Assemblée générale de l’Académie pontificale pour la Vie : Discours de Benoît XVI

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Texte intégral

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ROME, Mercredi 28 février 2007 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral du discours que le pape Benoît XVI a prononcé lors de l’audience aux participants à l’Assemblée générale de l’Académie pontificale pour la vie et au Congrès international sur « La conscience chrétienne en soutien du droit à la vie », le samedi 24 février.

* * *

Chers frères et soeurs,

C’est pour moi une véritable joie de recevoir au cours de cette audience à laquelle vous êtes venus si nombreux, les membres de l’Académie pontificale pour la Vie, réunis à l’occasion de leur XIIIème Assemblée générale ; et ceux qui ont voulu participer au Congrès qui a pour thème : « La conscience chrétienne en soutien du droit à la vie ». Je salue le cardinal Javier Lozano Barragán, les archevêques et les évêques présents, mes confrères prêtres, les rapporteurs du Congrès et vous tous, venus de divers pays. Je salue en particulier Mgr Elio Sgreccia, président de l’Académie pontificale pour la Vie, que je remercie pour les paroles aimables qu’il m’a adressées, et pour le travail qu’il réalise aux côtés du vice-président, du chancelier et des membres du Conseil de Direction, pour accomplir les tâches délicates et vastes de l’Académie pontificale.

Le thème que vous avez soumis à l’attention des participants, et par voie de conséquence également à celle de la communauté ecclésiale et de l’opinion publique, revêt une grande importance : la conscience chrétienne a en effet intérieurement besoin de se nourrir et de se renforcer avec les motivations multiples et profondes qui militent en faveur du droit à la vie. C’est un droit qui exige le soutien de tous, car il s’agit du droit fondamental parmi tous les autres droits humains. L’Encyclique Evangelium vitae l’affirme avec force : « Malgré les difficultés et les incertitudes, tout homme sincèrement ouvert à la vérité et au bien peut, avec la lumière de la raison et sans oublier le travail secret de la grâce, arriver à reconnaître, dans la loi naturelle inscrite dans les cœurs (cf. Rm 2, 14-15), la valeur sacrée de la vie humaine depuis son commencement jusqu’à son terme; et il peut affirmer le droit de tout être humain à voir intégralement respecter ce bien qui est pour lui primordial. La convivialité humaine et la communauté politique elle-même se fondent sur la reconnaissance de ce droit » (n. 2). Cette même Encyclique rappelle que « la défense et la mise en valeur de ce droit doivent être, de manière particulière, l’œuvre de ceux qui croient au Christ, conscients de la merveilleuse vérité rappelée par le Concile Vatican II: ‘Par son Incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme’. (Gaudium et spes, 22). Dans cet événement de salut, en effet, l’humanité reçoit non seulement la révélation de l’amour infini de Dieu qui ‘a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique’ (Jn 3, 16), mais aussi celle de la valeur incomparable de toute personne humaine. (ibid.)

Le chrétien est par conséquent continuellement appelé à se mobiliser pour faire face aux multiples attaques auxquelles est exposé le droit à la vie. Dans ce domaine, il sait pouvoir compter sur des motivations profondément enracinées dans la loi naturelle et pouvant donc être partagées par toute personne possédant une conscience droite. Dans cette perspective, surtout après la publication de l’Encyclique Evangelium vitae, beaucoup a été fait afin que les contenus de ces motivations puissent être mieux connus au sein de la communauté chrétienne et de la société civile, mais il faut reconnaître que les attaques au droit à la vie dans le monde entier se sont étendues et multipliées, assumant également de nouvelles formes. Les pressions en faveur de la légalisation de l’avortement dans les pays de l’Amérique latine et dans les pays en voie de développement sont toujours plus fortes, également avec le recours à la libéralisation des nouvelles formes d’avortement chimique sous le prétexte de la santé reproductive : les politiques de contrôle démographique s’intensifient même si elles sont désormais reconnues comme pernicieuses également sur le plan économique et social.

