CITE DU VATICAN, Jeudi 6 mars 2003 (ZENIT.org) – « Il semble que le voyage de Jacques Chirac en Algérie s’insère dans une dynamique de réconciliation », écrit Gérard Leclerc. L’éditorialiste de « France Catholique » estime que c’est le moment de favoriser l’établissement de « relations d’un type nouveau » au-dessus de « l’abîme séparant le Nord du Sud ».
La prochaine édition de l’hebdomadaire français « France Catholique » (http://www.france-catholique.fr, n°2872 daté du 7 mars) propose cette réflexion de Gérard Leclerc dans son éditorial sur la relation France-Algérie à la suite du voyage du président français Jacques Chirac.
– France-Algérie –
Le voyage triomphal de Jacques Chirac en Algérie constitue un grand moment pour les deux peuples que l’histoire a irrémédiablement associés, en dépit de toutes les douleurs et des blessures de la mémoire. Une solidarité fondamentale apparaît, que tout semblait devoir anéantir ces dernières années : la guerre civile après que l’Algérie ait paru s’être livrée à l’islamisme
le plus radical, les ressentiments mutuels avivés par un tiers-mondisme parfois haineux ou un anticolonialisme passablement manichéen, les difficultés de l’immigration ressenties en France au point de déstabiliser la vie politique.
Eh bien non, il n’y a pas de fatalité absolue de la haine. Les nations peuvent se retrouver, les peuples se tendre la main. Et brusquement une page de l’histoire se tourne pour que se libère un autre avenir. On souligne justement que la population algérienne est extrêmement sensible
à l’action du Président de la République en faveur d’une solution pacifique en Iraq. Mais n’est-ce pas l’extrême sensibilité de la France aux doléances et aux aspirations du Maghreb et du monde arabe qui la retient de se solidariser avec une action guerrière qui risquerait d’attiser le choc des civilisations, en produisant une chaîne de réactions imprévisibles et en permettant aux
extrémistes de se rallier des masses humiliées par la superbe des conquérants ?
Plutôt que de se lancer dans une aventure militaire en imposant sur le terrain des solutions improbables, il convient sans doute d’établir des relations d’un type nouveau qui empêcheront l’aggravation de l’abîme qui sépare le Nord du Sud. Notre pays, précisément à cause de son passé, est en situation de mettre en oeuvre une autre logique des relations internationales, en prenant ses distances avec l’exclusivité des rapports de force, le repli par trop exclusif sur les rivages d’une Europe qui perdrait son ouverture à l’universel. Cela fait bien longtemps que le grand économiste chrétien François Perroux* avait rappelé la vocation d’une « Europe sans rivages ».
Mais il se trouve que l’actualité la plus pressante, le mouvement spontané du peuple algérien vers nous, semblent transformer les données d’un ordre international tétanisé par la violence, le terrorisme et les déséquilibres de la puissance et de l’économie.
C’est pourquoi, dans l’esprit qui est celui de l’activité intense du Saint-Siège pour parer à la guerre préventive contre l’Iraq, il nous semble que le voyage de Jacques Chirac en Algérie s’insère dans une dynamique de réconciliation, d’échanges et de développement qui devrait nous sortir d’une psychose désastreuse. La guerre est parfois une solution malheureuse à laquelle on ne peut se dérober. Elle n’est jamais la solution ultime. Pour promouvoir un nouvel ordre international, les retrouvailles franco-algériennes pourront, espérons-le, servir de modèle et de recours.
Gérard LECLERC
* Cf. le très remarquable « Dossier François Perroux » publié par la revue Cité (n°40), 17, rue des Petits-Champs – 75001 Paris – France, prix franco : 7 e (à l’ordre de « Cité »).
(c) France Catholique