Homélie prononcée par Benoît XVI le 15 août, fête de l’Assomption

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ROME, Jeudi 17 août 2006 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte de l’homélie que le pape Benoît XVI a prononcée au cours de la messe du 15 août qu’il a présidée dans l’église paroissiale de Castelgandolfo.

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Vénérés frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce,

Chers frères et sœurs !

Dans le Magnificat — le grand chant de la Vierge que nous venons d’entendre dans l’Evangile — nous trouvons une parole surprenante. Marie dit: « Désormais, toutes les générations me diront Bienheureuse ». La Mère du Seigneur prophétise les louanges mariales de l’Eglise pour tout l’avenir, la dévotion mariale du Peuple de Dieu jusqu’à la fin des temps. En louant Marie, l’Eglise n’a pas inventé quelque chose « à côté » de l’Ecriture: elle a répondu à cette prophétie faite par Marie en cette heure de grâce.

Et ces paroles de Marie n’étaient pas seulement des paroles personnelles, arbitraires peut-être. Elisabeth s’était exclamée, comme le dit saint Luc, remplie de l’Esprit Saint: « Bienheureuse celle qui a cru ». Et Marie, elle aussi remplie de l’Esprit Saint, continue et complète ce qu’a dit Elisabeth, en affirmant: « toutes les générations me diront bienheureuse ». Il s’agit d’une véritable prophétie, inspirée par l’Esprit Saint, et l’Eglise, en vénérant Marie, répond à un commandement de l’Esprit Saint, et fait ce qu’elle doit faire. Nous ne louons pas suffisamment Dieu si nous ne disons rien sur ses saints, en particulier sur « la Sainte » qui est devenue sa demeure sur la terre, Marie. La lumière simple et multiforme de Dieu ne nous apparaît précisément dans sa variété et dans sa richesse qu’à travers le visage des saints, qui sont le véritable miroir de sa lumière. Et précisément en voyant le visage de Marie, nous pouvons voir, plus que par d’autres moyens, la beauté de Dieu, sa bonté, sa miséricorde. Nous pouvons réellement percevoir la lumière divine dans ce visage.

« Toutes les générations me diront Bienheureuse ». Nous pouvons louer Marie, vénérer Marie, parce qu’elle est « bienheureuse », bienheureuse pour toujours. Et tel est le contenu de cette Fête. Bienheureuse parce qu’elle est unie à Dieu, qu’elle vit avec Dieu et en Dieu. Le Seigneur, la veille de sa Passion, en prenant congé des siens, a dit : « Je vais vous préparer, dans la grande maison du Père, une demeure. Et il y a de nombreuses demeures dans la maison du Père ». Marie en disant : « Je suis la servante du Seigneur, qu’il m’advienne selon ta parole » a préparé ici sur la terre la demeure pour Dieu : corps et âme, elle en est devenue la demeure et elle a ainsi ouvert la terre au ciel.

Saint Luc, dans l’Evangile que nous venons d’entendre, à travers différentes allusions, fait comprendre que Marie est la véritable Arche de l’Alliance, que le mystère du Temple — la venue de Dieu ici sur terre — s’accomplit en Marie. Dieu habite réellement en Marie, il devient présent ici sur la terre. Marie devient sa tente. Ce que désirent toutes les cultures — c’est-à-dire que Dieu vienne habiter parmi nous — se réalise ici. Saint Augustin dit : « Avant de concevoir le Seigneur dans le corps, elle l’avait déjà conçu dans l’âme ». Elle avait donné au Seigneur l’espace de son âme et elle était ainsi devenue réellement le véritable Temple où Dieu s’est incarné, où il est devenu présent sur cette terre. Et ainsi, étant la demeure de Dieu sur la terre, sa demeure éternelle est déjà préparée en elle, cette demeure est déjà préparée pour toujours. Et cela est toute la substance du dogme de l’Assomption de Marie à la gloire du ciel, corps et âme, exprimée ici dans ces paroles. Marie est « bienheureuse » parce qu’elle est devenue — totalement corps et âme, et pour toujours — la demeure du Seigneur. Si cela est vrai, Marie nous invite non seulement à l’admiration, à la vénération, mais elle nous guide, elle nous montre le chemin de la vie, elle nous montre comment nous pouvons devenir bienheureux, trouver le chemin du bonheur.

