ROME, Mardi 13 janvier 2009 (ZENIT.org) – Jusqu’à quel point et comment le sacrement de la confession est-il pratiqué? Quelles sont les propositions pour faire comprendre aux fidèles l’importance de la confession? Quelles sont les tâches et les fonctions de la Pénitencerie apostolique? Pourquoi celle-ci était-elle si importantes dans les siècles passés et pratiquement inconnue aujourd’hui?
Pour répondre à ces questions et à d’autres encore, le plus ancien dicastère de la Curie romaine a organisé ces 13 et 14 janvier un symposium sur le thème: « La Pénitencerie apostolique et le sacrement de la pénitence. Parcours historiques, juridiques et théologiques, et perspectives pastorales ».
830 ans après sa fondation (1179), la Pénitencerie apostolique organise au palais de la chancellerie, à Rome, le premier événement public à caractère académique afin, non seulement de connaître la nature, la structure et les fonctions du dicastère, mais surtout pour offrir une plus large et plus précise compréhension sacramentelle du sacrement de la pénitence.
Au cours du symposium interviennent divers théologiens et canonistes catholiques experts en la matière. Les travaux s’achèveront par une table ronde où prendront la parole des représentants des Congrégations pour la doctrine de la foi, pour le culte divin et pour le clergé et du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens.
Pour connaître les finalités et les objectifs du symposium, ZENIT a interrogé Mgr Giovanni Francesco Girotti, évêque régent du Tribunal de la Pénitencerie apostolique.
ZENIT – Quelles sont les raisons à l’origine de ce symposium?
Mgr Girotti – Le premier objectif est d’offrir une information adéquate concernant les fonctions et les tâches de la Pénitencerie apostolique qui, bien qu’étant le plus ancien dicastère du Saint-Siège (cette année nous célébrons les 830 ans de sa constitution) reste peu connue, et même par une grande partie du clergé. Les différentes réflexions de nature historique, théologique sacramentelle et juridique, conduiront sans doute à une compréhension plus objective quant aux liens qui unissent la Pénitencerie apostoliques au sacrement de la pénitence.
ZENIT – A partir des années 70, le sacrement de la confession a été moins pratiqué. Dans certaines régions du monde, il a même pratiquement disparu. Quelle est la situation aujourd’hui?
Mgr Girotti – Je crois de mon devoir de signaler que la pastorale de la confession, au fil des années qui ont suivi le Concile de Trente, a toujours été traitée avec beaucoup de soin et que les choix précis qui ont été faits suivent la ligne de ce Concile.
Il est bon de rappeler aussi que ce Concile est celui qui a exposé de façon claire et de manière organique, la doctrine et la pensée de l’Eglise catholique sur la sacrement de la pénitence. Le changement de « mentalité » sur le sacrement de la pénitence et sur l’attitude pénitentielle en général, vient de certains documents publiés par le Saint-Siège après le Concile œcuménique Vatican II. Je vous en cite quelques uns: par exemple la Constitution apostolique « Paenitemini » du 17 février 1966, la Constitution apostolique « Reconciliatio et paenitentia », publiée par Jean Paul II en 1984, qui est d’ailleurs une synthèse des réflexions issues du synode des évêques sur le sacrement de la réconciliation.
Tous ces documents marquent indubitablement une époque décisive pour les nouvelles orientations données à la suite du Concile, mais ils sont en même temps à la limite d’une époque de profondes mutations, non seulement au niveau ecclésial, mais au niveau des mentalités mêmes. Des changements qui ont eu une forte incidence sur la pratique du sacrement de la réconciliation.
Il est absolument indéniable que dans l’Eglise d’aujourd’hui la situation du sacrement de pénitence n’est pas des meilleures, ni en ce qui concerne sa pratique, ni même en ce qui concerne sa compréhension.
