Anne Kurian

ROME, vendredi 20 juillet 2012 (ZENIT.org) – L’Eglise soutient les travailleurs ruraux et le confirme lors d’un congrès sur le monde rural à Rome, en insistant sur l’annonce du Christ pour le développement humain intégral dans ce milieu.

Le IVe congrès mondial sur la vie rurale, a été organisé du 24 au 27 juin 2012, par le Conseil pontifical « justice et paix » et par l’Association rurale catholique internationale (ICRA), sur le thème « Agriculture et maîtrise de la création ».

Le cardinal Peter Kodwo Appiah Turkson, président du Conseil pontifical, Mgr Mario Toso, secrétaire du même dicastère, et Théodore Comlanvi Loko, ambassadeur du Bénin près le Saint-Siège, sont intervenus.

« Le premier et principal facteur de développement du monde agricole et rural est l’annonce du Christ » : tel est la conclusion des participants, rapportée par L’Osservatore Romano du 14 juillet 2012.

Ils ont souligné à ce titre l’urgence d’une « nouvelle évangélisation » dans le milieu des agriculteurs, « afin que les personnes qui cultivent la terre puissent rencontrer le Sauveur ». En effet, de la vie de communion avec Jésus « dériveront une nouvelle lumière et de nouvelles énergies morales, essentielles au développement », ont-ils affirmé.

Contribution fondamentale au développement

Le cardinal Turkson a introduit les travaux, rappelant en particulier que « ceux qui vivent une vie rurale apportent une contribution fondamentale au développement humain intégral de toute l’humanité ; en même temps, ces derniers désirent des opportunités pour le développement intégral de leur propre personne, de leurs familles et de leurs communautés ».

C’est en prenant en compte ces deux aspects que « le dessein de Dieu pour ses fils et ses filles » se réalisera, a-t-il estimé.

Citant un proverbe du Ghana, son pays d’origine, le cardinal a fait observer que « la connaissance ne peut être trouvée par une seule tête », mais plutôt par « autant de têtes qui se consultent et qui partagent ».

D’où l’importance que « l’Eglise et les organisations qui lui sont liées continuent à partager les connaissances utiles avec les hommes et les femmes des communautés rurales, en faisant croître la conscience des droits fondamentaux à l’information et à la propriété, et en développant la capacité de mise en pratique ».

La doctrine sociale de l’Eglise – dans laquelle Caritas in veritate est un « point de référence indispensable » – en appelle à la « solidarité » et à la « collaboration entre les peuples » pour un développement intégral de l'humanité, a-t-il rappelé, et cela vaut aussi « dans le cas particulier des paysans ».

Pour le cardinal, c’est ce que l'Icra s’efforce de réaliser, « à travers la promotion, l’essor et le soutien de mouvements agricoles » et entre autres avec l’action «Agrimissio», qui finance des microprojets de développement rural dans les nations les plus pauvres.

Le scandale de la faim

Aujourd’hui, le scandale de la faim, est « une offense à notre généreux créateur et à ses pauvres fils », a estimé le cardinal, déplorant le fait que « deux milliards de personnes sont encore sans nourriture et vivent dans l’insécurité ».

En outre, la situation est aggravée par la crise économique actuelle, due aux spéculations : « loin de la terre, où les gens vivent et cultivent des denrées alimentaires, les commerçants scrutent sur des écrans d’ordinateur et parient sur les futurs prix des récoltes », a-t-il dénoncé.

Parce que « les opérateurs financiers se sont tournés vers d’autres marchés – dont l’agriculture – pour protéger leurs investissements », a-t-il expliqué, « les prix des produits agricoles, qui ne sont plus stabilisés par les critères de l’offre et de la demande dans leur influence réciproque complexe, sont devenus la proie des spéculations de marché ».

Par ailleurs, « la croissance des prix du pétrole influe sur ceux de l’agriculture » car « les dérivés des hydrocarbures sont une des principales nécessités pour l’agriculture ». Même la « solution verte », qui promettait de libérer de la dépendance du pétrole, n’a causé  qu’« appropriations de terre sans précédents », qui ont « forcé beaucoup de petits agriculteurs à abandonner leur lopin de terre et à déménager en masse dans les villes», a-t-il rapporté.

L’exemple du Ghana

Le cardinal Turkson a notamment évoqué l’exemple du Ghana, où certains petits propriétaires ont été lésés de leurs terrains « parce que le gouvernement avait cédé les terres à une compagnie minière – aurifère – sans qu’ils en aient connaissance ».

Or, non seulement les explosions qui mettent au jour le minéral « endommagent la terre et les maisons » mais en plus, «la transformation de l’or brut avec le cyanure peut polluer l’eau potable, tuer les poissons et provoquer des maladies sur les habitants du village ».

Ceux-ci sont souvent obligés de quitter leur terre sans aucune indemnité, et se voient répondre par les organismes gouvernementaux responsables que « la richesse créée pour beaucoup dépasse les conséquences désagréables pour quelques-uns ».

En définitive a dénoncé le cardinal, « l'extraction minière n’a pas vraiment amélioré la vie des ghanéens » dans les campagnes.

L’Icra, créée en 1962, compte aujourd’hui 62 associations adhérentes, qui regroupent 7 millions de travailleurs ruraux présents dans 54 pays : 6 en Afrique, 6 en Amérique du Nord, 11 en Amérique du Sud, 16 en Asie, 15 en Europe. L’association a pour but de mettre en liaison des instituts de recherches, organismes, fondations, associations et mouvements œuvrant dans le secteur rural.