Message de Mgr Brendan M. O’Brien
Président de la Conférence des évêques catholiques du Canada
Le thème de la Journée mondiale de la Jeunesse 2005, « Nous sommes venus l’adorer » (Matthieu 2,2) inspire mes réflexions à l’occasion de Noël et du Nouvel An. Par cette phrase, le Saint-Père invite les jeunes et chacun d’entre nous à méditer ces paroles des Mages, et à découvrir davantage l’importance de l’Incarnation par rapport à l’humanité.
L’Évangile choisi traditionnellement pour le jour de Noël proclame que « le Verbe s’est fait chair » (Jean 1,14). Le Verbe représente le message de salut de Dieu, qui brille dans les ténèbres et éclaire le monde.
En diverses occasions, le Saint-Père a souligné que l’Incarnation fait apparaître le visage humain de Dieu et le visage divin de l’humanité (cf. Ecclesia in America, no 67). Comme le mentionne le Prologue de l’Évangile de Jean, le Verbe est l’éternel dessein de Dieu par qui tout a été créé. C’est l’invitation divine qui, une fois accueillie, donne « le pouvoir de devenir enfants de Dieu. » Plein de grâce et de vérité, le Verbe est le mystère intime du cœur de Dieu. Il est le chemin vers Dieu, la vérité à propos de Dieu et la vie véritable avec Dieu. Depuis le commencement, avant même que le monde soit, le Verbe était avec Dieu et il est Dieu.
Par contre, la « chair » est une expression biblique qui manifeste la faiblesse et la fragilité de la nature humaine. En soi, la chair est négligeable (Jean 6,63). « Tous les êtres de chair sont comme l’herbe » affirme le prophète Isaïe, « l’herbe sèche, la fleur se fane, mais la parole de notre Dieu subsistera toujours! » (40, 6-8). Dans l’impuissance et la vulnérabilité du nouveau-né et du vieillard, du malade et de l’affamé, du pauvre et du mourant, nous reconnaissons la fragilité et la dépendance de la nature humaine. Quand cette même nature humaine se dégrade dans le vol, le meurtre et la destruction (Jean 10, 10), nous voyons le gouffre de notre condition humaine dans toute son obscurité et son aveuglement.
Pourtant, quand elles sont mises en relation avec le Verbe de Dieu, nos faiblesses et notre dureté de cœur peuvent être transformées non seulement en tendresse humaine, mais même en compassion divine. « Je leur enlèverai … leur cœur de pierre et je leur donnerai un cœur de chair… Ils seront mon peuple et je serai leur Dieu » (Ézéchiel 11, 19-20). Et tout comme le décrit l’Évangile de Jean, le Verbe fait chair est l’Agneau de Dieu, qui donne sa vie pour les autres, les console dans leurs souffrances, ouvre les yeux des aveugles et nourrit les affamés. Jésus est le pain donné pour que « le monde ait la vie » (Jean 6, 51).
Dans ses réflexions sur la Journée mondiale de la Jeunesse 2005, le pape Jean-Paul II mentionne que « les Mages découvrent Jésus à ‘Bêth-lehem’, qui signifie ‘maison du pain’. Dans l’humble étable de Bethléem repose, sur un peu de paille, le ‘grain de blé’ qui, en mourant, portera ‘beaucoup de fruit’ » (cf. Jean 12, 24).
Le sens le plus profond des signes que Jésus a accomplis n’a pas été de fournir du pain périssable aux affamés, mais de révéler qu’il était « le pain de Dieu, celui qui descend du ciel et qui donne la vie au monde » (Jean 6,33). Celui qui mangera de ce pain vivra pour l’éternité et ce pain c’est sa chair (Jean 6, 51).
La récente lettre apostolique Mane Nobiscum Domine annonce une Année de l’Eucharistie, qui a débuté en octobre 2004 et se terminera en octobre 2005. Dans ce message, le Saint-Père s’attarde sur la signification du Pain de Vie. Il souligne de quelle façon les chrétiens peuvent célébrer ce mystère et prendre davantage conscience de la présence de Dieu au milieu d’eux : dans les sacrements et particulièrement dans l’Eucharistie, dans les Saintes Écritures, par le sacrifice et la prière, dans l’adoration, la communion ecclésiale, par le témoignage et l’évangélisation.
Tout comme l’Eucharistie, Noël aussi est la révélation du Verbe de Dieu. C’est un pressant appel au témoignage et à l’évangélisation, qui nous invite à manifester la présence de Dieu dans le monde, qui nous enseigne à promouvoir la communion, la paix et la solidarité, et nous met au défi de construire une société plus juste et altruiste. Noël nous rappelle également que nous aussi, à l’exemple de Jésus, nous devons donner la vie au monde. Unis au Verbe de Dieu fait chair, nous devons transformer nos faiblesses et notre dureté de cœur en tendresse divine. À la suite de l’Agneau, nous devons donner notre vie pour les autres, les consoler dans leurs souffrances, ouvrir les yeux des aveugles et nourrir les affamés.
Noël renferme le même mystère rendu présent dans l’Eucharistie. Il révèle le cœur et la mission non seulement du Christ, mais aussi de son Église et de ses membres. Dieu s’est fait l’un de nous, afin que nous puissions aider les autres à partager la vie divine et éternelle. Éclairés par la vraie lumière qui vient dans le monde, nous devons être la lumière qui brille dans les ténèbres, même lorsque le monde des ténèbres ne nous reconnaît pas. Reconnaissant le Père en Jésus et forts de l’Esprit Saint, nous sommes appelés à apporter la vie et la lumière au monde et même à accomplir des œuvres plus grandes encore que celles de Jésus (Jean 14, 12).
L’Eucharistie célèbre la venue de Dieu au milieu de nous. Que la grâce et la vérité du Verbe de Dieu parmi nous constituent notre vraie nourriture et notre vraie breuvage à Noël, et que la gloire de l’Incarnation nous fortifie et nous éclaire tous et toutes alors que nous entrons dans une nouvelle année!
+ Brendan M. O’Brien
Archevêque de St. John’s
Président de la Conférence des évêques catholiques du Canada
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Dec 17, 2004 00:00