Le président Hollande annonce qu’il a invité le pape François à se rendre en France quand il voudra : il est le « bienvenu ». Il déclare la France décidée à aider les orientaux chrétiens à demeurer dans leurs pays et à garantir la protection des lieux de culte. Il révèle que le pape prépare un document sur les questions de l’environnement.
A l’issue de sa visite au Vatican – entretien avec le pape et avec Mgr Pietro Parolin, Italien, Secrétaire d’Etat, et Mgr Dominique Mamberti, Français, Secrétaire pour les relations avec les Etats -, le président Hollande a prononcé une déclaration devant la presse, au Centre culturel Saint-Louis de France, vers 12 h 50. Il a ensuite donné un déjeuner, à l’ambassade de France près le Saint-Siège pour le Secrétaire d’Etat et les membres français de la Secrétairerie d’Etat.
Le président a annoncé, au terme de sa déclaration, que le pape était « bienvenu dans notre pays, quand il le veut, quand il pensera que venir en France peut être un moment important de son pontificat ».
« Je suis venu lui dire le respect du peuple français pour son message de paix, de solidarité et de justice », a déclaré d’emblée le président en parlant du pape François: il est venu « saluer la simplicité rayonnante qui marque les premiers mois de son pontificat ».
Il a évoqué les questions de la pauvreté et des risques pour l’environnement, et des « convergences » entre le Vatican et la France, dans leurs « responsabilités respectives », notamment pour l’Afrique : « Ma visite est également l'occasion de souligner la convergence du Vatican et de la France sur les grands sujets internationaux, le premier étant l'Afrique et notamment la situation en Centrafrique ».
Pour le dossier syrien, rappelant que le Saint-Siège participe à la conférence de Genève II, il a souhaité que le Vatican reçoive la Coalition nationale syrienne. On se souvient que deux envoyés du président Assad ont été reçus au Vatican le 28 décembre et qu'une conférence a eu lieu au Vatican le 13 janvier, en préparation à Genève II.
Le président a dit son option pour une « solution politique » en Syrie. Il affirme une convergence sur l’arrêt des combats et l’aide humanitaire: deux pas vers la paix demandés par le pape notamment dans son message de Noël et son discours du 13 janvier au Corps diplomatique. « La conférence de Genève doit être tournée vers la transition, nous devons tout faire pour arrêter les combats et déployer l'aide humanitaire », a dit le président français.
Il a aussi affirmé sa volonté d’une solution négociée entre Israël et les Palestiniens, évoquant le prochain voyage du pape, en mai.
Il a réaffirmé « l’attachement de la France » à la « protection lieux saints » et à la garantie dans les négociations du « libre accès aux lieux saints ».
Pour ce qui est des chrétiens d’Orient, il a affirmé que « la France est mobilisée pour que les chrétiens restent là où ils ont toujours été depuis des siècles » et ne prennent pas « le chemin de l’exil » à cause des conflits, citant la Syrie, l’Irak et le Liban.
Le président a dit qu’il évoquerait la question des Orientaux chrétiens aussi lors de son prochain voyage en Turquie afin qu’ils soient « partout protégés ».
Il évoque la « grande question » de la Conférence sur le climat, le « réchauffement climatique » : la France tient à ce que la Conférence soit « un succès » et qu’elle puisse déboucher sur un « accord global universel ».
Il a révélé que le pape était en train d’écrire un texte pour que la "nature" soit « considérée comme un bien de toute l’humanité ». Il a évoqué ce dicton cité par le pape : « Dieu pardonne toujours, les hommes parfois, la nature jamais quand on ne prend pas soin d’elle ».
Autres questions à l’ordre du jour, toujours selon le président français : migrations et réfugiés. Il souhaite une « réponse appropriée de l’Europe et de la communauté internationale », saluant les paroles du pape à Lampedusa.
Il a aussi été question de « la mondialisation » et des « excès », des « abus », des « inégalités » qu’elle provoque, et de l’insistance du pape sur la lutte contre le trafic des êtres humains.
