1. «Repentez-vous car le Royaume des Cieux est proche » (Mt 4,17). Repentez-vous de vos péchés, du mal qui est en vous, afin de devenir capables de rentrer dans le Royaume des Cieux, afin de devenir capables de voir Dieu, sa Providence et son amour, afin de pouvoir trouver votre joie dans l’accomplissement de sa volonté. Alors seulement vous saurez prier comme le Seigneur nous a appris à le faire : « Notre Père, qui es aux cieux, que ton règne vienne ; que ta volonté soit faite ».
« Jeûner, c’est soumettre le corps et la volonté à un exercice qui a pour but de se libérer de toute contrainte ou servitude. Car la vie intérieure est un combat. Nous connaissons à ce sujet l’expérience de St Paul : « Je sais que nul bien n’habite en moi, je veux dire dans ma chair ; en effet vouloir le bien est à ma portée, mais non pas l’accomplir. Puisque je ne fais pas le bien que je veux et commets le mal que je ne veux pas […]. Je me complais dans la loi de Dieu du point de vue de l’homme intérieur, mais j’aperçois une autre loi dans mes membres qui lutte contre la loi de ma raison et m’enchaîne à la loi du péché qui est dans mes membres. Malheureux homme que je suis ! Qui me délivrera de ce corps qui me voue à la mort ? » (Ro 7, 18-19. 22-24). « Ma grâce te suffit » (2 Co 12,9), lui dit le Seigneur ». Il nous le dit aussi. Par le jeûne, et avec la grâce de Dieu qui ne nous abandonne jamais, nous voulons devenir des personnes libres, capables de vivre selon l’esprit,! et de faire le bien que nous voulons.
2. « Le jeûne et l’aumône sont unis. Le jeûne pour exercer le corps et l’âme et y renouveler les énergies de bien. L’aumône pour reporter ces énergies en nous sur le prochain que nous aimons parce qu’il est l’image de Dieu. L’aumône est donc notre communion avec toute personne humaine, surtout privée, abandonnée ou souffrante, dans notre société ou dans le monde. Notre carême (jeûne et aumône), en ces jours, nous mettent en communion devant Dieu avec toutes le victimes des tremblements de terre et de mer survenues récemment dans les deux continents d’Asie et d’Afrique. En communion avec les victimes des maladies incurables. En communion avec les victimes des injustices imposées par l’homme à ses frères et sœurs au nom de l’intérêt national, ou au nom de la pure violence comme unique voie pour la paix. En communion avec toute résistance à toute oppression, à toute occupation, comme celle qui a lieu en notre Terre Sainte, occupation qui profane et démolit la personne humaine palestinienne en la privant de sa liberté et la personne humaine israélienne en la privant de sa sécurité et des énergies de bien en elle.
3. « Nous voyons revivre, en ces jours, dans notre vie quotidienne de conflit et d’occupation dans notre Terre Sainte, un nouveau souffle de justice et de raison. Nous voyons aussi un nouvel effort de la communauté internationale. Nous en rendons grâce à Dieu. Nous lui demandons de soutenir les chefs dans leurs nouvelles visions.
« Le jeûne est requis aussi dans la politique, un jeûne qui soit chez ceux qui détiennent le pouvoir une purification des intentions et des égoïsmes individuels ou nationaux, un jeûne qui rende possible aux chefs de voir et de savoir qu’ils sont mandatés pour servir et sauver, et que toutes les personnes humaines, dans tous les peuples, sont toutes également créées et aimées par Dieu. Elles ne sont pas divisées en deux camps, les bons et les mauvais, les forts et les faibles. Toutes tiennent leur dignité de Dieu, et toutes sont appelées à la même liberté et à la même sécurité.
4. « Que notre jeûne soit une sanctification et une purification de nos âmes, de sorte que nous devenions les purs de cœurs qui voient Dieu, qui le voient dans tout frère et sœur au-delà de toute barrière de religion, de nationalité ou de géographie. Alors, avec tous nos frères et sœurs dans le monde entier, nous saurons prier comme le Seigneur nous a appris à le faire : « Notre Père, qui es aux cieux, que ton règne vienne ; que ta volonté soit faite ».
+ Michel Sabbah, Patriarche de Jérusalem Mercredi des Cendres