Le Saint-Siège met en garde contre l’usage des drones de combat : les machines « ne peuvent pas remplacer l’homme dans les décisions de vie et de mort ».
Mgr Silvano M. Tomasi, représentant du Saint-Siège au Bureau des Nations Unies et des institutions spécialisées à Genève, est intervenu lors de la Réunion d’experts sur les systèmes d’armes autonomes létales, dans le cadre de la « Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination » (13 mai-16 mai 2014).
L’archevêque a exprimé les « profondes préoccupations » du Saint-Siège sur « l’utilisation de drones qui peuvent aller au-delà des capacités de surveillance ou de renseignement en visant effectivement des cibles humaines » durant la guerre.
« Alors que dans de nombreux domaines, la technologie autonome peut s’avérer bénéfique pour l’humanité, la question de l’autonomie des armes est tout à fait distincte » : elle met une machine « en position de décider de la vie et de la mort », a-t-il souligné.
C’est pourquoi le Saint-Siège a invité à « prendre le temps de réfléchir, en s’appuyant sur le principe de précaution ».
Les machines ne peuvent décider de vie ou de mort
« L’intervention humaine significative est absolument essentielle dans les décisions affectant la vie et la mort d’êtres humains », a-t-il affirmé : en effet, « les systèmes d’armes autonomes ne pourront jamais remplacer la capacité humaine de raisonnement moral ».
Les machines, même « bien programmées avec des algorithmes sophistiqués pour prendre des décisions sur le champ de bataille dans le respect du Droit international humanitaire (DIH), ne peuvent pas « remplacer l’homme dans les décisions de vie et de mort ».
Pour se conformer aux droits de l’homme et au DIH, « ces systèmes nécessitent des qualités humaines qu’ils n’ont pas intrinsèquement » : « compassion, perspicacité… » notamment pour distinguer « les combattant des civils, l’avantage militaire ou la tragédie », qualités qui ne sont « ni remplaçables, ni programmables ». Même la programmation d’un « gouverneur éthique » ne suffit pas, a insisté Mgr Tomasi.
Le spectre de la prolifération des drones
Le Saint-Siège a réfuté l’une des justifications de ces armes, à savoir « l’idée que si nous ne développons pas cette technologie, quelqu’un d’autre le fera ». « Une fois que ces systèmes seront développés par les grands États, il ne sera pas très difficile de les copier », a fait observer l’archevêque.
En outre, « le développement de systèmes d’armes autonomes conduira à terme à leur prolifération généralisée », ce qui « modifiera fondamentalement la nature de la guerre pour toute la famille humaine ».
Pour Mgr Tomasi, « le développement de systèmes d’armes autonomes qui éliminent l’acteur humain de la prise de décision létale » ne peut que « déshumaniser » encore davantage la guerre.
Cette technologie « rend la guerre trop facile » en éliminant sa dépendance aux soldats. Elle crée aussi « un vide de responsabilité » face aux violations du droit international, a-t-il mis en garde.
Pour le Saint-Siège, « il est impératif d’agir avant que la technologie des systèmes d’armes autonomes ne progresse et ne prolifère » : « Les êtres humains ne doivent pas être mis hors de la boucle sur les décisions concernant la vie et la mort d’autres êtres humains. »