« Chaque vie humaine, une incroyable aventure avec Dieu », voici celle d’Elwira Komorowska de la Pologne à la France, des « Equipes Notre Dame » au Carmel.
Elwira Komorowska a en effet quitté son pays natal, la Pologne, pour découvrir la vie de l’Eglise en France. Un appel radical, celui d’ Abraham, qui l’a amené à s’abandonner entièrement à la Providence divine sur une terre inconnue. Une communauté contemplative lui fait découvrir la richesse de deux traditions, celle de l’Occident et de l’Orient. Désormais, Ce sera une quête, une passion et un fil conducteur dans ses recherches artistiques, spirituelles et intellectuelles.
Diplômée de deux DEA en philosophie et sciences religieuses, Elwira plonge dans le monde du travail. Son expérience devient pluridisciplinaire et après différentes expériences professionnelles, elle opte finalement pour le monde de l’édition et de l’imprimé. Sa polyvalence est un atout lorsqu’elle rejoint les Equipes Notre-Dame où elle reçoit plusieurs missions variées. Le travail créatif et le contact avec autrui lui plaît beaucoup. Le fait de travailler pour une noble cause et pour l’Eglise est un atout.
Mais Dieu a souvent son projet qu’Il poursuit inlassablement avec fidélité. Elwira Komorowska est entrée au Carmel Notre Dame de Surieu en décembre 2012. Zenit l’a rencontrée quelques semaines avant son entrée dans la vie contemplative…
Zenit – Depuis quand vous sentez vous appelée à cheminer vers la vie religieuse et quel en a été le signe le plus présent?
Elwira Komorowska – Au bout de nombreuses années de recherche spirituelle, j’ai franchi la porte du Carmel, à l’âge de 40 ans. Les prémices de chaque appel se trouvent dans le projet d’amour que Dieu a pour chacun de nous, de toute éternité. Le psaume 138 (139), que j’aime beaucoup, évoque magistralement l’œuvre de Dieu : « Mon âme, tu la connaissais bien […] quand je fus façonné dans le secret, brodé au profond de la terre ».
Consciemment, mon premier souvenir remonte au moment de ma première communion à l’âge de 7 ans. On peut dire celui de mes premières promesses et efforts « ascétiques » suite à une aspiration vers Jésus. Je garde ce moment en ma mémoire avec un chant qui l’accompagnait : « Tout, je veux te l’offrir et pour toi vivre. Je veux t’aimer Jésus et être ton enfant… »
Etant une nature bien vivante (qui a causé quelques soucis à ma famille !), je sais que Dieu appelle qui Il veut. A plusieurs reprises dans ma vie Dieu s’est manifesté pour me redire son amour et m’attirer vers la vie consacrée. Un appel de Dieu est un désir qui suscite un autre désir. Je T’aime parce que Tu m’as aimé le premier. Une histoire d’amour qui a ses lois et passe par différentes étapes de la vie humaine. Elle n’est pas pour autant terminée au carmel. C’est un nouveau commencement. La découverte d’une vocation dans une vocation. Rappelons-nous le cri intérieur de Thérèse de Lisieux : « Au cœur de l’Eglise, je serai l’amour ». Chacun cherche son appel profond dans la vie consacrée ou dans le mariage.
Votre parcours professionnel aux Equipes Notre Dame a-t-il été un facteur déterminant dans votre cheminement, dans le sens où le sacrement du mariage est signe de l’Amour de Dieu ?
C’est heureux de voir l’amour constructif dans les couples qui s’ouvrent aux autres. Le passage aux END m’a fait découvrir les inspirations du père Henri Caffarel qui a beaucoup rapproché le mariage de la vie consacrée. C’est presque troublant. L’oraison, la règle de vie, l’entraide, le dialogue conjugal, etc. ce sont quelques points forts de cette spiritualité conjugale qui se veut ouverte aux contingences de la vie de chacun.
Le sacrement du mariage en soi est un reflet de l’amour du Christ pour son Eglise. Finalement, il n’y a pas d’opposition entre les deux états de vie. Ils se complètent et se ressemblent de beaucoup de manières. Au ciel, il n’y a plus que les Noces de l’Agneau, plus de femme, plus de mari. Et la vie consacrée est une anticipation de ce futur état proposé à tous les fils adoptifs du Père. Nous sommes, à la suite du Christ, des offrandes vivantes à sa Gloire. Par conséquent, le sacrement de mariage entre deux personnes humaines nous introduit sur la voie de sainteté qui préfigure la béatitude liée à notre vie terrestre.
Quitter le monde pour entrer au Carmel, est-ce une nouvelle Vie, ou est-ce le prolongement de votre vie antérieure ?
Entrer au Carmel, comme dans tout autre lieu de vie est toujours une étape nouvelle. Il y a une règle, une communauté que l’on intègre. Il faut un temps d’adaptation, d’apprivoisement mutuel, mais ce n’est pas une autre Vie avec un V majuscule. Le Christ est la Vie de tous les baptisés et les vœux monastiques ne sont que le développement de la grâce baptismale à la différence de l’Orient qui considère l’entrée dans les Ordres comme un sacrement (il ne s’agit pas du sens dogmatique !).
De notre point de vue occidental, vivre en Christ est une réalité qui peut être vécue partout, quel que soit notre mode de vie. Mais certains sont appelés par Dieu à vivre cette grâce plus radicalement que d’autres. Les moines sont au seuil de la Maison du Père pour accomplir la mission d’intercession, de médiation (même s’il n’y a qu’un médiateur, le Christ), à l’exemple de la Vierge Marie. La vie consacrée n’est pas une rupture, malgré les apparences dans sa séparation du monde. Mis à part, les femmes et les hommes suivent l’Agneau partout où Il va pour mieux se configurer à Lui. C’est Lui qui est le Centre de toute vie et le chemin de consécration est un chemin de foi.
Quelle est l’Espérance de votre vie religieuse ?
Mon espérance est de vivre pleinement l’Evangile, de devenir christ en Christ. C’est radical. C’est apprendre à aimer à sa façon, d’être « face à face », de vivre en présence de Dieu, comme l’exprime magnifiquement saint Paul dans son épître aux Ephésiens (1, 3-14).
Il nous a laissé un commandement : « Aimez-vous les uns les autres comme Moi je vous ai aimés » (Jn 13, 34).
Que souhaitez vous pour notre monde actuel ?
Quand on donne sa vie pour le Christ, on la donne aussi pour le monde. Mon désir est de voir plus de solidarité entre les personnes et que le monde trouve le chemin de la paix. Respectons chacun dans sa différence sans vouloir le changer, manipuler ou assujettir. Nous sommes tous faits de la même terre et vivre ensemble est possible. La vie est un trésor. Soyons-en responsables.
Pourriez vous vous laisser un message avant votre entrée silencieuse dans l’Amour et l’Infini de Dieu ?
Je crois en Eglise, en ses efforts considérables, mais nous devons avancer selon le projet de Dieu sous l’inspiration de l’Esprit Saint pour rejoindre chaque situation de vie, chaque cœur humain. Les chrétiens ne sont pas une élite ou une assemblée qui partagent la même pensée, les mêmes opinions. C’est pourquoi, soyons heureux de vouloir être nous-mêmes, car étant nous-mêmes, dans la vérité profonde de nos cœurs, nous serons en Dieu, nous serons fidèles à son dessein d’amour.