Résumé des épisodes précédents : la première fois qu’un Pape a prononcé en public le mot Big Bang, c’était le 27 octobre dernier (2014). Depuis quelques semaines nous faisons une petite enquête pour connaître l’histoire de cette découverte et savoir d’où vient ce mot, qui l’a inventé ?…(1)

En mai 1965, les deux ingénieurs Penzias et Wilson ont compris qu’ils avaient capté sans le savoir, la trace des premiers instants de notre Univers. On pourrait dire qu’ils ont capté ce rayonnement électromagnétique « par hasard », dans la mesure où ils n’ont rien fait pour le trouver. Au contraire, ils cherchaient même à se débarrasser de cette pénible interférence…
Mais avec une le type d’antenne géante que leurs employeurs, les patrons des téléphones Bell, les avaient chargés de faire fonctionner, ils ne pouvaient pas manquer de capter tôt ou tard ce « rayonnement fossile ». Un rayonnement ténu, certes, mais partout présent dans l’Univers, comme le leur a expliqué le professeur Dicke, qui, après 15 années de recherche avec son équipe de Princeton, allait bientôt pouvoir, lui aussi, enregistrer cet indice si précieux pour comprendre notre monde. En effet, ils ont détecté sur leurs appareils, ce qu’il reste des formidables chaleur et énergie des débuts de l’expansion considérable qui se déploie depuis les 13,81 milliards d’années d’existence de l’Univers…
Le temps et l’expansion ont dilué cette puissance d’origine, mais on peut encore la percevoir sous forme de micro-ondes, partout dans l’Univers.

Nos ingénieurs venaient de toucher du doigt un indice incontournable dans l’enquête cherchant à répondre à une vieille question que l’humanité se pose depuis l’Antiquité: notre Univers a-t-il eu un commencement ou bien, est-il éternel ?
Comme avant 1965, personne n’avait les moyens de connaitre la vraie réponse à cette question, chaque philosophie et religion prétendait apporter la bonne réponse. Il y avait donc un débat.

Il est clair que cette découverte du « Big Bang » n’allait pas plaire à tout le monde, car elle apportait, si ce n’est une preuve, du moins, des indices sérieux, sur le fait que l’Univers ne serait donc pas du tout éternel. Idée qui rappelait beaucoup trop les vieux textes bibliques aux yeux de beaucoup. Cette représentation du monde s’opposait radicalement aux interprétations majoritaires dans la communauté scientifique des années 1960 où les philosophies dominantes étaient le matérialisme ou le spinozisme, mais certainement pas le judéo christianisme biblique!

Il faut savoir que cette croyance en un Univers éternel était un des fondements de l’un des courants de pensée les plus élaborés de l’Antiquité. Le postulat fondamental de l’athéisme matérialiste qui nous vient des philosophes Parménide, Leucippe et Démocrite, Epicure et Lucrèce (2). Il repose sur une idée très claire : les atomes ont toujours existé, puisqu’ils n’ont pas pu sortir du néant et qu’ils n’ont été créés par aucun dieu. Les atomes sont donc éternels. Donc l’Univers lui-même est éternel, soit sous sa forme actuelle de « Cosmos », soit sous sa forme primordiale de « Chaos ». Quoiqu’il en soit, Démocrite affirme que l’on passe du Chaos au Cosmos sans aucune intelligence organisatrice (aucun dieu, aucun démiurge). On notera qu’Aristote s’est opposé à cette idée, ses recherche sur le réel le conduisant à penser qu’une Intelligence organisatrice est à l’œuvre.
L’un des représentants de cette croyance en un Univers éternel n’était autre que l’un des découvreurs du Big Bang : Robert Woodrow Wilson lui-même (né en 1936). Mettons-nous à sa place.
Voilà que l’un des partisans de l’Univers éternel vient, sans le faire exprès, de participer à une découverte qui démontre l’erreur de sa propre philosophie !
On notera au passage que nous avons là une occasion supplémentaire de voir à quel point ces deux ordres : philosophie et sciences, sont en interaction dès que la connaissance progresse.
La trouvaille scientifique de Wilson venait confirmer la théorie philosophique d’un commencement de l’Univers, opposée à la sienne … De quoi provoquer chez lui un certain vertige métaphysique et peut-être même… psychologique.

Surtout que l’une des coïncidences les plus étranges dans cette affaire, c’est que  Wilsonavait autrefois été l’élève, à la prestigieuse université de Caltech (3), d’un grand professeur d’astronomie qui fut sans doute l’un des scientifiques les plus farouchement opposés à cette idée d’un commencement de l’Univers : Fred Hoyle (1915-2001).
Non seulement ce grand savant britannique fut l’un des artisans d’une théorie de l’Univers stationnaire (4) destinée à contrer l’idée d’un commencement et d’une usure de l’Univers, mais c’est lui qui inventa le si célèbre terme de… Big Bang !
Lors d’une émission à la BBC qui eut lieu en 1949, le journaliste lui demanda ce qu’il pensait de cette théorie d’un Univers en expansion qui aurait donc connu un commencement. Fred Hoyle s’esclaffa : Ah Ah Ah ! vous imaginez ça ?... Une sorte de grosse explosion, un gros Bang !! (En Anglais : a big Bang). Ridiculus ! (5)
C’était la première fois que ce mot était prononcé en public, dans un grand éclat de rire, pour tourner en dérision cette si ridicule croyance des antiques hébreux en un commencement du monde… C’était sur les ondes radios de la BBC, quelques années après les messages de Radio Londres… Les sanglots longs des violons de l’automne…

Comme ces vers de Paul Verlaine choisis et utilisés comme un code secret pour l’ heureuse annonce d’un changement de monde, le mot Big Bang allait bientôt être connu comme l’entrée dans un nouveau paradigme (6) : notre Univers a eu un commencement , nous le datons aujourd’hui de 13,81 milliards d’années (7), et cette nouvelle compréhension du Monde n’est pas incompatible avec le texte de la Genèse biblique qui, rédigé sans doute vers l’an 500 avant Jésus Christ, parlait déjà d’un Univers qui n’est pas éternel dans le passé…
Aura-t-il une fin ?
Les hébreux qui ont mis ces livres par écrit n’ont pas cherché à rédiger un traité scientifique, le mot sciences n’existait pas, et le concept de science non plus. Mais ils ont posé des affirmations sur l’Univers entier qui sont devenus vérifiables par l’outil scientifique… En sorte qu’on peut vérifier si leur idée d’un commencement du monde est compatible ou non avec le réel qu’étudient nos scientifiques, car c’est bien du même monde que parlent les uns et les autres…
Aura-t-il une fin ?
Nous en parlerons la semaine prochaine en précisant la question de commencement…

(A suivre…)

Brunor

Voir les précédentes chroniques sur le Big Bang : http://www.brunor.fr/PAGES/Pages_Chroniques/44-Chronique.html
ou sur le site de Zénit http://www.zenit.org/fr/googlesearch?q=les%20indices%20pensables

Voir L’Être et le néant sont dans un bateau, (Brunor Editions. 2014)

A Pasadena, banlieue de Los Angeles (Californie)  l’une des universités des États-Unis les plus réputées au monde. Trente prix Nobel et cinq prix Crafoord, en sortiront.

Hoyle Gold et Bondy enseignaient un Univers stati onnaire…

Voir : Le Hasard n’écrit pas de messages. (SPFC éditions)

Paradigme : représentation du monde. Voir la chronique 45- Un paradigme perdu…

Nous verrons pourquoi le Big Bang n’est pas exactement la « preuve » d’un commencement de l’Univers, mais il y contribue…