Le président a évoqué la laïcité : « La France, c'est la patrie des Droits de l'homme. La laïcité garantit le respect de toutes les convictions et permet de vivre ensemble avec les mêmes règles pour tous les citoyens ».
Il affirme la liberté religieuse : «La France défend partout la liberté religieuse », « c'est la patrie des droits de l’homme, de la liberté de conscience, de conviction, de la liberté religieuse ». Il a dit la « détermination » de la France pour lutter contre « tous les actes antireligieux » qui peuvent être commis dans des lieux de culte, pour toutes les religions « sans distinction ». La laïcité « permet le débat avec Eglise catholique », dans « le respect de nos principes laïcs ».
« Enfin », dit le président, sans évoquer les questions qui fâchent de l’avortement, de la fin de vie ni du mariage pour tous, « s’il y a une valeur qui nous a rassemblés, c'est la "dignité", la défense de la dignité humaine ».
Les photos de la visite sont sur la page facebook de Zenit (capture CTV), à cette adresse:
La vidéo de la Déclaration du président Hollande est en ligne sur le site de l'Elysée, à cette adresse:
http://www.elysee.fr/chronologie/#e5467,2014-01-24,visite-du-president-de-la-republique-au-vatican
Voici notre transcription des paroles du président sur cette vidéo
Mesdames, Messieurs,
Je tenais à venir aujourd’hui au Vatican pour exprimer au pape François le respect du peuple français pour son message de paix, de solidarité et de justice.
Je voulais aussi saluer la simplicité rayonnante qui marque les premiers mois de son pontificat, et qui a impressionné tous nos compatriotes, au-delà même de leurs convictions.
Mais ma visite est également l’occasion de souligner la convergence entre le Vatican et la France sur les grands sujets internationaux.
Le premier, celui que nous avons abordé ce matin avec le pape François, c’est l’Afrique et notamment la situation en Centrafrique, où les risques d’un conflit interreligieux sont réunis, et où nous devons tout faire, chacun à notre place, pour appeler au dialogue et à la réconciliation.
A cet égard, hier, je recevais à Paris l’archevêque de Bangui et l’imam qui préside la communauté musulmane de Centrafrique, et, ensemble, ils ont lancé un appel au dialogue que le pape ne peut que soutenir, et il me l’a confirmé.
J’ai aussi voulu que nous parlions du père Georges qui a été libéré : il était retenu au Nigeria, et ce fut un moment, pour le pape François et pour moi-même, de joie que de le retrouver ici.
Nous avons parlé de l’Afrique aussi parce que c’est un continent plein de promesses, mais qui connaît aussi la pauvreté, et des risques également pour son environnement. Et nous travaillerons là aussi dans nos responsabilités respectives pour que l’Afrique soit au cœur des discussions qui peuvent avoir lieu au plus haut niveau.
Le second sujet que nous avons évoqué c’est la situation au Proche-Orient et notamment en Syrie. Je rappelle que le Saint-Siège est partie-prenante de la conférence de Genève, participe en tant que tel, et j’ai exprimé le souhait qu
e le Vatican puisse accueillir la Coalition démocratique syrienne pour bien faire comprendre que la paix doit être recherchée à travers une solution politique qui permette le pluralisme. Et la conférence de Genève doit être tournée vers la transition et c’est là encore ce qui nous a permis de nous retrouver le Saint-Père et moi-même : nous devons tout faire pour arrêter les combats et permettre de déployer l’aide humanitaire.
Nous avons, toujours au Proche Orient, rappelé notre attachement à une solution négociée entre Israël et les Palestiniens, et le pape aura l’occasion d’exprimer sa position et son message de paix lors d’une visite qu’il fera dans quelques semaines sur place. Pour ma part, j’ai rappelé l’attachement de la France pour la protection des lieux saints, et je l’avais fait moi-même lors de ma visite à Jérusalem devant les autorités religieuses : le libre accès aux lieux saints doit être garanti dans le cadre de la négociation qui est en cours.
