Lors de la Réunion Plénière de la Commission des Conférences des Evêques de la Communauté Européenne qui s’est tenue à Bruxelles les 18 et 19 novembre, les évêques ont discuté de la consolidation de l’Union Européenne élargie, de la ratification du Traité Constitutionnel, de l’adhésion de la Turquie, et de la mise en œuvre de la Stratégie de Lisbonne afin de sauvegarder et promouvoir les intérêts des citoyens européens. Voici le communiqué final de la réunion de la COMECE (cf. www.comece.org).
La Nouvelle Commission Européenne
Les Evêques de la COMECE accueillent favorablement la confirmation de la nouvelle Commission Européenne par le Parlement Européen et félicitent le nouveau Président, José Manuel BARROSO. Ils soulignent l’importance du mandat de la Commission et insistent sur le rôle qu’elle tient dans l’apport d’une réponse aux besoins des citoyens européens vers la recherche du bien commun. Ils ont exprimé leur gratitude au Président de la Commission sortante Romano PRODI.
Les Evêques ont pris note du retard de la confirmation de la Commission-désignée après les auditions au Parlement européen qui concluaient que la compétence globale de la Commission pouvait être remise en cause. Les Evêques approuvent le scrutin démocratique sur les qualifications politiques des commissaires désignés. Cependant, ils regrettent la controverse qui a entouré la nomination et les opinions personnelles de Rocco BUTTIGLIONE, et l’impasse politique qui a suivi. Certains MPE ont fait preuve d’intolérance face aux croyances personnelles du commissaire désigné plutôt que de se concentrer sur sa capacité à honorer le rôle politique qui lui était confié. Ils demandent que la liberté de religion et d’expression religieuse, accordée par le Traité Constitutionnel, soit entièrement respectée et assurée dans toutes les institutions européennes dans l’Union élargie.
Les Evêques reconnaissent le besoin de maintenir des bonnes relations transatlantiques entre les Etats-Unis d’Amérique et l’Union Européenne. Les malentendus et les incompréhensions doivent être rectifiés entre les deux entités pour faire grandir une relation basée sur notre respect commun du droit, nos valeurs communes et nos intérêts communs. Monsieur John BRUTON chef de la délégation de la Commission Européenne à Washington D.C a souligné les bénéfices d’un partenariat fort entre les Etats-Unis et l’UE, étant donné leurs potentiels pour instituer un ordre mondial plus pacifique. Monsieur John BRUTON a également mis en lumière des domaines dans lesquelles les deux acteurs peuvent apprendre l’un de l’autre en terme d’approche et de conduite de leur action. Les Evêques affirment l’importance d’une coopération et d’une coordination entre les USA et l’UE, particulièrement en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme, le renforcement de la politique économique et commerciale et la solidarité avec les pays en voie de développement et les pays les moins développés.
Réflexions sur la Turquie
Deux débats séparés concernant la Turquie ont eu lieu pendant la Réunion Plénière. Dans un débat public, le Professeur Sylvie GOULARD, le Docteur Marek GRELA, le Représentant permanent de la Pologne dans l’Union européenne et le Docteur Otmar OEHRING, directeur des Droits de l’Homme de MISSIO ont conduit les discussions sur » la Turquie et l’Union Européenne » dans la perspective du prochain Conseil Européen. Après de sérieuses discussions relatives à l’ouverture des négociations d’adhésion avec la Turquie, les Evêques ont proposé les réflexions suivantes :
« La question de savoir si la Turquie peut entamer les négociations en vue d’une adhésion ultérieure à l’Union Européenne, n’est pas une question d’ordre religieux mais politique. Cette question politique mérite une discussion approfondie au sein de toute la société civile européenne.
Pour l’Église catholique il est important que la Turquie et l’Union Européenne développent leurs relations d’une manière constructive et amicale. Il ne peut y avoir d’obstacle d’ordre religieux à ce qu’un pays dont la population est majoritairement musulmane, comme la Turquie, devienne membre de l’Union Européenne. En toute hypothèse, il est necessaire que la Turquie respecte les droits fondamentaux, par example l’égalité du statut des femmes, la liberté d’expression et association et la liberté religieuse.
Pour cette raison, on peut se demander s’il est opportun d’ouvrir les négociations avec la Turquie, alors que les Droits Fondamentaux, et y inclus la liberté religieuse, ne sont pas entièrement respectés dans cet État. La Commission Européenne l’a elle-même constaté dans son rapport du 6 octobre 2004, sans cependant en tirer la conclusion de lier l’ouverture des négociations avec le plein respect des dits droits.
