Anita Bourdin
ROME, vendredi 27 juillet 2012 (ZENIT.org) – "Nous sommes les membres d’une unique famille et nous devons, pour ainsi dire, être le moteur du progrès authentique de l’humanité", déclare Mgr Müller.
Dans un entretien publié en italien dans L’Osservatore Romano du 26 juillet 2012, Mgr Gerhard Ludwig Müller, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi invite à « faire resplendir » ce qui a été confié à l’Eglise, en « dépassant les affrontements idéologiques » (cf. Zenit du 25 juillet 2012 pour la première partie, du 26 juillet, pour la deuxième).
Mgr Lefebvre et les religieuses des Etats-Unis
La Congrégation pour la doctrine de la foi doit actuellement mener deux dialogues délicats, d’un côté avec les disciples de Mgr Marcel Lefebvre et de l’autre avec les religieuses des Etats-Unis.
Mgr Müller y voit un enjeu pour l’avenir de l’Eglise”, avec au coeur la question de la Révélation: “Il est très important, dit-il, de surmonter les affrontements idéologiques de quelque côté qu’ils viennent. Il n’existe qu’une Révélation de Dieu en Jésus-Christ, qui a été confiée à toute l’Eglise. C’est pour cela qu’il n’y a pas de négociations sur la Parole de Dieu et l’on ne peut pas à la fois croire et ne pas croire. On ne peut pas prononcer les trois voeux religieux et en pas les prendre au sérieux. On ne peut pas s’en référer à la Tradition de l’Eglise et n’en accepter ensuite que certaines parties”.
“La marche de l’Eglise, fait observer Mgr Müller, va de l’avant et nous sommes tous invités à ne pas nous enfermer dans une façon de penser autoréférentielle, mais au contraire à accepter la vie en plénitude et la plénitude de la foi de l’Eglise”.
Et d’expliquer pour ce qui est de la revendication d’un sacerdoce féminin: “Pour l’Eglise catholique, il est tout à fait évident que l’homme et la femme ont la même valeur: c’est ce que dit déjà le récit de la Création et c’est ce que confirme l’ordre du salut. L’être humain n’a pas besoin de s’émanciper, c’est-à-dire de se créer ou de s’inventer lui-même. Il est déjà émancipé et libéré par la grâce de Dieu. Beaucoup de déclaration concernant l’admission de femmes au sacrement de l’ordre ignorent un aspect important du ministère sacerdotal. Etre prêtre ne signifie pas se créer une position. On ne peut pas considérer le ministère sacerdotal comme une sorte de position de pouvoir terrestre et penser que l’émancipation n’advient que si tous peuvent l’occuper. La foi catholique sait que ce n’est pas nous qui dictons les conditions de l’admission au ministère sacerdotal, et que derrière le fait d’être prêtre il y a toujours la volonté et l’appel du Christ”.
Le Concile Vatican II
“J’invite, lance l’archevêque, à renoncer aux polémiques et à l’idéologie et à se plonger dans la doctrine de l’Eglise. En Amérique justement, les religieuses et les religieux ont réalisé des choses extraordinaires pour l’Eglise, pour l’éducation et pour la formation des jeunes. Le Christ a besoin de jeunes qui poursuivent ce chemin et qui s’identifient avec leur choix fondamental”.
Voici ce qu’il dit du Concile Vatican II comme ressource pour la vie religieuse: “Le Concile Vatican II a affirmé des choses merveilleuses pour le renouveau de la vie religieuse, et sur la vocation commune à la sainteté. Il est important de fortifier la confiance réciproque plutôt que de travailler les uns contre les autres”.
Enfin, le dicastère dont Mgr Müller devient préfet, avait toujours été guidé par un Italien, à part le cardinal espagnol Rafael Merry del Val y Zulueta Wilcox – de 1914 à 1930 -. Or, après 1968, on a vu nommés à cette place des cardinaux d’autres nations: le cardinal croate Franjo Šeper (1968-1981), puis le cardinal bavarois Joseph Ratzinger (1981-2005), le cardinal William Levada (2005-2012), des Etats Unis, et Mgr Müller, un Allemand lui aussi. Comment lire cette évolution?
Le moteur d’un progrès authentique
Pour Mgr Müller il s’agit tout d’abord d’un changement d’époque : « Auparavant, on n’avait pas la possibilité de voyager fréquemment, par conséquent les personnes de la curie venaient des alentours de Rome ou d’Italie. Aujourd’hui, les moyens techniques modernes nous aident à vivre de façon plus concrète la catholicité de l’Eglise. Mais puisque la Primauté du pape est liée à l’Eglise de Rome, il est évident qu’il y a encore dans la curie de nombreux Italiens. De toute façon, l’internationalisation a à voir avec la catholicité de l’Eglise. Déjà à l’époque de l’empire, il y avait à Rome beaucoup de chrétiens et même de papes originaires d’autres régions, par exemple d’Orient ».
« Dans l’Eglise, aujourd’hui comme alors, déclare Mgr Müller, nous sommes les membres d’une unique famille et nous devons, pour ainsi dire, être le moteur du progrès authentique de l’humanité. De fait, aucune autre organisation n’a cette dimension internationale qui embrasse l’humanité, et ne s’engage autant pour l’unité des personnes et des peuples ».
Il propose cette lecture eucharistique de l’unité : « Partout où nous célébrons l’eucharistie, nous partageons la partie la plus intime de notre conviction e nous avons la même communion de vie avec le Christ, même si la culture et la langue diffèrent. Nous sentons immédiatement que nous sommes une seule chose, que nous sommes les membres d’un seul corps, et que nous construisons ensemble le temple de Dieu ».
C’est aussi, ajoute l’archevêque, une expérience de Pentecôte : « C’est d’une certaine manière la poursuite de l’expérience de la Pentecôte : nous provenons de tous les pays et nous pouvons louer Dieu tous ensemble, nous pouvons écouter dans notre langue l’unique Parole de Dieu. L’Esprit Saint nous parle dans la langue de l’amour, qui nous unis tous en Dieu, notre Père ».