Une enquête diocésaine a été ouverte en France, par l’évêque de Créteil, Mgr Michel Santier, sur une guérison inexpliquée survenue près avoir demandé l’intercession du bienheureux prêtre polonais Jerzy Popieluszko, a révélé La Croix.
Un homme hopitalisé à l’hôpital Albert Chenevier de Créteil, en région parisienne, était atteint depuis onze ans d’une « leucémie myéloïde chronique atypique ». Le pronostic vital était désormais engagé. Un prêtre qui revenait de Pologne et qui le confia à l’intercession du P. Jerzy Popieluszko lui donna le sacrement des malades. Il laissa auprès du mourant une image du P. Jerzy et pria pour sa canonisation avec l’épouse du malade et une religieuse de l’aumônerie.
Le malade sortit du coma, puis de l’hôpital, guéri. L’équipe médicale de Hôpital Henri-Mondor constata par la suite que le cancer suivi depusi une dizaine d’années avait disparu: un phénomène médicalement inexplicable.
Cette guérison s’est produite le 14 septembre 2012, date anniversaire de la naissance du bienheureux martyr, et date de l’anniversaire du prêtre qui a donné le sacrement des malades. Plus encore, un an auparavant, de retour de Pologne, Mgr Santier avait confié son diocèse à la prière du P. Jerzy, toujours selon la même source.
Enquête diocésaine
L’évêque a maintenant confié l’examen des faits à une commission, qui se réunira en mars. Et l’anonymat du bénéficiaire de la guérison est préservé.</p>
Rappelons que, pour qu’un procès de béatification ou de canonisation puisse aboutir, il faut – sauf dans le cas du martyre, pour la béatification – l’authentification d’un miracle reconnu comme dû à l’intercession du baptisé invoqué dans la prière.
Et lorsqu’une guérison « extraordinaire » – inexplicable dans l’état actuel de la science – est constatée, il revient à l’évêque du lieu où la guérison s’est produite d’ouvrir une enquête pour en déterminer les circonstances exactes, tant au plan médical que spirituel.
Après avoir consulté des experts, l’évêque constitue un tribunal chargé d’instruire cette enquête selon les normes du droit canonique. Au terme du procès, si les conclusions sont positives, les actes sont transmis à Rome, à la Congrégation pour les causes des saints.
A l’issue d’une procédure rigoureuse, avec l’intervention de médecins et de théologiens, la Congrégation décide s’il convient de soumettre le cas au jugement final du pape, à qui il revient de se prononcer sur l’existence d’un « miracle ».
Cette reconnaissance suppose ainsi non seulement que le phénomène examiné soit inexplicable dans l’état actuel des connaissances scientifiques mais aussi qu’il soit en lien avec la prière d’un intercesseur au Ciel.
Il ne faut donc pas conclure hâtivement que le prêtre polonais pourrait être canonisé. Si la guérison était reconnue par le tribunal diocésain comme inexplicable du point de vue de la science actuelle et comme due à l’intercession du père Jerzy, le dossier pourrait ensuite être communiqué au dicastère romain.
Et si le dicastère validait la guérison comme un miracle dû à l’intercession du père Popieluszko, la Congrégation pourrait proposer au pape François d’approuver un décret sur le « miracle ». Ce décret ouvrirait la voie à la canonisation du martyr.
Il a en revanche été béatifié sans miracle préalable, du fait de l’authentification, en 2010, de son martyre, le martyre étant en quelque sorte en soi un miracle!
Trentième anniversaire de sa mort
Il était né le 14 septembre 1947 à Okopy, un petit village de Voïvodine, au nord-est de Bialystok -dans le nord-est du pays, non loin de la frontière lituanienne -, au sein d’une famille de paysans profondément chrétiens.
Entré au grand séminaire de Varsovie en 1965, il est appelé un an plus tard sous les drapeaux, pour faire trois années de service militaire dans une unité spéciale. Les autorités militaires procèdent alors à un endoctrinement anticlérical et antireligieux dans le dessein de détourner les séminaristes de leur vocation. Jerzy Popieluszko est l’objet de vexations et de persécutions qui portent atteinte à sa santé.
Il est cependant ordonné prêtre le 28 mai 1972. Il est nommé par le cardinal primat aumônier des aciéries de Huta Warszawa.