Les évêques de la COMECE proposent de demander au gouvernement turc de corriger les manquements évoquées dans le rapport de la Commission concernant la liberté religieuse et le statut juridique des minorités conformément aux provisions du Traité de Lausanne de 1923 avant d’ouvrir les négociations sur la transposition de la législation européenne. Ils demandent au Conseil Européen d’insérer ce point dans les conclusions de sa réunion des 16/17 décembre, à Bruxelles. »
Les dimensions spirituelles et culturelles de l’Europe
Les Evêques approuvent les initiatives du président de la Commission sortante Romano PRODI et de l’actuel Présidence Néerlandaise. Monsieur René LERAY, conseiller à la DG Relations Extérieures de la Commission européenne a présenté les résultats du groupe d’experts qui travaillait sur les dimensions culturelles et spirituelles de l’Europe. Le groupe a été établi par le président PRODI et conduit par le Professeur Krzysztof MICHALSKI. Les Evêques encouragent le Président de la nouvelle Commission José BARROSO a continuer ces initiatives tout en étendant et en approfondissant les réflexions relatives aux dimensions spirituelles et culturelles de l’Europe. Ils ont annoncé que la COMECE soumettrait des propositions visant à renforcer la reconnaissance des dimensions spirituelles de l’Union. Les Evêques souhaitent contribuer aux débats sur les valeurs de la conférence finale organisée par la Présidence Néerlandaise à La Haye, le 4 décembre 2004.
La Constitution
Les Evêques saluent la signature du Traité Constitutionnel et prennent note du fait que celui-ci n’entrera en vigueur qu’après ratification dans tous les Etats membres. Ils ont souligné l’importance d’un débat public interactif et d’information dans le cours du processus de ratification et ce principalement dans les Etats membres où un référendum aura lieu. Le Traité Constitutionnel reflète les valeurs et objectifs de l’UE et la vision chrétienne de l’être humain à travers l’inclusion d’une Charte des Droits Fondamentaux. Mais il est regrettable qu’il ne reste aucune référence au Christianisme dans la version finale du préambule de ce texte.
Evènements récents des Pays-Bas
Les Evêques sont préoccupés par la situation aux Pays-Bas devenue dramatique avec la mort de Monsieur van GOGH et les évènements suivants. L’attaque contre Monsieur van GOGH et les incendies de mosquée et d’églises ne doivent jamais se reproduire. Les croyances ou idéologies religieuses ne légitiment jamais la violence.
L’Assemblée pense qu’il incombe aux institutions européennes, aux gouvernements nationaux, à l’Eglise et à la société civile de faire de la citoyenneté européenne une réalité tangible dans tous les Etats membres depuis l’élargissement de Mai.
La Stratégie de Lisbonne
Les Evêques reco
nnaissent la prévalence de la Stratégie de Lisbonne en ce qui concerne les futurs succès économiques de l’Union Européenne. Ils reconnaissent qu’il est nécessaire de réformer l’économie européenne afin de sauvegarder le modèle social européen qui est en danger face à la mondialisation et au déclin démographique. Le rôle de la famille est particulièrement important pour le modèle social européen, étant donné son rôle unique dans l’offre de services à la société. Après une présentation par Monsieur David WHITE, directeur à la DG Entreprise de la Commission Européenne, intitulée » La Stratégie de Lisbonne : Une priorité pour l’Union européenne « , les Evêques ont discuté des aboutissements du rapport Kok et du prochain compte rendu de mi-parcours. L’Assemblée a exprimé ses inquiétudes en ce que la Stratégie n’a pas jusqu’ici été efficace et a souligné qu’une nouvelle approche serait appropriée. Aussi ont-ils chargé le vice président de la COMECE, Mgr VAN LUYN, ainsi que d’autres Evêques européens de produire un mémorandum sur le renouvellement de la Stratégie de Lisbonne. Ce mémorandum abordera les questions relatives au financement de la recherche, l’éducation, la famille et le marché du travail.
Du fait de l’élargissement européen et de l’agrandissement de la COMECE, les Evêques ont discuté des attentes, espoirs et peurs des nouveaux membres de la COMECE. Les Evêques ont d’ailleurs convenu de revoir leurs méthodes de travail.
La COMECE est la Commission des Conférences des Evêques Catholiques des Etats-membres de l’UE.
Les évêques participant à la Réunion Plénière en tant que représentants de leurs Conférences épiscopales sont :
Mgr Josef Homeyer (Allemagne) ; Mgr Adrianu van Luyn (Pays-Bas), Mgr Hippolyte Simon (France), le Cardinal Josip Bozanic (Croatia) ; Mgr Teodoro De Faria (Portugal) ; Mgr Jozef De Kesel (Belgium) ; Mgr Fernand Franck (Luxembourg) ; Rev. Gintaras Grusas (Lituanie) ; Mgr Egon Kapellari (Autriche) ; Mgr William Kenney (Suède) ; Mgr Vaclav Maly (République Tchèque) ; Mgr Darmuid Martin (Irlande) ; Mgr Guiseppe Merisi (Italy) ; Mgr Peter Moran (Scotland) ; Mgr Frantisek Rabek (Slovaquie) ; Mgr Ioannes Spiteris (Greece) ; Mgr Antón Stress (Slovenia) ; Mgr András Veres (Hongrie), Mgr Elias Yanes Alvarez (Espagne)