La réforme préconisée par Vatican II et mise en œuvre ces dernières années, se réfère essentiellement au rite, et il semblerait qu’elle n’ait pas réussi à redonner vie ni à la compréhension juridique ni à la foi de ce sacrement. Même si les tentatives et les efforts n’ont pas manqué de la part d’un grand nombre de conférences épiscopales qui ont tenté des solutions, en recommandant surtout une multiplication des formes de pénitence. Il y a eu de part et d’autres des tentatives de susciter un nouveau regain d’intérêt pour la confession.
Certains diocèses ont organisé des campagnes pour encourager le recours à ce sacrement. Hélas, il est vrai aussi, de nos jours, que ce sacrement, tellement essentiel pour l’état et la sanctification de nos âmes, parait frappé d’une crise inquiétante. Il s’agit là d’un phénomène qui ne touche pas simplement l’ensemble des fidèles peu instruits en religion. Voulant faire un rapide diagnostic de mésestime et de désamour envers ce sacrement, je me limiterais à signaler:
a) Une certaine baisse de la compréhension sacramentelle de la pensée sacramentaire prise dans son ensemble, autrement dit une baisse de ce qui est sacramentel. Il a été dit récemment que beaucoup de personnes ne connaissent pas les fondements théologiques qui pourraient mieux faire comprendre et apprécier la confession. Depuis toujours la confession est un sacrement qui demande beaucoup d’efforts, fatiguant ; c’est un sacrement qui, dans son développement extérieur et dans sa formation, a subi de grands changements.
b) Un aspect fondamental, qui engendre ces changements dans l’administration du sacrement de la pénitence est certainement la nouvelle manière de concevoir le péché, l’affaiblissement du sens du péché. Il y a une perte du sens du « péché moral ». Pie XII lui-même disait déjà: « Le plus grand péché du monde d’aujourd’hui est peut-être celui d’avoir perdu le sens du péché »
c) Le sens du péché fait défaut parce que manque avant tout le sens de l’offense à Dieu; dans un monde sécularisé la présence de Dieu n’est pas considérée comme une présence saillante;
d) Selon certaines affirmations relevant de la psychologie, la préoccupation majeure est de ne pas culpabiliser et de ne pas poser de freins à la liberté.
ZENIT – Au cours de l’histoire la Pénitencerie a exercé un rôle très important au sein de la Curie romaine. Qu’en est-il aujourd’hui?
Mgr Girotti – Si l’on considère l’ampleur des attributions exercées par la Pénitencerie entre la fin du Moyen Age et les débuts de l’ère moderne, son rôle a été très important. Née comme bureau pour assister le pape et pour suivre, dans l’exercice de sa juridiction, tous les cas touchant le « for interne », la Pénitencerie, au fil des siècles, n’a cessé d’élargir ses compétences à de nombreuses autres affaires qui touchent également le « for externe ».
L’ampleur de ses attributions, qu’il s’agisse du « for interne » ou du « for externe », est vraiment importante, par exemple dans la première moitié du XVIème siècle. Il suffit de voir la liste : dispenses matrimoniales provenant de l’empêchement dérivant de divers degrés de consanguinité et d’affinité, licences pour la promotion aux Ordres sacrés par dérogation aux normes en vigueur; absolutions pour homicide volontaire, sans préméditation ou commis en légitime défense avec éventuelle dispense pour la promotion aux Ordres, absolutions pour coups à des clercs, pour simonie …la liste n’est certainement pas exhaustive. A partir de documents connus de la Pénitencerie on voit qu’elle étendait ses propres compétences également aux non chrétiens et, en particulier, aux juifs.
ZENIT – Quels objec
tifs visez-vous avec ce symposium?
Mgr Girotti – La Pénitencerie étant de fait un dicastère rarement placé sous les projecteurs et qui apparaît à beaucoup très mystérieux, on souhaite le faire connaître de façon plus appropriée en mettant en évidence ses fonctions et ses tâches qui, comme je le disais, tendent exclusivement au bien des âmes. On veut en même temps redonner vie et promouvoir un regain d’intérêt pour le sacrement de la confession, qui, de nos jours, parait frappé d’une crise inquiétante.
Propos recueillis par Antonio Gaspari