Benoît XVI lève quatre excommunications : « promouvoir l’unité dans la charité »

Le pape avait annoncé dès 205 la nécessité de « gestes concrets »

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ROME, Samedi 24 janvier 2009 (ZENIT.org) – En pleine semaine de « prière » pour l’Unité des chrétiens, Benoît XVI, accomplit un « geste » fort en levant, de façon à « promouvoir l’unité dans la charité », l’excommunication qui frappait les quatre évêques consacrés par Mgr Lefebvre en 1988.

C’est un pas de plus vers l’unité visible de tous les chrétiens, dont le pape a fait une priorité de son pontificat. Les dates du décret et de sa publication sont en elles-mêmes une clef de lecture de l’événement.

Le décret de la Congrégation romaine pour les évêques, en date du 21 janvier 2008, rédigé à la demande du pape et signé par le préfet de cette Congrégation, le cardinal Giovanni Battista Re, est publié ce matin, 24 janvier 2009, par la salle de presse du Saint-Siège, en la fête de saint François de Sales. Il est accompagné d’un communiqué de ce même bureau de presse.

Le décret souligne la volonté manifestée par cette levée de la sanction de restaurer la communion : « Par cet acte, on désire consolider les relations réciproques de confiance, intensifier et stabiliser les rapports de la Fraternité Saint Pie X avec le Siège Apostolique. Ce don de paix, au terme des célébrations de Noël, veut être aussi un signe pour promouvoir l’unité dans la charité de l’Eglise universelle et arriver à supprimer le scandale de la division ».

Un geste humble et fort

Le geste est d’autant plus significatif qu’il s’adresse à une « minorité » – comme on l’a dit -. Les autres minorités chrétiennes en dialogue avec Rome s’en sentiront certainement encouragées.

Ce décret lève l’excommunication qui avait frappé, ipso facto – en termes de droit canonique, latae sententiae – les quatre évêques ordonnés par Mgr Lefebvre à Ecône, dans le Valais suisse (diocèse de Sion), le 30 juin 1988, sans mandat pontifical (canon 1382) : Mgr Bernard Fellay, suisse, Mgr Alfonso de Gallareta, espagnol, Mgr Tissier de Mallerais, français, et Mgr Richard Williamson, anglais. Mgr Marcel Lefebvre et l’évêque co-consécrateur, Mgr Antonio de Castro Mayer, se sont éteints respectivement le 25 mars et le 26 avril 1991 et l’excommunication avec eux.

La décision de Benoît XVI survient après qu’au nom de ces mêmes évêques Mgr Bernard Fellay a écrit, le 15 décembre 2008, au cardinal Darío Castrillón Hoyos, président de la Commission pontificale « Ecclesia Dei », en lui demandant la levée de la sanction.

Dans sa lettre, indique le décret, Mgr Fellay déclarait notamment : « Nous sommes toujours fermement déterminés dans notre volonté de rester catholiques et de mettre toutes nos forces au service de l’Eglise de Notre Seigneur Jésus Christ, qui est l’Eglise catholique romaine. Nous acceptons son enseignement dans un esprit filial. Nous croyons fermement à la Primauté de Pierre et à ses prérogatives, et c’est pour cela même que nous souffrons tant de l’actuelle situation. »

Certes, pour qui compte les brebis et les siècles, l’humble geste de Benoît XVI ne revêt pas la grandeur de la « Déclaration commune » historique, au cœur de Vatican II, le 7 décembre 1965, du pape Paul VI et du patriarche Athénagoras Ier exprimant leur décision d’enlever de la « mémoire » et du milieu de l’Église les sentences d’excommunication de l’année 1054.

Mais depuis, la patience œcuménique manifeste combien il est difficile de restaurer la communion lorsque la division est devenue une habitude. Et le geste, non moins fort, de Benoît XVI contribue sans aucun doute à cette « purification de la mémoire » souhaitée par Jean-Paul II à l’occasion du Grand Jubilé de l’Incarnation. Certains observateurs considèrent même que le pèlerinage de la Fraternité Saint-Pie X à Rome, les 8, 9 et 10 août 2000, et le passage de la Porte Sainte ont manifesté visiblement une authentique nostalgie de l’unité.

Et lorsque, jeudi dernier, 22 janvier, deux quotidiens italiens, « Il Giornale » et « Il Riformista » avaient annoncé que Benoît XVI avait déjà signé le décret, ils avaient déclenché des réactions immédiates dans le monde entier : la nouvelle a fait l’ouverture des journaux télévisés en France.

Travailler sans épargner ses forces

Différentes questions restent maintenant en suspens. A l’intérieur et à l’extérieur : le négationnisme de Mgr Williamson oblige à rappeler que la levée d’une excommunication n’est pas une approbation des dérives ni une absolution générale. Le dialogue doit se poursuivre. « On espère que ce pas sera suivi de la réalisation rapide de la pleine communion avec l’Eglise de toute la Fraternité de Saint Pie X, témoignant ainsi de la vraie fidélité et de la vraie reconnaissance du Magistère et de l’Autorité du Pape avec la preuve de l’unité visible », souligne le cardinal Re.

