Comme il l’a fait avec Zachée, Jésus s’invite lui-même chez tout homme perdu

Homélie du dimanche 31 octobre, par le P. Laurent Le Boulc’h

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ROME, Vendredi 29 octobre 2010 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le commentaire de l’Evangile du dimanche 31 octobre, proposé par le P. Laurent Le Boulc’h.

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (19, 1-10)

Jésus traversait la ville de Jéricho.
Or, il y avait un homme du nom de Zachée ; il était le chef des collecteurs d’impôts, et c’était quelqu’un de riche.
Il cherchait à voir qui était Jésus, mais il n’y arrivait pas à cause de la foule, car il était de petite taille.
Il courut donc en avant et grimpa sur un sycomore pour voir Jésus qui devait passer par là.
Arrivé à cet endroit, Jésus leva les yeux et l’interpella : « Zachée, descends vite : aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison. »
Vite, il descendit, et reçut Jésus avec joie.
Voyant cela, tous récriminaient : « Il est allé loger chez un pécheur. »
Mais Zachée, s’avançant, dit au Seigneur : « Voilà, Seigneur : je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens, et si j’ai fait du tort à quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus. »
Alors Jésus dit à son sujet : « Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison, car lui aussi est un fils d’Abraham.
En effet, le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. »

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« Zachée, descends vite : aujourd’hui, il faut que j’aille demeurer dans ta maison. » « Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison ! »

Ainsi parle Jésus dans l’évangile de ce dimanche. Cette insistance de Luc sur l’aujourd’hui n’est pas un hasard. L’aujourd’hui c’est l’aujourd’hui de Zachée bien sûr. C’est aussi l’aujourd’hui du temps de Luc, celui de la première communauté chrétienne d’origine grecque à laquelle appartient Luc et pour laquelle il a écrit son évangile. Mais l’aujourd’hui de l’évangile c’est aussi notre aujourd’hui. Notre présent.

Par la simple répétition de ce mot, Luc nous dit combien la visite du Christ Jésus dans la maison de Zachée peut être actuelle ! Car nous pouvons tous être des Zachée. Des Zachée c’est-à-dire des hommes perdus en besoin de salut.

Pour les gens de Jéricho, Zachée n’est pourtant qu’un homme pécheur. C’est un pécheur à la puissance 10. Honni par les gens. Car Zachée est publicain et, pire encore, le chef des publicains. Un collecteur d’impôts à la solde de l’occupant romain, un collaborateur corrompu qui n’hésite pas à se servir au passage et à se mettre de côté, sur le dos des honnêtes gens, une immense fortune.

Nous comprenons alors que Zachée soit détesté et que les gens de Jéricho soient scandalisés par l’attitude de Jésus qui, plutôt que d’aller rencontrer un des justes de la ville, s’en est allé dans la maison de ce voleur. «Tous – nous dit l’évangile– récriminaient : « Il est allé loger chez un pécheur. »

Mais, ce que n’a pas vu la foule, c’est que cet homme est en train de se perdre. Sa vie est en plein naufrage. « Le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. » dit Jésus.

« Il y a un temps pour tout. » dit l’Ecclésiaste. Un temps où ne compte que la réussite à n’importe quel prix et un temps où cette réussite a le goût amère du vide.

Voici donc Zachée qui grimpe sur son arbre gigantesque. Il monte là haut à cause de la foule qui est devenue pour lui un obstacle, non seulement – on l’aura compris – parce qu’elle fait rempart à Jésus à cause de sa petite taille, mais parce qu’elle est pleine de rancœur vis-à-vis de celui qui l’exploite honteusement.

Zachée le notable monte pourtant sur son sycomore, au risque du ridicule. C’est dire le désir qui le tient. C’est dire aussi qu’il est prêt à tout pour voir Jésus.