Ecoutons encore une fois les paroles d’Elisabeth, qui s’achèvent dans le Magnificat de Marie: « Bienheureuse celle qui a cru ». L’acte premier et fondamental pour devenir demeure de Dieu et pour trouver ainsi le bonheur définitif, c’est croire, c’est la foi, la foi en Dieu, la foi en ce Dieu qui s’est montré en Jésus Christ et se fait entendre à travers la parole divine de l’Ecriture Sainte. Croire, ce n’est pas ajouter une opinion à d’autres. Et la conviction, la foi que Dieu existe n’est pas une information comme les autres. Il y a de nombreuses informations dont il nous importe peu qu’elles soient vraies ou fausses, elles ne changent pas notre vie. Mais si Dieu n’existe pas, la vie est vide, l’avenir est vide. Et si Dieu existe, tout est transformé, la vie est lumière, notre avenir est lumière et nous avons une orientation pour trouver comment vivre. C’est pourquoi croire constitue l’orientation fondamentale de notre vie. Croire, dire: « Oui, je crois que Tu es Dieu, je crois que dans le Fils incarné Tu es présent parmi nous », oriente ma vie, me pousse à m’attacher à Dieu, à m’unir à Dieu et ainsi à trouver le lieu où vivre, et la manière de vivre. Et croire n’est pas seulement un type de pensée, une idée ; c’est, comme je l’ai déjà suggéré, une manière d’agir, c’est une manière de vivre. Croire veut dire suivre la trace qui nous est indiquée par la Parole de Dieu. Marie, en plus de cet acte fondamental de la foi, qui est un acte existentiel, une prise de position pour toute la vie, ajoute une autre parole : « Sa miséricorde s’étend sur ceux qui le craignent ». Elle parle, avec toute l’Ecriture, de la « crainte de Dieu ». Il s’agit peut-être là d’une parole que nous connaissons peu et que nous n’aimons pas beaucoup. Mais la « crainte de Dieu » n’est pas l’angoisse, c’est tout autre chose. En tant que fils, nous ne ressentons pas d’angoisse à l’égard du Père, mais nous ressentons la crainte de Dieu, la préoccupation de ne pas détruire l’amour sur lequel est placé notre vie. La crainte de Dieu est ce sens de la responsabilité que nous devons ressentir, la responsabilité de la portion du monde qui nous est confiée au cours de notre vie. La responsabilité de bien administrer cette part du monde et de l’histoire que nous sommes et de servir ainsi à la juste édification du monde, servir à la victoire du bien et de la paix.

« Toutes les générations te diront bienheureuse » : cela veut dire que le futur, l’avenir appartient à Dieu, qu’il est entre les mains de Dieu, que Dieu l’emporte. Et ce n’est pas le dragon, qui est si fort et dont parle aujourd’hui la première Lecture, qui l’emporte, le dragon qui est la représentation de tous les pouvoirs de la violence du monde. Ils semblent invincibles, mais Marie nous dit qu’ils ne sont pas invincibles. La Femme — ainsi que nous montrent la première Lecture et l’Evangile — est plus forte parce que Dieu est plus fort. Certes, comparée au dragon, ainsi armé, cette Femme qui est Marie, qui est l’Eglise, apparaît sans défense, vulnérable. Et véritablement, Dieu est vulnérable dans le monde, parce qu’il est l’Amour et que l’amour est vulnérable. Et toutefois, c’est Lui qui a l’avenir entre ses mains: c’est l’amour qui l’emporte et non la haine, c’est en définitive la paix qui l’emporte.

Telle est la grande consolation contenue dans le dogme de l’Assomption de Marie corps et âme à la gloire du ciel. Rendons grâce au Seigneur pour cette consolation, mais envisageons également cette consolation comme un engagement pour nous à nous trouver du côté du bien, de la paix. Et prions Marie, la Reine de la Paix, pour qu’elle aide à la victoire de la paix, aujourd’hui : « Reine de la Paix, prie pour nous ». Amen !

© Copyright du texte original en italien : Libreria editrice vaticana
Traduction réalisée par Zenit

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ZENIT Staff

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