Le pape fait donc ce qu’il avait annoncé au lendemain de son élection, le 20 avril 2005, en la chapelle Sixtine : « Nourris et soutenus par l’Eucharistie, les catholiques ne peuvent que se sentir incités à tendre vers cette pleine unité que le Christ a ardemment souhaitée au Cénacle ».

Il avait insisté sur le rôle de l’évêque de Rome dans ce domaine en disant : « Le Successeur de Pierre sait qu’il doit de manière toute particulière prendre en charge cette aspiration suprême du Divin Maître. C’est à Lui, en effet, qu’a été confiée la tâche de confirmer ses frères (cf. Lc 22, 32) ».

« C’est donc pleinement conscient, au début de son ministère dans l’Eglise de Rome que Pierre a baigné de son sang, que son Successeur actuel prend comme premier engagement de travailler sans épargner ses forces à la reconstruction de l’unité pleine et visible de tous les fidèles du Christ. Telle est son ambition, tel son devoir pressant », avait affirmé d’emblée Benoît XVI.

Les bons sentiments ne suffisent pas

Et le pape annonçait des « gestes » :« Il est conscient que dans ce but, les manifestations de bons sentiments ne suffisent pas. Des gestes concrets sont nécessaires, qui pénètrent les âmes et remuent les consciences, appelant chacun à cette conversion intérieure qui est le présupposé de tout progrès sur la voie de l’œcuménisme ».

On se souvient que le Motu proprio de Jean-Paul II « Ecclesia Dei adflicta », du 2 juillet 1988, et le décret du 1er juillet 1988, « Dominus Marcellus Lefebvre » de la Congrégation romaine pour les évêques, alors présidée par le cardinal Bernardin Gantin, déclaraient en effet le schisme de Mgr Lefebvre en relation immédiate avec les ordinations sans mandat du pape Jean-Paul II.

Or, le supérieur de la Fraternité Saint-Pie X, Mgr Bernard Fellay, avait souhaité la remise en vigueur du missel d’avant le concile et la levée de l’excommunication.

Le pape, qui a rencontré personnellement Mgr Fellay le 29 août 2005, a fait progressivement les deux « gestes ». En septembre 2007, Benoît XVI a promulgué le Motu Proprio « Summorum Pontificum » « sur la liturgie romaine antérieure à la réforme de 1970 », qui était accompagné d’une lettre aux évêques. Le pape aménageait ainsi des espaces pour l’usage liturgique « extraordinaire » de l’ancien missel. Il accorde maintenant la levée de l’excommunication.

« Dans cette décision, le Saint-Père a été inspiré par le souhait que l’on arrive au plus vite à la
complète réconciliation et à la pleine communion », souligne aujourd’hui la salle de presse du Saint-Siège.

La Fraternité de Saint Pie X vers la pleine communion

Benoît XVI a souffert en première personne de l’unité rompue : le cardinal Joseph Ratzinger était alors préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi et Mgr Lefebvre était revenu in extremis sur un accord déjà signé avec lui. La blessure était restée ouverte.

Le décret indique la direction des pas ultérieurs : « On espère que ce pas sera suivi de la réalisation rapide de la pleine communion avec l’Eglise de toute la Fraternité de Saint Pie X, témoignant ainsi de la vraie fidélité et de la vraie reconnaissance du Magistère et de l’Autorité du Pape avec la preuve de l’unité visible ».

Dans son message, programmatique, en la chapelle Sixtine, le 20 avril 2005 – et déjà cité parce que c’est une référence en la matière – Benoît XVI avait non seulement insisté sur le charisme de Pierre pour l’unité de l’Eglise, mais il avait aussi affirmé sa volonté de mettre en œuvre le concile Vatican II. « Alors que je me prépare moi aussi au service qui est propre au Successeur de Pierre, je veux affirmer avec force la ferme volonté de poursuivre l’engagement de mise en oeuvre du Concile Vatican II, dans le sillage de mes Prédécesseurs et en fidèle continuité avec la tradition bimillénaire de l’Eglise ».

Actualité du concile

Benoît XVI avait souligné le 40e anniversaire de la conclusion du concile (8 décembre 1965) et son actualité : « Au fil des ans, les Documents conciliaires n’ont pas perdu leur actualité ; leurs enseignements se révèlent même particulièrement pertinents au regard des nouvelles exigences de l’Eglise et de la société actuelle mondialisée ». De quoi rassurer ceux que le retour à la communion de la Fraternité Saint-Pie X inquiète.

Car parmi les documents du concile, se trouve le décret sur l’œcuménisme « Unitatis redintegratio », en date du 21 novembre 1964, qui affirme : « Promouvoir la restauration de l’unité entre tous les chrétiens c’est l’un des buts principaux du saint Concile œcuménique Vatican II. Une seule et unique Église a été instituée par le Christ Seigneur ».

Nul doute que le nouveau geste de Benoît XVI, à la veille de la conclusion de la grande semaine annuelle de prière pour l’unité des chrétiens, s’inscrive dans cette dynamique.

Anita S. Bourdin

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ZENIT Staff

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