Anne Kurian
ROME, vendredi 22 juin 2012 (ZENIT.org) – « La » ressource de la planète, c’est la personne humaine, c’est pourquoi les politiques néo-malthusiennes n’ont fait qu’apporter l’échec, avec des populations aujourd’hui vieillissantes, déclare le cardinal Scherer, envoyé de Benoît XVI pour la conférence Rio+20.
Le cardinal Odilo Pedro Scherer, est intervenu lors d’une rencontre organisée le 19 juin 2012 au Brésil, par le Saint-Siège, dans le cadre de la conférence de l’ONU sur le développement durable (Rio+20). Etaient présents également Mgr Francis Chullikatt, représentant du Saint-Siège à l’ONU, Mgr Paul Ouedraogo, Mme Gisele Henriques, Mme Cristina Dos Anjoys, et Mme Maria Elena Aradas (cf. Zenit du 11 juin 2012).
Ressource de la planète
Il y a vingt ans, en 1992, a rappelé le cardinal, la Conférence de Rio de Janeiro « avait décidé de mettre la personne au centre de la réflexion sur le développement durable ».
Vingt ans plus tard, a-t-il déploré, la « promotion continue d’approches de développement néo-malthusiennes », qui voient les êtres humains comme « obstacles au développement », plutôt que « bénéfices », a conduit à l’adoption de « programmes qui promeuvent la destruction de la vie humaine », et a favorisé une « culture hostile à la vie ».
Or, a-t-il poursuivi, lorsque la personne, n’est pas mise « au centre du développement politique, environnemental ou social, mais plutôt à sa merci », les conséquences pour le développement humain sont claires : les effets se vérifient par « les sociétés vieillissantes dans le monde aujourd’hui » et par « les millions d’enfants qui n’ont jamais eu l’opportunité de naître, et dont les contributions à la planète manqueront à jamais », a-t-il constaté.
En ce sens, le cardinal a dénoncé les délégations qui promeuvent les « dynamiques de population » ou « droits reproductifs » comme forme de développement durable. Pour lui, ces propositions sont « fondées sur une notion défectueuse » : elles prônent que le développement durable et la protection de l’environnement « ne peuvent être atteints qu’en réduisant le nombre de personnes sur la terre ».
Cette « herméneutique de suspicion », a-t-il souligné, « blesse profondément la solidarité humaine », car elle a conduit à un « effondrement alarmant de la famille » et elle prive la planète « de sa plus grande ressource, la personne humaine ».
Au contraire, a-t-il ajouté, on mesure le progrès économique « par-dessus tout par sa capacité à promouvoir la personne humaine ». Par conséquent, l’éthique ne doit pas être « séparée des décisions économiques » mais plutôt « y être reconnue ».
Ce sont nos enfants
La crise économique et financière actuelle, a estimé le cardinal Scherer, « témoigne des dangers du développement économique qui méprise les impératifs éthiques et moraux » : les effets « déshumanisants et déstabilisants » qui résultent d’une croissance économique « au prix et au détriment des êtres humains » sont visibles.
Ils se voient notamment, a-t-il fait observer, « dans les vies des plus pauvres, où les enfants meurent de maladies qui sont facilement traitables ». Les enfants qui meurent de dysenterie, a insisté le cardinal, « sont nos enfants »: ce n’est pas un « problème local » mais un problème « qui en appelle à la communauté international entière ».
De même, le droit à la nourriture et à l’eau potable sont « les deux droits les plus basiques » et pourtant ils « font défaut en de nombreux endroits du monde », a poursuivi le cardinal : il est impératif que les leaders de la société abordent les « causes structurelles de l’insécurité alimentaire ».
Les responsables doivent également investir davantage dans le « développement de l’agriculture des pays pauvres », notamment en promouvant l’accès aux technologies comme l’irrigation, les moyens de stockage et de transport, tout ceci en respectant le principe de subsidiarité, c’est-à-dire « en coopération avec les communautés locales ».
Selon le cardinal, l’un des « premiers pas » pour la réforme de l’agriculture est de « s’attaquer au manque de propriété et de droits de la terre pour les marginalisés ». La propriété et la production, a-t-il dénoncé, « se concentrent dans les mains de quelques personnes ». Ce constat renvoie une « obligation morale » aux leaders, d’engager une « réforme à long terme » et « équitable ».
Redécouvrir la sobriété
Le progrès scientifique et technique a une importance « vitale » pour la sécurité alimentaire et l’agriculture, a estimé le cardinal. Cependant, a-t-il ajouté, les avancées scientifiques et technologiques doivent toujours « servir l’humanité » et ne peuvent devenir « des barrières pour les pauvres » ou bien provoquer « des conséquences désastreuses pour l’équilibre délicat des écosystèmes ».
Appelant à un rôle « d’intendants de la création », le cardinal a invité à la responsabilité : les approches « purement institutionnelles » ne peuvent suffire, il revient à « chaque membre individuel de la société » d’adopter une « attitude qui assume librement la responsabilité, en solidarité véritable les uns avec les autres et avec toute la création ».
Concrètement, il s’agit de « casser le cycle de la surconsommation et de la surproduction », ainsi que de la « dégradation environnementale ». Tout cela provoque, a-t-il dénoncé, « une diminution implacable des ressources ».
Il faut, a expliqué le cardinal, « redécouvrir les valeurs de la sobriété, de la tempérance et de l’autodiscipline ». La « solidarité mondiale » doit encourager les individus et les leaders à « réévaluer leurs choix de vie » pour « promouvoir la vie humaine ».
Les « sérieux problèmes humains et écologiques actuels », a-t-il insisté, demandent un « changement fondamental dans la façon de vivre », pour une communauté économique internationale « plus juste ».
En effet, « un monde dans lequel les riches consomment une proportion écrasante des ressources naturelles mondiales est scandaleux » et appelle à une prise de conscience « de l’interdépendance de tous les habitants de la terre ».