Madame l’Ambassadeur,
1. Je suis heureux d’accueillir Votre Excellence pour la présentation des Lettres qui L’accréditent en qualité d’Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire du Royaume des Pays-Bas près le Saint-Siège.
Je vous remercie vivement de m’avoir transmis le message courtois de Sa Majesté la Reine Beatrix, et je vous saurais gré de bien vouloir Lui exprimer en retour mes vœux les meilleurs pour sa personne, pour la famille royale, ainsi que pour tout le peuple néerlandais.
2. Chaque jour, les nouvelles du monde rappellent à tous le besoin impérieux de construire un avenir de paix entre les hommes et, pour y parvenir, de consolider un ordre international stable, et garanti notamment par un meilleur partage des ressources au niveau international et par une politique active d’aide au développement. Comme vous l’avez souligné, Madame l’Ambassadeur, votre pays a été affronté lui-même, récemment, à des tensions nouvelles, qui résultent de la transformation rapide de nos sociétés, dans un monde de plus en plus ouvert à la diversité des cultures. Là aussi se fait jour la nécessité et l’urgence d’un dialogue approfondi entre les différents groupes qui composent la nation, pour que tous apprennent à se connaître et à se respecter. Cette ouverture à l’autre est indispensable pour dépasser les frontières de chaque groupe, comme je le rappelais dans mon Message pour la célébration de la Journée mondiale de la Paix du 1er janvier 2001: « Pour que le sens de l’appartenance culturelle ne se transforme pas en fermeture, il y a un antidote efficace : la connaissance sereine, non conditionnée par des préjugés négatifs, des autres cultures » (n. 7). À cette condition, il sera possible d’établir entre les différentes communautés des relations pacifiques, afin de construire tous ensemble l’édifice commun de la nation.
3. Pour assurer une contribution forte de l’Église catholique à ce processus qui prépare en quelque sorte « une nouvelle culture politique » (Message pour la célébration de la Journée mondiale de la Paix, 1er janvier 2005, n. 10), j’ai pris à nouveau l’initiative, il y a maintenant près de trois ans, de réunir à Assise des représentants des grandes religions du monde, afin de manifester ensemble notre volonté commune de paix; je les ai appelés à susciter un dialogue approfondi entre toutes les religions, et je leur ai demandé en particulier de renoncer absolument à toute légitimation du recours à la violence pour des motifs religieux et plus encore de le condamner explicitement. Depuis, le Saint-Siège s’est employé à promouvoir, à tous les niveaux, un authentique dialogue interreligieux, invitant les chrétiens, dans toutes les sociétés où ils vivent, à agir dans ce même esprit, comme des artisans de paix et de dialogue, notamment avec les fidèles des autres religions avec lesquels ils vivent. Je sais que l’Église catholique aux Pays-Bas s’est exprimée récemment en ce sens par la voix de ses Évêques et je les assure de mon entier soutien à cette occasion.
4. Vous avez souligné, Excellence, la part importante que prend votre pays dans la lutte contre la faim et la pauvreté dans le monde, et son engagement en faveur du développement et de l’assistance sanitaire auprès des populations particulièrement exposées au drame des pandémies, comme celle du Sida qui s’est si rapidement répandue en Afrique, y provoquant d’innombrables victimes. Le Saint-Siège, vous le savez, considère qu’il est nécessaire avant tout, pour combattre cette maladie de façon responsable, d’accroître la prévention, notamment à travers l’éducation au respect de la valeur sacrée de la vie et la formation à la pratique correcte de la sexualité, qui suppose chasteté et fidélité. À ma demande, l’Église s’est mobilisée elle aussi en faveur des victimes et spécialement pour que leur soit assuré l’accès aux soins et aux médicaments nécessaires à travers de nombreux centres de traitement.
Les Pays-Bas viennent d’assurer la présidence de l’Union européenne, au moment où celle-ci accueillait de nouveaux pays en son sein et alors que se préparent de nouvelles adhésions. Le Saint-Siège a toujours suivi et encouragé le projet européen comme un apport constructif à la paix sur le continent lui-même mais aussi au-delà, le considérant comme une perspective de coopération pour d’autres régions du monde. Comme je l’ai demandé instamment dans mon récent Message pour la célébration de la Journée mondiale de la Paix, le 1er janvier 2005 (n. 10), j’appelle les gouvernements de l’Union européenne à déployer ensemble de nouveaux efforts en faveur du développement, notamment de l’Afrique, continent voisin et devenu si proche de l’Europe par les liens de l’histoire, en développant des accords de véritable coopération et de partenariat.
5. Depuis plusieurs années, la société néerlandaise, marquée par le phénomène de la sécularisation, s’est engagée dans une politique nouvelle en matière de législation concernant le commencement et la fin de la vie humaine. Le Saint-Siège n’a pas manqué, alors, de faire connaître sa claire position et d’inviter les catholiques des Pays-Bas à témoigner toujours davantage de leur attachement au respect absolu de la personne humaine, de sa conception à sa mort naturelle. J’invite encore une fois les Autorités et le personnel médical, ainsi que toutes les personnes qui exercent un rôle éducatif, à mesurer la gravité de ces questions et donc l’importance des choix qu’ils engagent, afin de bâtir une société toujours plus attentive aux personnes et à leur dignité.
Les jeunes de votre pays, qui ont la chance de vivre en paix au sein de l’Union européenne depuis plusieurs générations et qui aspirent à un épanouissement et à un bien-être légitimes, ont besoin, pour se préparer aux responsabilités qui seront demain les leurs, de recevoir une éducation solide, qui développe et unifie leur personnalité, fortifiant en eux « l’homme intérieur » selon la belle expression de l’Apôtre Paul (cf. Ep 3, 16), et qui les ouvre tout spécialement à la rencontre des autres, dans une société de plus en plus cosmopolite et multiculturelle. L’Église catholique, qui a toujours été attentive à la jeunesse, continuera pour sa part à porter ce souci de l’éducation intégrale des jeunes et elle sera disponible pour apporter son concours aux efforts que la Nation tout entière ne manquera pas de déployer en ce sens.
6. Par votre intermédiaire, Excellence, je suis heureux de saluer la communauté catholique des Pays-Bas et ses Pasteurs. Je la sais profondément engagée dans la vie du pays, attentive aux évolutions de la société et décidée à apporter sa pleine contribution au bien commun, rendant témoignage de ce qu’elle croit et espère, et s’efforçant de vivre conformément au commandement de l’amour, reçu de son Seigneur. Je l’encourage à être particulièrement attentive à promouvoir chaque jour le dialogue entre les personnes comme entre les groupes qui composent la société, notamment dans les grandes agglomérations urbaines, où la complexité des relations humaines peut engendrer de grandes solitudes. Je l’appelle aussi à se mettre sans réserve au service des plus faibles, souvent marginalisés dans les sociétés modernes marquées par la compétition économique et sociale.
7. Madame l’Ambassadeur, vous inaugurez aujourd’hui la noble mission de représenter votre pays auprès du Saint-Siège. Veuillez accepter les vœux très cordiaux que je forme pour son heureuse réussite et soyez sûre de toujours trouver auprès de mes collaborateurs la compréhension et le soutien nécessaires!
Sur Votre Excellence, sur sa famille, sur tous ses collaborateurs et sur tous ses compatriotes, j’invoque de grand cœur l’abondance des Bénédictions divines.
[Texte original: Français]