Il y a de l’urgence dans ce récit. « Zachée courut donc en avant » et Jésus l’invite à descendre vite de son arbre. « Vite il descendit et reçut Jésus avec joie ». Il y a de l’urgence car Zachée est au bord du précipice. Car Zachée est perdu. Perdu à en mourir ! Pris au piège de sa soif de richesses, Zachée s’est enfermé dans sa prison. Plus de relation possible avec ses frères qui le détestent. Plus de relation avec Dieu qui est en droit de le condamner. Plus de vie spirituelle étouffée par la course au Dieu de l’argent, à n’importe quel prix. Le moment semble venu où il n’est plus possible à Zachée de se regarder en face, tant la honte est grande en lui. Au bout de la vie de Zachée, il y a une grande solitude. La solitude insoutenable de celui qui n’a vécu que pour lui-même.

Or voici qu’un espoir se fait jour. La rencontre de Jésus dont tout Jéricho a déjà entendu parler. Cet homme surprenant ne craint pas de s’approcher des pécheurs. Car cet homme est habité par la Sagesse de Dieu tellement plus large que le cœur de l’homme : « toi, Maître qui aimes la vie, toi dont le souffle impérissable anime tous les êtres. Ceux qui tombent, tu les reprends peu à peu, tu les avertis, tu leur rappelles en quoi ils pèchent, pour qu’ils se détournent du mal, et qu’ils puissent croire en toi, Seigneur. »

La foule n’a pas su lire la détresse de l’homme. Jésus, lui, d’un seul regard, a vu cela.« Il leva les yeux et l’interpella ». Contre toute attente, Jésus provoque et prend l’initiative de la rencontre tant espérée. Il brise le cercle de la solitude. Contre toute règle de bienséance, il s’invite lui-même chez l’homme perdu. Et désormais tout va très vite. Vite, vite !

Il aura donc fallu si peu. Une simple rencontre pour que tout se libère en Zachée. Un seul rendez vous pour le rendre à nouveau capable de partage, capable de se donner, capable de joie, délivré de son mal.

« Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison ! »

L’aujourd’hui de l’évangile c’est aussi notre aujourd’hui. Notre présent. Car Zachée est de tous les temps bien sûr. Car tout homme peut être menacé de perte. Pas besoin d’amasser des fortunes, d’être un corrompu pour ressembler à Zachée le publicain. Tant de raisons aujourd’hui peuvent nous conduire, malgré nous parfois, à nous enfermer dans la solitude. La peur des autres, la méfiance excessive, le repli sur la vie privée, le refus des relations, le goût pour le confort matériel, la consommation ou l’activité à outrance, qui étouffe notre vie spirituelle. Et nos villes, et de plus en plus nos campagnes, gagnées par la maladie de l’indifférence. Combien de personnes aujourd’hui, chez nous, perdues dans la foule, sont en mal de relations plus vraies, plus humaines ? Combien, et nous en sommes peut-être, guettent un autre regard qui pourrait les libérer ? Si nous pouvions, à cause de Jésus et de Zachée, briser un peu de nos solitudes. Un simple geste, un simple mot… Une rencontre.

L’histoire de Zachée nous redit pourtant à quel point le Christ peut nous sauver aujourd’hui encore. Car il vient le Ressuscité, demeurer chez nous, quoi qu’il en soit de notre péché. Il vient restaurer en nous le goût de la relation à Dieu et à nos frères. Nous étions morts, spirituellement, perdus, incapables de trouver Dieu et de vivre en fraternité. Mais le Christ nous a réconciliés.

Il vient ce soir demeurer chez nous par sa Parole et le don de l’Eucharistie. Il vient nous rencontrer ce soir et nous redonner la joie de nous ouvrir à Dieu et à nos frères.

« Descends vite, aujourd’hui il me faut demeurer dans ta maison. » Aujourd’hui… Chez toi… Qui que tu sois… Amen.

Le P. Laurent Le Boulc’h est curé de la paroisse de Lannion et modérateur de la paroisse de Pleumeur Bodou, secrétaire général du conseil presbytéral du diocèse de Saint Brieuc et Tréguier (Côtes d’Armor – France).

 

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ZENIT Staff

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