ROME, Jeudi 30 novembre 2006 (ZENIT.org) – Réfléchir ensemble à la façon d’exercer le minsitère du successeur de Pierre : le pape Benoît XVI a lancé de nouveau l’invitation que Jean-Paul II avait faite dans son encyclique « Que tous soient un ». Et une nouvelle fois, le voyage du pape en Turquie est l’occasion d’un appel au respect de la liberté religieuse par les Etats.
Les cloches du Phanar ont sonné ce matin à toute volée à l’arrivée de Benopît XVI au siège du patriarcat œcuménique de Constantinople, à Istanbul, pour la solennelle célébration de la Divine liturgie en la fête de l’apôtre Saint André, frère de Pierre, et saint patron de l’Eglise de constantinople.
Benoît XVI a suivi la célébration, aidé de temps à autre par un dignitaire orthodoxe pour s’orienter dans les arcanes de la liturgie solennelle. Le pape a assisté à la célébration – il avait célébré la messe auparavant à la résidence de la délégation vaticane – et il a prié debout à haute voix le Notre Père en grec moderne et donné sa bénédiction avec le patriarche à l’issue de la liturgie et de l’échange des dons. Le patriarche a offert au pape un précieux évangéliaire et le pape a offert au patriarche une coupe et une patène. Le patriarche a baisé la coupe avant de la replacer dans son coffret.
Après l’homélie du patriarche, le pape a prononcé un discours. Il y a notamment renouvelé l’invitation de Jean-Paul II en disant : « Le thème du service universel de Pierre et de ses successeurs a malheureusement donné naissance à nos différences d’opinion, que nous souhaitons surmonter, grâce au dialogue théologique qui a repris depuis peu ».
Benoît XVI a alors rappelé les paroles de Jean-Paul II, dans son encyclique Ut unum sint : « Mon vénérable prédécesseur, le Serviteur de Dieu, le Pape Jean-Paul II, parla de la miséricorde qui caractérise le service d’unité de Pierre, une miséricorde dont Pierre lui-même a été le premier à faire l’expérience (UUS n. 91). C’est sur cette base que Jean-Paul II lança une invitation à nouer un dialogue fraternel dans le but d’identifier les moyens dont le ministère pétrinien peut être exercé aujourd’hui, tout en respectant sa nature et son essence, afin de «réaliser un service d’amour reconnu par les uns et par les autres» (ibid., n. 95). Je souhaite aujourd’hui rappeler et renouveler cette invitation ».
Benoît XVI soulignait le lien spécial entre les deux Eglises qu’il appelait « sœurs » au sens fort, Pierre et André étant frères, en faisant observer : « Aujourd’hui, dans cette église patriarcale Saint-Georges, nous pouvons faire l’expérience une nouvelle fois de la communion et de l’appel de deux frères, Simon Pierre et André, à travers la rencontre entre le Successeur de Pierre et son Frère dans le ministère épiscopal, le chef de l’Eglise fondée selon la tradition par l’Apôtre André. Notre rencontre fraternelle souligne la relation particulière qui unit les Eglises de Rome et de Constantinople comme Eglises Sœurs ».
Le pape évoquait l’histoire récente, depuis Vatican II – il l’avait fait la veille au cours de la liturgie des vêpres – : il disait se réjouir en effet de la « nouvelle vitalité des relations qui se sont développées depuis la mémorable rencontre de décembre 1964, entre Paul VI et Athénagoras ».
Benoît XVI rappelait que « le 7 décembre 1965, à la veille de la session finale du Concile Vatican II, nos vénérables prédécesseurs firent un pas nouveau, unique et inoubliable respectivement dans l’Eglise patriarcale Saint-Georges et dans la Basilique Saint-Pierre au Vatican: ils effacèrent de la mémoire de l’Eglise les tragiques excommunications de 1054 ».
Il citait ensuite la visite de Jean-Paul II, à Constantinople en 1979, et les visites à Rome de Bartholomaios Ier.