Après la proclamation de la loi martiale, en 1981, le P. Popieluszko commence à célébrer des « Messes pour la patrie ». Les homélies de l’aumônier charismatique du syndicat Solidarnosc affrontent des thèmes religieux et spirituels comme des questions de société, de politique et de morale: il enseigne la doctrine sociale de l’Église, fait connaître celui de Jean-Paul II et les positions du cardinal primat Stefan Wyszynski. Il n’en fallait pas plus pour attirer sur lui la vindicte des autorités communistes.
Une liste de 69 « prêtres extrémistes » est établie par le gouvernement du général Jaruzelski et remise au cardinal Josef Glemp, qui a succédé au cardinal Wyszynski, avec pour consigne de les faire taire! Le Père Popielszko y figure, en compagnie de deux évêques, Mgr Tokarczuk et Mgr Kraszewski, auxiliaire de Varsovie, et du confesseur de Lech Walesa, le P. Jankowski.
Le martyre d’un résistant
En décembre 1983, l’abbé Popieluszko est placé en garde à vue pendant deux jours. La police prétend avoir découvert chez lui des armes et des explosifs, ainsi que des tracts de Solidarnosc. La nuit suivante, un inconnu sonne chez lui et lance une grenade, mais il échappe de justesse à cet attentat.
Accusé d’ « abus de sacerdoce », il est convoqué treize fois par la milice, au cours des seuls quatre premiers mois de l’année 1984. Le porte-parole du gouvernement communiste, Jerzy Urban, le qualifie de « fanatique politique ».
Ainsi, le vendredi 19 octobre 1984 – il y aura trente ans cette année – à 22 heures, trois officiers de police arrêtent la voiture du P. Popieluszko en rase campagne, sous prétexte d’effectuer un alcotest. Son chauffeur parvient à s’enfuir, le prêtre reste seul entre les mains des forces de sécurité. Il a 37 ans.
On ne sait plus rien de lui jusqu’au 27 octobre, lorsque le capitaine Grzegorz Piotrowski avoue: « C’est moi qui l’ai tué, de mes propres mains ». Son corps est retrouvé dans le lac du barrage de Wloclawek, sur la Vistule, à une centaine de kilomètres au nord de Varsovie. Les Polonais reçoivent la nouvelle sans céder à la colère, comme le demandait le père Jerzy: « Nous devons vaincre le mal par le bien ». Ainsi, les jours du régime étaient comptés.
La commémoration liturgique du bienheureux Jerzy Popieluszko est fixée au 19 octobre, date anniversaire de son martyre que le père Daniel Ange a raconté avec des documents archives: « Le 19 octobre, il célèbre sa toute dernière messe. Quel jour est-on ? Les martyrs du Canada. Dans quelle église ? celle des saints Frères Martyrs polonais ! Sans commentaire. Il y médite le Rosaire. Quels mystères ? Les … douloureux. Son ultime parole ? « Prions pour que nous soyons libres de toute peur, de l’effroi et surtout du désir de vengeance et de violence. » Sur la route de Torun, la voiture du Père Jerzy est arrêtée par des fonctionnaires en uniformes de la milice. En réalité, c’était des agents de la SB (services de sécurité de l’Etat). Le chauffeur de la voiture est obligé de remettre les clefs de l’auto aux deux hommes et de monter dans leur véhicule. On lui met les menottes. Les deux fonctionnaires l’assomment violemment et le déposent dans le coffre de leur voiture et se sauvent. Le chauffeur du Père Jerzy réussit à sauter du véhicule, se sauve, et se met à la recherche de secours. Au bout de quelques kilomètres, le véhicule s’arr
ête. Le prêtre est à nouveau frappé. « Ensuite, on lui a attaché les pieds avec un sac de pierres, on lui a passé un nœud coulant autour du cou. Une des extrémités de la corde entravait les jambes repliées de la victime et à chaque mouvement, le nœud coulant étouffait le père Popieluszko » (citation du procès). A ce moment le père est encore en vie. Les assassins décident de le noyer. Le 20 octobre, on annonce au journal télévisé du soir, l’enlèvement du Père Jerzy. Une foule s’est rassemblée à l’église Saint Stanislas Kostka pour prier. Le soir même une messe est célébrée à son intention. Jour et nuit les fidèles prient dans l’église, jusqu’au moment dramatique où la vérité éclate. Le 30 octobre : on annonce que le corps du père Popieluszko est retrouvé dans la Vistule. Sa dépouille mortelle est transportée à l’église saint Stanislas Kotska, le soir du 2 novembre. Le lendemain a lieu son enterrement, auquel participent quelques centaines de milliers de Varsoviens et des délégations venant de toute la Pologne. »