ROME, Mardi 5 octobre 2010 (ZENIT.org) – Les techniques de fécondation assistée ont permis la naissance de 4 millions de personnes dans le monde, et en même temps la conception artificielle de « plus de 80 millions d’embryons (278 000 annuellement en France, pour que naissent 14 500 enfants) : une surproduction embryonnaire dénoncée par L’Alliance pour les Droits de la Vie car elle implique pour chaque naissance la destruction d’une vingtaine d’entre eux. L’invention du Dr Edwards « a fait entrer les pays développés dans le déni de l’humanité des embryons ».
« Gènéthique », la synthèse de presse de la Fondation Jérôme Lejeune fait le point sur les réactions au Nobel de médecine 2010.
Le 4 octobre 2010, le prix Nobel de médecine a été décerné au biologiste britannique Robert Geoffrey Edwards, âgé de 85 ans, et connu pour avoir été à l’origine, avec le gynécologue Patrick Steptoe, de la naissance de Louise Brown, le 25 juillet 1978, premier « bébé éprouvette » né dans le monde après une fécondation in vitro (FIV) (Cf. Synthèse de presse du 01/02/07).
Le Comité Nobel a retenu les travaux du Pr Edwards « pour le développement de la fécondation in vitro thérapeutique. Ses travaux ont permis de traiter l’infertilité, une affection médicale touchant […] plus de 10% des couples dans le monde ».
Robert Edwards a commencé à travailler sur les techniques permettant d’obtenir une fécondation in vitro en 1963 à Cambridge où il expérimente cette technique sur des animaux. Sa volonté est de trouver un moyen pour aider les couples infertiles à avoir des enfants. « Jamais je n’oublierai le jour où j’ai regardé dans le microscope et j’ai vu quelque chose d’étrange dans les cultures. J’ai regardé dans le microscope et j’ai vu un blastocyste (embryon) humain qui me regardait. J’ai pensé : on y est arrivé ! » a raconté le Pr. Edwards.
Si, depuis 32 ans, près de 4 millions de personnes sont nées à la suite d’une FIV, cette technique a aussi « ouvert la marche fulgurante d’une ‘révolution procréatique’ riche en polémiques ». Point de départ de l’aide médicale à la procréation (AMP), la FIV s’est dotée d’autres techniques comme l’injection intra-cytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI), la congélation d’ovocytes, le diagnostic préimplantatoire (DPI). Les progrès de l’AMP ont même débordé le champ de la procréation pour offrir à la recherche en thérapie cellulaire les embryons humains.
Le Pr. Edwards a souvent affirmé qu’il avait pressenti ces développements « dès les années 60 ». Bien que ces techniques soulèvent des enjeux éthiques importants, il s’est dit favorable à la poursuite des recherches sur les embryons : « la science doit avancer. Il n’y aurait eu aucune FIV si nous n’avions pas étudié l’embryon ». Avec le Pr. Steptoe, il a fondé à Cambridge le Bourn Hall Clinic, premier centre mondial de FIV où sont nés à ce jour plus de 10 000 « bébés-éprouvettes ».
En France, le Pr. René Frydman, « père » du premier bébé éprouvette français – Amandine, née en 1982 après une FIV qu’il a réalisé avec le biologiste Jacques Testart – ne tarit pas d’éloges sur Robert Edwards. Il espère que cette récompense va susciter des vocations chez les jeunes médecins : « Aujourd’hui, le recherche sur l’embryon n’est pas autorisée en France. Il est donc difficile de motiver les jeunes et de les attirer vers notre métier […] Même chose avec la vitrification des ovocytes, cette technique étant assimilée à la recherche sur l’embryon […] peut-être que l’attribution de ce prix Nobel contribuera à débloquer les choses ». Dans le même sens, le Pr. Pierre Jouannet affirme : « si Edwards a pu mettre au point la fécondation in vitro, c’est parce qu’il a travaillé sur l’embryon. Ces travaux seraient aujourd’hui impossibles en France, où ce type de recherche est interdit ».
Pour Frédérique Dreifuss-Netter, membre du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) et conseillère à la Cour de cassation, « au fur et à mesure que la technique [de la FIV] était maîtrisée, elle a permis d’aller de plus en plus loin, et c’est là que la boîte de Pandore s’est ouverte ». Il est nécessaire de poser la question des limites face aux demandes individuelles qu’entraînent aujourd’hui les techniques de procréation assistée, qui ont ouvert le champ du « droit à l’enfant ».
Le président de l’Académie pontificale pour la vie, Mgr Ignacio Carrasco de Paula, ne partage pas le choix fait par le comité Nobel. Il rappelle notamment les problèmes liés à la congélation des embryons humains et le commerce auquel ces techniques ont donné lieu : « sans Edwards, il n’y aurait pas un marché où sont vendus des millions d’ovocytes. Il n’y aurait pas dans le monde un grand nombre de congélateurs remplis d’embryons. […] Edwards n’a pas résolu le problème de l’infertilité qui est un problème grave, ni du point de vue pathologique ni du point de vue épidémiologique ».
L’Alliance pour les droits de la vie rappelle que si ces techniques ont permis la naissance de 4 millions de personnes dans le monde, elles ont toutefois entraîné la conception artificielle de « plus de 80 millions d’embryons (278 000 annuellement en France, pour que naissent 14 500 enfants). Cette surproduction embryonnaire impliquant la destruction d’une vingtaine d’entre eux pour chaque naissance a fait entrer les pays développés dans le déni de l’humanité des embryons. […] La fécondation in vitro a ouvert un cycle de nouvelle dérive : congélation des embryons, exploitation par la recherche, tri des embryons à caractère eugénique ».
Libération (Eric Favereau) 05/10/10 – Le Figaro (Martine Perez, Anne Jouan) 05/10/10 – Cyberpresse.ca (Lucie Godeau) 04/10/10 – Sciences et avenir.fr (Cécile Dumas) 04/10/10 – Washington Post.com (Rob Stein) 04/10/10 – Le Parisien.fr 04/10/10 – Gènéthique 05/10/10