« C’est dans le même esprit, disait-il, que ma venue est destinée à renouveler l’engagement commun pour poursuivre la route » en vue de « la pleine communion entre l’Eglise de Rome et l’Eglise de Constantinople ».
Benoît XVI disait sa détermination – il a fait de la poursuite de l’unité une des « priorités » de son pontificat – : « Je peux vous assurer que l’Eglise catholique souhaite faire tout son possible pour surmonter les obstacles et pour chercher, avec nos frères et sœurs orthodoxes, des moyens toujours plus efficaces de coopération pastorale à cette fin ».
Le pape continuait sa méditation sur les charismes et les missions respectives de Pierre en André en disant : « Le Seigneur ressuscité, avant son Ascension, les envoya tous deux, ainsi que les autres Apôtres, avec la mission de faire de toutes les nations ses disciples, en les baptisant et en proclamant ses enseignements. Cette tâche qui nous a été laissée par les saints frères Pierre et André est loin d’être achevée. Au contraire, aujourd’hui, elle est encore plus urgente et nécessaire ».
La poursuite de l’unité, soulignait le pape, fait partie intégrante de cette mission: « Nos efforts en vue de construire des liens plus étroits entre l’Eglise catholique et les Eglises orthodoxes font partie de la tâche missionnaire. Les divisions qui existent entre les chrétiens sont un scandale pour le monde et un obstacle à la proclamation de l’Evangile ».
Pour ce qui est du charisme d’André, le pape faisait remarquer : « André, le frère de Simon Pierre, reçut (…) une mission suggérée par son propre nom. Comme il parlait le grec, il devint — avec Philippe — l’Apôtre de la rencontre avec les Grecs qui venaient à Jésus (cf. Jn 12, 20sqq). La tradition nous dit qu’il était missionnaire non seulement en Asie mineure et dans les territoires du sud de la Mer Noire, c’est-à-dire ici dans cette région, mais aussi en Grèce, où il a enduré le martyre ».
Et c’est un thème cher au pape Ratzinger que cette rencontre de l’Evangile avec la philosophie grecque : « L’Apôtre André, disait-il, représente par conséquent la rencontre entre le christianisme des origines et la culture grecque. Cette rencontre, notamment en Asie mineure, devint possible en particulier grâce aux grands Pères de la Cappadoce, qui enrichirent la liturgie, la théologie et la spiritualité à la fois des Eglises de l’Orient et de l’Occident. Le message chrétien, comme le grain de blé (cf. Jn 12, 24), tomba sur cette terre et porta beaucoup de fruit. Nous devons être profondément reconnaissants pour l’héritage qui naquit de cette rencontre féconde entre le message chrétien et la culture hellénique. Il a eu une influence durable sur les Eglises de l’Est et de l’Ouest. Les Pères grecs nous ont laissé un précieux trésor dont les Eglises continuent de tirer des richesses anciennes et nouvelles (cf. Mt 13, 52) ».
Le pape citait les fruits et les témoins de cette Eglise au cours des siècles, notamment les martyrs, et il a renouvelé son appel à la liberté religieuse en disant : « Pour sa part, le siècle qui vient de s’achever a lui aussi, vu de courageux témoins de la foi aussi bien à l’Est qu’à l’Ouest. Même aujourd’hui, il existe de nombreux témoins dans différentes régions du monde. Nous nous souvenons d’eux dans notre prière et, de toutes les manières possibles, nous leur offrons notre soutien, tout en demandant instamment aux responsables du monde de respecter la liberté religieuse comme un droit de l’homme fondamental ».
Le pape exprimait ce vœu final : « Puisse notre prière et notre action quotidiennes être inspirées par un fervent désir non seulement d’être présents à la Divine Liturgie, mais d’être en mesure de la célébrer ensemble, de prendre part à l’unique table du Seigneur, en partageant le même pain et le même calice. Puisse notre rencontre d’aujourd’hui servir d’élan et de joyeuse anticipation du don de la pleine communion. E
t puisse l’Esprit de Dieu nous accompagner sur notre chemin ».