Dans le même temps, dans les pays plus développés grandit l’intérêt pour la recherche biotechnologique plus pointue, pour instaurer des méthodes d’eugénisme, subtiles et étendues, jusqu’à la recherche obsessionnelle de « l’enfant parfait », avec la diffusion de la procréation artificielle et de diverses formes de diagnostics visant à en assurer la sélection. Une nouvelle vague d’eugénisme discriminatoire est approuvée au nom du soi-disant bien-être des individus et, spécialement dans le monde économiquement plus développé, l’on fait la promotion de lois visant à légaliser l’euthanasie. Tout cela se déroule alors que, d’un autre côté se multiplient les pressions pour la légalisation de cohabitations alternatives au mariage et fermées à la procréation naturelle. Dans ces situations, la conscience, parfois étouffée par les moyens de pression collective, ne fait pas preuve d’un vigilance suffisante devant la gravité des questions en jeu, et le pouvoir des plus forts affaiblit et semble paralyser également les personnes de bonne volonté.

Pour cette raison, l’appel à la conscience et en particulier à la conscience chrétienne, est encore plus
nécessaire. « La conscience morale, comme dit le Catéchisme de l’Eglise catholique, est un jugement de la raison par lequel la personne humaine reconnaît la qualité morale d’un acte concret qu’elle va poser, est en train d’exécuter ou a accompli. En tout ce qu’il dit et fait, l’homme est tenu de suivre fidèlement ce qu’il sait être juste et droit ». (n. 1778). Il ressort de cette définition que la conscience morale doit, pour être en mesure de guider correctement la conduite humaine, avant tout reposer sur le solide fondement de la vérité, c’est-à-dire qu’elle doit être éclairée pour reconnaître la véritable valeur des actions et l’importance des critères d’évaluation, afin de savoir distinguer entre le bien et le mal, également là où cela n’est pas favorisé par le climat social, le pluralisme culturel et le chevauchement d’intérêts.

La formation d’une conscience vraie, parce que fondée sur la vérité, et droite, parce que déterminée à en suivre les règles, sans contradictions, sans trahisons et sans compromis, est aujourd’hui une entreprise difficile et délicate, mais incontournable. Et il s’agit d’une entreprise qui, malheureusement, se heurte à divers facteurs. Tout d’abord, dans la phase actuelle de la sécularisation appelée post-moderne et marquée par des formes de tolérance discutables, non seulement le refus de la tradition chrétienne grandit, mais l’on se méfie également de la capacité de la raison à percevoir la vérité, on s’éloigne du goût de la réflexion. Selon certains, pour être libre, la conscience individuelle devrait même se débarrasser aussi bien des références aux traditions que des références basées sur la raison. Ainsi la conscience, qui est un acte de la raison visant à la vérité des choses, cesse d’être lumière et devient une simple toile de fond sur laquelle la société des médias projette les images et les impulsions les plus contradictoires.

Il convient de rééduquer au désir de la connaissance de la vérité authentique, à la défense de la propre liberté de choix face aux comportements de masse et aux attraits de la propagande, pour nourrir la passion de la beauté morale et de la clarté de la conscience. Ceci est la tâche délicate des parents et des éducateurs qui les secondent ; c’est également la tâche de la c
ommunauté chrétienne à l’égard de ses fidèles. Pour ce qui concerne la conscience chrétienne, sa croissance et ce qui la nourrit, on ne peut se contenter d’un contact éphémère avec les principales vérités de foi au cours de l’enfance, mais nous avons besoin d’un chemin qui accompagne les différentes étapes de la vie, préparant l’esprit et le cœur à accueillir les devoirs fondamentaux sur lesquels repose aussi bien l’existence de la personne que de la communauté. Il s’agit de la seule manière de faire comprendre aux jeunes les valeurs de la vie, de l’amour, du mariage, de la famille. C’est la seule manière de leur faire apprécier la beauté et la sainteté de l’amour, la joie et la responsabilité d’être parents et collaborateurs de Dieu en donnant la vie. Sans une formation continue et adaptée, il devient encore plus difficile d’être capable de porter un jugement dans les questions posées par la biomédecine en matière de sexualité, de vie naissante, de procréation, comme dans la manière de traiter et de soigner les patients et les couches faibles de la société.