Avec le pape François, nous avons aussi voulu marquer notre inquiétude par rapport à la situation des chrétiens d’Orient. J’ai rappelé que la France était là encore mobilisée pour que les chrétiens restent là où ils ont toujours vécu, depuis des siècles, et ne prennent pas le chemin de l’exil à cause des conflits qui sont en cours. Je pense notamment en Syrie, mais ça a été vrai en Irak, et cela peut l’être au Liban. Les chrétiens d’Orient, et j’aurai aussi l’occasion de le dire dans mon prochain déplacement en Turquie, doivent être partout soutenus et protégés.
Nous avons ensuite abordé une grande question, qui est celle de la Conférence sur le climat, ou plus exactement la question du réchauffement climatique. La France tiendra donc à ce que la Conférence sur le climat puisse être un succès : il ne s’agit pas simplement de l’accueillir, il faut qu’à son issue puisse être porté un accord global universel, permettant d’atteindre les objectifs. Ce n’est pas une simple affaire entre Etats. Et j’ai souhaité que les autorités religieuses, et donc le pape, puisse lui-même porter ce message. Je n’ai pas eu besoin d’insister car le pape François est en train d’écrire un texte et de faire en sorte que la nature puisse être considérée comme le bien de toute l’humanité, et avec toutes les précautions qui doivent donc entourer le comportement humain. Il a lui-même utilisé une formule – je la lui laisse - que « Dieu pardonne toujours, les hommes parfois, la nature jamais quand on ne prend pas soin d’elle ». Retenons au moins la dernière partie de la formule car elle est juste. Et donc nous avons là aussi eu une convergence totale sur la mobilisation qui doit être la nôtre pour le succès de cette conférence.
Nous avons aussi évoqué la condition des réfugiés, sujet qui tient beaucoup à cœur au pape François et qui appelle bien sûr les réponses appropriées de l’Europe et de la communauté internationale, pour que nous soyons à la hauteur des drames humains que l’on voit trop se reproduire. Les paroles qu’avait pu prononcer le pape François à Lampedusa sont dans tous les esprits. Et donc doivent appeler les Européens à prendre les mesures appropriées, c’est-à-dire faire en sorte que des conflits puissent être réglés et que les accueils de réfugiés puissent être faits dans des conditions humaines.
Nous avons enfin, dans cet entretien, parlé de la mondialisation, de ses excès, de ses abus et des inégalités qu’elle provoque. J’ai dit également le plein soutien de la France à tout ce que le pape François développe en ce moment par rapport au trafic des êtres humains. C’est un sujet qui doit être porté là aussi dans les négociations internationales.
J’ai confirmé au pape François que la France défend partout la liberté religieuse parce que la France c’est la patrie des droits de l’homme et donc de la liberté, de la liberté de conscience, de la liberté de conviction, de la liberté religieuse. Et en France, encore avec davantage de détermination, par rapport à tous les actes antireligieux qui peuvent être commis, et notamment chaque fois qu’ils se produisent dans un lieu de culte : ça vaut pour toutes les religions et notamment par rapport à la religion catholique. Nous avons la même détermination, par rapport à tous les actes, sans distinction.
J’ai rappelé que la laïcité de la République française garantit le respect de toutes les convictions, et permet de vivre ensemble, avec les mêmes règles, les mêmes principes, qui valent pour tous les citoyens et pour ceux qui résident dans notre pays et que la laïcité permet le débat avec tous les cultes et avec l’Eglise catholique, en particulier dans le cadre d’une instance qui se réunit annuellement – bientôt au printemps – qui est présidée par le Premier ministre, et qui aborde tous les sujets, y compris les plus graves, les plus lourds, qui intéressent toute notre société. Et ce débat avec l’Eglise catholique est possible dans le plein respect de nos principes laïcs.
S’il y a un mot, une valeur qui nous a rassemblés, au cours de cet entretien, le pape François et moi-même, c’est le mot de dignité, la défense de la dignité humaine. Et c’est ce qui doit nous mobiliser, en tous cas c’est la volonté de la France, partout où elle a une responsabilité.
Enfin, j’ai dit au pape François qu’il était le bienvenu dans notre pays, quand il le voudrait et lorsqu’il pensera que venir en France peut être un moment important de son pontificat.
Je vous remercie pour votre attention.
Transcription de Zenit, Anita Bourdin