prière mais aussi maintenant des « faits », à partir d’une réflexion sur « la liberté d’expression et ses limites », pour que « la mondialisation ne soit pas seulement une mondialisation de la violence ».

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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