Le card. Sarah répond à la « sécularisation de la charité chrétienne »

Inauguration de l’assemblée de Cor Unum

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Le cardinal Sarah condamne le modèle « sournois » d’éthique de la gouvernance mondiale, modèle qui impose « une vision négative et destructive de l’homme et de la femme » en échange d’aides financières pour le développement des pays les plus pauvres. Il s’inquiète du fait que cette vision séduit « même à l’intérieur de l’Eglise », ce qui conduit à une « sécularisation de la charité chrétienne ».

C’est la ferme prise de position que le cardinal Robert Sarah, président du Conseil pontifical Cor Unum, a exprimée lors de l’inauguration de l’Assemblée plénière du dicastère, hier, 17 janvier 2013. Les travaux de cette rencontre, que le cardinal préside pour la première fois, ont pour thèmes le lien étroit entre l’évangélisation, la foi et la charité, mais aussi la confrontation entre anthropologie chrétienne et nouvelle éthique mondiale.

La participation est élargie à tous ceux qui portent la charité chrétienne dans le monde, rapporte L’Osservatore Romano du 17 janvier.

Un modèle destructeur

Pour le cardinal, il est urgent pour les organismes catholiques de faire face à la logique de « l’éthique laïciste » qui véhicule « une vision négative et destructive de l’homme et de la femme »

Concrètement, explique-t-il, l’instrument de cette éthique « sournoise » est une « présumée aide financière et technologique pour le développement ». Mais, dénonce-t-il, cette aide « est soumise à des conditions précises de la part des donateurs », parmi lesquelles « la mentalité contraceptive occidentale » et « le mépris de l’homme et de la femme créés à l’image de Dieu, que l’on trouve au niveau mondial dans l’idéologie du gender ».

Ce modèle « sournois » d’éthique « pensé par certains organismes internationaux », qui impose aux pays pauvres « des normes politiques et culturelles qui transmettent des idéologies et un laïcisme agressifs, intolérants et destructeurs des cultures et surtout de la foi », finit par « conditionner lourdement les styles de vie d’entières populations », poursuit-il.

Ce modèle attente « culturellement, politiquement et juridiquement à l’identité constitutive de l’homme et de la femme comme personnes, à leur identité sponsale et à leur merveilleuse complémentarité dans l’amour », insiste le cardinal.

Le cardinal condamne en ce sens l’action qui « profite des nécessités des pays pauvres en exploitant, par exemple, la solidarité et le secours juste et légitime en faveur de la santé de la femme et de la mère, pour le troquer avec l’imposition de politiques contraceptives et abortives ».

Il y voit une « situation inacceptable », contre laquelle l’Eglise doit être « en première ligne pour la défense de tous les droits des pauvres ».

Une sécularisation de la charité chrétienne 

Le cardinal met en garde : après avoir été imposée parfois « par la violence », aux « cultures et aux peuples du monde entier à travers des mécanismes politiques, juridiques et culturels complexes », cette vision tente aujourd’hui de pénétrer aussi « à l’intérieur de la charité de l’Eglise ».

Le cardinal déplore en effet que « certains membres de l’Eglise qui travaillent dans le domaine de la charité se sont laissé séduire et encadrer par l’éthique purement laïciste des agences d’aide de la gouvernance mondiale, jusqu’à faire des partenariats et adopter les mêmes objectifs de déstructuration anthropologique, les mêmes langages et les mêmes slogans ».

« A de divers niveaux, quelques institutions catholiques se sont laissées impliquer par l’éthique de la gouvernance mondiale, en la mélangeant avec l’Evangile et avec la doctrine sociale. Ils ont aussi utilisé ce langage ambigu caractéristique, se sont alignés sur ses conditions de soutien financier ».

Face à cette déviance, il appelle ceux qui travaillent dans le secteur de la charité de l’Eglise à « réfléchir sur la charité et sur l’anthropologie chrétienne » et ceux qui se sont laissés séduire à « revenir à la foi », car « l’histoire de l’occident a suffisamment prouvé le lien entre infidélité au magistère et perte de la foi ».

« L’Eglise, prévient-il, ne pourra jamais tirer bénéfice de la sécularisation ».

« Discernement et vigilance » sont donc les « mots d’ordre » qui doivent guider les protagonistes, afin de ne pas laisser les idéologies « prendre la place de l’Evangile », ce qui serait une « sécularisation de la charité chrétienne ».

Le discernement doit se faire « à la lumière de l’Evangile », précise-t-il, exhortant à « ouvrir les yeux et l’intelligence sur les réalités irréfutables et négatives de notre temps », tout en gardant « le regard fixé sur le mystère de la présence de Dieu » dans le monde.

Au final, l’invitation du cardinal est à la conversion : « la grâce de la conversion nous fait sortir de ce cadre et nous fait repartir en Christ. La vocation prophétique du chrétien l’appelle à rendre témoignage au Christ et aux valeurs évangéliques. Il n’existe pas d’alternative ».

« Il est nécessaire de faire à nouveau l’expérience de l’amour de Dieu pour tout l’homme, surtout pour l’homme d’aujourd’hui qui vit le drame de la destruction du vrai sens de l’amour, qui est le don de Dieu », souligne-t-il.

« A la culture de la mort il faut opposer la civilisation de l’amour. Une civilisation qui « sera fraternelle mais aussi filiale », conclut-il.

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Anne Kurian-Montabone

Baccalauréat canonique de théologie. Pigiste pour divers journaux de la presse chrétienne et auteur de cinq romans (éd. Quasar et Salvator). Journaliste à Zenit depuis octobre 2011.

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