Il est certes nécessaire de parler des critères moraux qui concernent ces questions, avec des professionnels, médecins et juristes, pour les exhorter à élaborer un jugement de conscience compétent, et, selon le cas, également une courageuse objection de conscience, mais il est tout aussi urgent de veiller au processus de formation de la jeunesse et des adultes, au niveau de la base, pour les familles et les communautés paroissiales. A cet égard, parallèlement à la formation chrétienne, dont la finalité est la connaissance de la Personne du Christ, de sa Parole et des Sacrements, dans l’itinéraire de foi des enfants et des adolescents il convient d’unir de manière cohérente le discours sur les valeurs morales qui concerne le corps, la sexualité, l’amour humain, la procréation, le respect pour la vie à tous les stades, dénonçant dans le même temps avec des motifs valables et précis, les comportements contraires à ces valeurs fondamentales. Dans ce domaine spécifique l’œuvre des prêtres devra être secondée de manière opportune par l’engagement des laïcs éducateurs, également des experts, qui se consacrent à guider les réalités ecclésiales par leur science éclairée par la foi. Je prie par conséquent le Seigneur afin qu’il envoie parmi vous, chers frères et sœurs, et parmi ceux qui se consacrent à la science, à la médecine, au droit, à la politique, des témoins possédant une conscience vraie et droite, pour défendre et promouvoir la « splendeur de la vérité » en vue de soutenir le don et le mystère de la vie. Je compte sur votre aide, très chers professionnels, philosophes, théologiens, scientifiques et médecins. Dans une société parfois assourdissante et violente, avec votre qualification culturelle, l’enseignement et l’exemple, vous pouvez contribuer à réveiller dans de nombreux cœurs la voix éloquente et claire de la conscience.

« L’homme a en réalité une loi inscrite par Dieu dans son cœur – nous a enseigné le Concile Vatican II – sa dignité est de lui obéir, et c’est elle qui le jugera » (cf. Gaudium et spes, 16). Le Concile a offert de sages orientations afin que les laïcs apprennent « à bien distinguer entre les droits et les devoirs qui leur incombent du fait de leur appartenance à l’Eglise, et ceux qui leur reviennent en tant que membres de la société humaine. Ils doivent s’efforcer de les mettre en harmonie les uns avec les autres, se rappelant que, dans toute chose temporelle, ils doivent se guider d’après la conscience chrétienne: car aucune activité humaine, même dans les choses temporelles, ne peut être soustraite à l’autorité de Dieu » (Lumen gentium, 36). Pour cette même raison, le Concile exhorte les laïcs croyants à accueillir « ce que les pasteurs, représentants du Christ, auront décidé en tant que docteurs et chefs de l’Eglise » et d’autre part, précise que « les pasteurs doivent reconnaître et promouvoir la dignité et la responsabilité des laïcs dans l’Eglise, utiliser volontiers leurs avis prudents » et conclut que « de ces rapports familiers entre laïcs et pasteurs, on doit attendre pour l’Eglise de nombreux et d’heureux résultats » (Lumen gentium, 37).

Lorsque la valeur de la vie humaine est en jeu, cette harmonie entre fonction magistérielle et engagement des laïcs devient extrêmement importante : la vie est le premier des biens reçus de Dieu et le fondement de tous les autres ; garantir le droit à la vie à tous et de manière égale pour tous, est une tâche. De l’accomplissement de cette tâche dépend l’avenir de l’humanité. D’où également l’importance de votre rencontre d’étude. Je confie les travaux et les résultats de cette rencontre à l’intercession de la Vierge Marie, que la tradition chrétienne salue comme la véritable « Mère de tous les vivants ». Qu’Elle vous assiste et vous guide ! Avec ce vœu je vous accorde à tous, à vos familles et collaborateurs, la bénédiction apostolique.

© Copyright du texte original en italien : Librairie Editrice Vaticane
Traduction réalisée par Zenit

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ZENIT Staff

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